Pour saluer le 50e Tour de Bretagne (ex-Ruban Granitier Breton), DirectVelo vous propose une série d'articles sur l'histoire de cette course devenue une référence parmi les 2.2. Aujourd'hui, Marc Gomez qui rate la victoire en 1981 pour une raison qu'il révèle.

Cette pâte de fruits qui colle aux doigts, à peine sortie de l'emballage, l'envie de la déguster et puis les autres qui choisissent ce moment pour s'échapper... Sous son casque en cuir, Marc Gomez cogite. Il doit vite prendre une décision : jeter sa pâte de fruits ou se jeter dans les roues des adversaires qui s'enfuient. "J'ai préféré manger", reconnaît-il 35 ans plus tard pour DirectVelo. Il va s'en mordre les doigts. La victoire finale dans le Ruban Granitier 1981 s'envole avec cette échappée, sur la route de Plouay. Sa victoire contre-la-montre sur le circuit de Plumelec ne sera pas suffisante pour combler son retard sur Marc Somers.

« JE N'AI PAS SU MOBILISER MES EQUIPIERS »

Pourtant, le Ruban Granitier Breton avait bien débuté pour le vainqueur de Bordeaux-Saintes en début de saison. La course démarre par un prologue devant les remparts de Saint-Malo. "C'était un prologue d'un kilomètre. C'était ma distance. J'avais été Champion de Bretagne du kilomètre. J'ai fait un bon échauffement dans les côtes entre Saint-Malo et Cancale. J'arrive 2-3 minutes avant le départ, bien chaud", se souvient  l'ancien vainqueur du Tour d'Ille-et-Vilaine.

Le maillot de Champion de Bretagne du Kilomètre de Marc Gomez - Crédit photo : DirectVelo.com

Malgré la valeur du comité Bretagne avec plusieurs futurs pros comme Philippe Le Leu, Jean-Pierre Guernion ou Patrick Stephan, l'équipe décide de laisser filer le maillot blanc à écharpe verte pour mieux le récupérer plus tard, sur le chrono du dernier jour. "Sauf que j'ai eu un moment d'inattention au mauvais moment entre Rennes et Plouay." On en arrive à l'affaire de la pâte de fruits. "J'ai réagi trop tard. Mes équipiers n'étaient pas bien. Je n'ai pas su les mobiliser et ceux qui sont partis étaient très forts", analyse-t-il. Parmi les fuyards, en effetn, il y avait de gros calibres avec Claude Moreau qui gagne l'étape, Ron Kiefel, Fabien De Vooght, Christian Bertin et Marc Somers qui endosse le maillot blanc. "Si j'avais gagné, c'eût été une progression logique. Je marchais pas mal", ajoute-t-il, modestement. Cette année-là, le futur vainqueur de Milan-San Remo passe à côté du titre de Champion de France Amateurs (3e) et participe à la 6e place de la France au Championnat du Monde des 100 km, sous la houlette d'Ange Roussel, encore une fois.

« ANGE ROUSSEL M'A FAIT FRANCHIR UN PAS A CHAQUE FOIS »

Marc Gomez estime que "le Ruban Granitier Breton a été un accélérateur de [sa] carrière." Il y participe la première fois en 1975 dans l'équipe B du comité Bretagne. "Je dois beaucoup à Ange Roussel [le CTR breton de l'époque NDLR]. Il m'a fait franchir un pas à chaque fois. C'est lui qui m'a donné ma chance en me retenant pour des stages de contre-la-montre par équipes au milieu de coureurs confirmés comme Jean-Paul Maho ou Alain Meslet." Voici donc le coureur à lunettes du VC Rennes  au départ de sa première grande course par étapes. "Il y avait les Polonais et les Russes, mais je les voyais de loin. C'était du derrière derny mais avec des coureurs à la place des dernys."

Victime d'une chute, il repart derrière le peloton. "Je vois Marcel Boishardy sur le bord de la route [professionnel Rennais à l'époque et futur directeur sportif de Marc Gomez NDLR]. Il me dit d'abandonner car j'étais déjà à 2 ou 3 minutes. Mais j'ai terminé", se souvient-il.

En 1979, Marc Gomez s'est trouvé une source de motivation. "Je me suis laissé pousser la barbe l'hiver. J'ai bien roulé l'hiver car je ne voulais pas qu'on se serve de cette barbe pour me dire que je ne marchais pas." Eh oui, les hipsters à la Wiggins ne sont que de pâles suiveurs de Marc Gomez.

Au Ruban Granitier, le coureur à lunettes passe dans l'équipe A de Bretagne. "J'ai franchi un palier entre 1978 et 1979." Après s'être classé 3e du prologue de 2 km de Concarneau derrière Jan Jankiewicz et Hans-Enrik Oersted, futur Champion du Monde de poursuite, Marc Gomez termine avec le maillot vert, preuve de sa régularité. Il se classe aussi 5e du contre-la-montre et 4e du général au milieu des avions de chasse polonais, preuve de sa qualité. "Les Polonais dominaient avec Sujka et Lang que j'ai retrouvé chez les pros. Cette année-là, j'ai réussi à m'intercaler entre eux et terminer premier Français."

Ce Ruban lance sa carrière internationale. "J'ai été sélectionné pour la première fois en équipe de France au Tour de Yougoslavie où je gagne la première étape."

Marc Gomez et son maillot La Vie Claire - Photo : DR

« J'AI FINI DERRIERE GREG LEMOND »

En 1980, il abandonne la course. "Chez les amateurs, je marchais moins bien les années pairs", observe le futur Champion de France pro. "Cette année-là, j'ai fini juste derrière LeMond !", sourit-il. En effet, le prodige américain - qui vient de mater les Polonais, les Tchèques, les Allemands de l'Est et quelques pros au Circuit de la Sarthe - abandonne sur un coup de tête entre Plestin-les-Grèves et Douarnenez. Alors qu'il chasse pour rentrer sur une échappée lancée par les Russes, il perce. Son directeur sportif n'est pas là et c'est l'équipe belge qui le dépanne ! Greg LeMond engueule son DS et monte dans le camion-balai. C'est là qu'il s'assoit devant Marc Gomez qui l'a précédé dans l'abandon. Premier contact entre les deux coureurs qui se retrouveront chez La Vie Claire en 1985.

1980 n'est pas une bonne année pour Marc Gomez qui rate son Championnat de France, et par conséquent, la sélection pour les Jeux de Moscou. Il se rattrapera largement en 1981, à une pâte de fruits près.

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