Julien Bernard : « Une plus grosse cerise »

Crédit photo Freddy Guérin - DirectVelo

Crédit photo Freddy Guérin - DirectVelo

Médaillé de bronze l’an passé devant son ex-coéquipier Tony Gallopin (lire ici), Julien Bernard s’est cette fois-ci débrouillé tout seul pour aller chercher la breloque d’argent ce dimanche à Saint-Martin-de-Landelles (voir classement). À 60 kilomètres de l’arrivée, le sociétaire de Lidl-Trek a accéléré dans une bosse afin de rejoindre le groupe de tête qu’il n’a plus jamais quitté. Dans le dernier tour, il s’est retrouvé en trio avec Paul Lapeira (Decathlon AG2R La Mondiale) et Thomas Gachignard (TotalEnergies). À 500 mètres de l’arrivée, le Bourguignon de 32 ans a tenté de surprendre le rapide Paul Lapeira, sans succès. Julien Bernard a confié à DirectVelo son émotion, lui qui a profité d'un week-end en famille avant d'en découdre.

DirectVelo : Tu es passé près du titre de Champion de France !
Julien Bernard : Au final, il y a quand même 50 mètres d'écart à l’arrivée. Mais c’est passé plus proche que l’année dernière, où j’avais fini 3e à deux minutes. Cette saison, j’arrive pour la gagne. On sent le maillot qui n’est pas loin... Je n’ai pas de regrets, mais c’est vrai que c’est un peu plus dur. Je connais la pointe de vitesse de Paul (Lapeira). Il a gagné au Pays Basque. Je l’ai vu aussi à la TV s’imposer sur les manches de Coupe de France. C’est un coureur très rapide et très punchy. C’était une arrivée parfaite pour lui. Même avec un peloton, il aurait été capable de gagner. J’ai tenté ce petit coup aux 400-500 mètres en espérant que Paul et Thomas (Gachignard) se regardent. Je pense que Paul était sûr de ses jambes. Il ne s’est pas trop posé de questions. J’ai cru un quart de seconde qu’ils s’étaient un peu regardés, mais pas assez. 

« LE COUP D’AVANCE VALAIT DE L’OR SUR CETTE COURSE »

Comment as-tu manœuvré ?
Aujourd’hui, je pense que j’ai bien couru. J’étais impatient pendant la course. J’attendais vraiment que Decathlon AG2R mette en route. J’avais l’impression que ça ne venait pas. J’avais envie que la course soit plus dure. En début de course, j’ai regardé qui il y avait dans l’échappée. J’ai vu que tous les favoris d’AG2R étaient plutôt à l’arrière du peloton. Du coup, je ne me suis pas inquiété, je pensais que ça allait plus être une course d’attente. C’est ce qui s’est passé. Et à quatre tours et demi de l'arrivée, je n’ai pas pu m’en empêcher, j’ai voulu allumer la mèche un premier coup pour voir ce que ça donnait. On est quasiment sorti directement avec Thomas (Gachignard). Je n’ai même pas vu où Paul était, je ne sais pas quand il est rentré. J’ai vu Nico (Prodhomme) qui ne voulait pas trop rouler. On était tous les deux dans le même bateau avec Thomas. Je me suis dit que j’avais peut-être fait une erreur. Ça avait du mal à prendre le large avec 20 secondes… 

Puis Paul Lapeira est revenu un demi tour plus tard, juste avant la ligne d’arrivée…
Quand j’ai vu qu’il était là et que Nico commençait à rouler, je me suis dit que c’était le bon coup. J’y ai directement cru, on a tout de suite pris pas mal de temps, 45" puis 1'00". Boucher cet écart sur nous trois n’était pas simple. Les bosses n’étaient pas assez longues. Au mieux, ils reprenaient quinze secondes et derrière, ça se relevait, ça se regardait toujours. Le coup d’avance valait de l’or sur cette course. Dans le final, on avait 40-45 secondes et je me doutais qu’on allait arriver pour la gagne. Dans le final, on était un contre un et contre un. Tout pouvait toujours se passer si Paul avait une crampe dans le final. C’était un scénario quasi-parfait jusqu’à l’arrivée. 

« PAS ENVIE DE DÉPLACER LES FOULES »

Qu’as-tu ressenti en franchissant la ligne d’arrivée en 2e position ?
Ce n’est pas forcément de la déception, mais c’est beaucoup d’émotion. Je viens tout seul. Si vous étiez avec moi, vous n’auriez pas l’impression que je fais un Championnat de France. C’est tout à l’arrache dans la voiture, je n’ai pas de soigneur, pas de mécano. J’ai juste mon père. Il fait à manger. On est dans un gîte. Je n’ai pas de masseur, je ne me suis pas fait masser hier soir. C’est une course importante pour moi. J’ai envie de bien faire. Je ne demande pas de support spécifique à l’équipe. Il y a forcément beaucoup plus de chances que je perde, que je gagne. Je n’ai pas non plus envie de déplacer des foules pour spécialement optimiser. 

Es-tu à l’aise dans cette configuration « roots » ?
Je prends du plaisir. Je ne vois pas souvent mon père. C’est un week-end super sympa que je passe en famille avec aussi mon fils et ma copine. On est dans un gîte, on mange barbeuc’ le soir, je trouve ça cool. Je passe un bon moment, c’est l’essentiel. Le Championnat de France l’année dernière était la cerise sur le gâteau. Cette année, c’était une plus grosse cerise.

Est-ce que ton père, Jean-François Bernard, te conseille ?
Il n’a rien le droit de me dire (sourire). Il me laisse vraiment faire comme je le sens. On échange quand même, on a reconnu le circuit ensemble en voiture, je ne l’ai pas repéré à vélo. Tactiquement, il ne peut pas deviner la course. C’est moi à l’instant-T qui doit décider de mes choix. 

« JE NE VEUX PAS SPÉCIALEMENT MA CHANCE »

Qu’est-ce que vous vous êtes dit à l’arrivée ?
Je lui ai dit que j’y ai cru. Il avait l’air content. Je pensais que j’avais les jambes quand Paul a attaqué à un tour de l’arrivée. J’ai mis du temps à réagir, j’ai quand même bouché le trou. J’ai essayé de le contrer pour qu’il ne soit pas serein, mais il a quand même gagné. J'aurais signé pour finir 2e, je ne vais pas mentir, j'ai tiré le meilleur de ma course.

Tu es toute l’année équipier chez Lidl-Trek. Ne te dis-tu pas parfois qu’il y aurait mieux à faire en ayant ta carte dans une équipe française ?
Je ne veux pas spécialement ma chance. Je préfère faire très bien ce que je fais en tant qu’équipier, ça me permet d’être dans une des meilleures équipes du monde, j’en suis très content. J’ai des leaders plus forts que moi qui marchent très bien. J’ai quand même toujours ma chance quand je la demande à l’équipe.

À ce propos, seras-tu sélectionné pour le Tour de France, qui passe sur tes routes d’entraînement en Côte d’Or, trois ans après ta dernière apparition ?
Réponse demain à 10h (sourire).  

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