Eglantine Rayer, « le signe des grandes »

Crédit photo Aurélien Regnoult - DirectVelo

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Un drapeau normand flottait en haut du Mont-Cenis, autant qu'une Normande volait sur les hauteurs de la frontière franco-italienne. Le drapeau, c'était celui de la mère d'Eglantine Rayer, qui sautait dans tous les sens pour accompagner sa fille vers l'interminable final vers Condove (Piémont), traversant même la route juste devant les roues de sa fille. Tout de suite après la ferveur de sa mère, l'habituelle coureuse du team dsm firmenich PostNL avait son directeur sportif, Emilian Broë, à ses côtés. Silencieuse, concentrée, impassible, les yeux posés à l'horizon, rien ne pouvait et ne devait la perturber. Pas cette fois. "Eglantine c'est vraiment émouvant. Elle a vécu une saison compliquée, la voir ressurgir, renaitre de ses cendres, c'est très fort. J'ai vibré dans la voiture. Je savais qu'elle en était capable, mais le mettre en application après avoir pris des revers, c'est le signe des grandes", concède-t-il.

« J'IMAGINE LES MOMENTS DE SOLITUDE, DE DOUTES, DE QUESTIONS »

Avec un petit matelas de quatre minutes d'avance lorsqu'elle plongeait dans la descente, les secondes ont défilé du mauvais côté au fil des kilomètres, avec un vent à faire s'envoler les pierres en Italie. Mais pas à faire fléchir une Eglantine Rayer lancée vers une victoire salvatrice. "Le vent était terrible, elle racontait qu'elle a eu le malheur de dézoomer la carte sur le compteur. Elle voyait que c'était tout droit pendant de nombreux kilomètres. J'imagine les moments de solitude, de doutes, de questions... Mais elle n'a pas lâché, elle est restée concentrée sur son effort, c'est ce qu'on lui demandait et c'est allé au bout", applaudit Emilian Broë, qui n'a pas manqué d'aller de monter une dernière fois à sa hauteur à l'approche des dix kilomètres.

Bien que l'écart semblait suffisant, Eglantine Rayer n'arrivait pas à croire qu'elle résisterait au peloton. Immédiatement rassurée par Emilian Broë. "Tu as 3'45" d'avance, tu n'as pas besoin de gagner avec deux minutes, tu as juste à gagner avec 10 secondes", lui lançait-il à la fenêtre de la voiture, avec des encouragements incessants. "Eglantine, elle a été Championne d'Europe, vice-Championne du Monde, de par son vécu elle a su construire des choses qui lui permettent d'être performante quand c'est nécessaire". Plongée dans une saison difficile, tout le soulagement qu'elle éprouvait était palpable dans les derniers mètres, avec une célébration où elle n'a pas manqué de montrer sa tête pour afficher sa force mentale. "Je crois vraiment en son potentiel. Ça fait quelques années que je l'accompagne, c'est un gros, gros potentiel".

« CE N'ÉTAIT PAS LE MOMENT DE LUI METTRE LA TÊTE SOUS L'EAU »

Lessivée, Eglantine Rayer s'est écroulée, immédiatement félicitée par Océane Mahé, qui a dû abandonner sur chute, et le staff de l'équipe de France. Une par une, chaque Bleue s'est arrêtée. Pendant que la principale intéressée refaisait sa course assise sur un banc, le dos meurtri, et qui n'arrivait toujours pas à y croire à une telle réussite après des mois de doutes. "Je savais qu'elle vivait un moment difficile. Ce n'était pas le moment de lui mettre la tête sous l'eau, lance Emilian Broë en référence à sa présence au Tour de l'Avenir, où il n'a pas hésité une seule seconde à l'appeler. Même si elle n'a pas eu de résultats probants cette année, je savais que ses qualités étaient là, elles n'ont pas disparu. Je lui ai répété mercredi quand on a fait une petite causerie, le talent est là et il faut juste le refaire émerger".

Et cette fois, elle a bien pu participer à l'épreuve, dont elle avait raté la première édition l'an dernier. "Elle a été l'une des premières à qui j'ai annoncé que je souhaitais l'avoir. Il y avait aussi l'attente de la validation de son équipe pour la libérer, car ça n'a pas été le cas l'an passé. À partir de ce moment, on a vu ensemble. Je lui ai donné le maximum d'informations pour arriver en forme". Le technicien lui a d'ailleurs glissé un mot à l'oreille pendant qu'elle répondait aux questions de la presse. Un murmure qui restera secret. "J'espère que ça va être le déclic pour elle pour faire une fin de saison tonitruante et enclencher sur une belle saison 2025". Après Marion Bunel et Eglantine Rayer, il n'y a plus qu'à finir en apothéose au Finestre, "pour fêter demain, un super beau Tour de l'Avenir".

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