Paul Seixas : « Je n'arrive pas à comprendre comment j'ai fait ça »

Crédit photo Patrick Pichon - FFC

Crédit photo Patrick Pichon - FFC

Paul Seixas était attendu sur ce Championnat du Monde, et il est assuré de repartir avec un maillot arc-en-ciel. Mais ce n'est pas sur la course en ligne où il fait figure de favori qu'il s'est imposé, mais bien sur un contre-la-montre tout plat où le principal intéressé ne s'attendait pas une seconde à réaliser un tel exploit (voir classement). Un cadeau d'anniversaire qu'il s'offre à lui même, la veille de ses 18 ans. Le coureur licencié à La Motte Servolex et membre de Decathlon AG2R La Mondiale a malgré tout toujours du mal à comprendre la performance qu'il vient de réaliser. Au micro de DirectVelo, il est revenu sur cette matinée la tête dans les étoiles, ou plutôt dans l'arc-en-ciel.

DirectVelo : Tu es Champion du Monde du contre-la-montre !
Paul Seixas : Je ne réalise pas, ça va mettre du temps à venir dans le cerveau. Pour le moment tout est emmêlé, je n'arrive pas à comprendre comment j'ai fait ça. C'est la meilleure performance de ma vie sur un chrono, j'ai suivi tous les conseils qu'on m'a donnés. On a fait des tests pour remonter les cockpits, je n'avais pas de visière mais des lunettes et je gagnais en aéro là-dessus. J'ai tout mis en place pour que ce soit le meilleur chrono de ma vie, et je ne pensais pas que ça finirait en étant Champion du Monde.

As-tu senti assez vite que tu faisais le chrono de ta vie ?
Oui, je l'ai senti. Par contre je n'ai pas senti que j'allais finir Champion du Monde. Je me disais que je faisais une super perf, mais il y a tellement de coureurs talentueux... Je suis grand mais j'ai un gabarit léger, donc je ne suis pas à mon avantage sur le plat. Tout le travail et la préparation ont payé. Je suis super content.

« ÇA N'A RIEN À VOIR AVEC LES AUTRES »

Avais-tu les informations sur les temps ?
J'ai eu le premier intermédiaire, je n'ai pas compris le deuxième. Quand je suis bien concentré dans mon effort, je n'arrive pas toujours à comprendre ce qu'on m'explique. J'ai cru comprendre que j'étais devant Albert (Philipsen) à un moment. Je me disais que je faisais un gros chrono mais qu'il avait peut-être géré et qu'il allait nous écraser sur le retour. Sur un parcours comme ça, en finissant fort, c'est fou. J'ai bien géré, mes données de puissance sont égales tout le long. J'ai réussi à en remettre un tout petit peu à la fin aussi. J'avais dit à Julien (Thollet) de crier au dernier kilomètre (rires), j'ai tout mis. Je n'arrive pas à croire que j'aie fini si fort, j'avais l'impression de m'être écrasé sur la fin.

Tu as eu une petite frayeur à la fin avec le Canadien qui s'est déporté...
Oui, il y a déjà la voiture qui ne m'avait pas vu. J'ai dû passer de l'autre côté des plots, il fallait être bien lucide. Le Canadien (Mikael Guilbault, NDLR) du côté droit, je l'observais, je savais qu'il pouvait faire une vague. Il en a justement fait une juste devant moi, j'ai eu peur. J'ai quand même pu doubler et ça m'a rassuré. 

Comment as-tu vécu cette Marseillaise ?
Celle-là est exceptionnelle, ça n'a rien à voir avec les autres (sourire). J'ai du mal, encore. Je ne suis pas sûr de comprendre tout ce qui m'arrive actuellement. Mais on va viser la route ensuite.

Dont tu es d'ailleurs le favori...
Ce sont deux efforts complètement différents. Je ne sais pas si je suis grand favori mais j'en fais sans doute partie. Il y a tellement de gars forts qui ont tout préparé. Je ne peux pas dire que je vais décrocher une médaille mais je vais tout faire pour. Avec ce titre au chrono, je suis déjà super content pour tous les gens qui m'entourent et qui m'ont aidé jusque là.

« J'AI FAILLI NE PAS Y ALLER »

Julien Thollet expliquait que tu souhaitais absolument faire ce chrono. On imagine que ce n'était pas pour une place d'honneur malgré tout...
Bien sûr, je me disais qu'on ne savait pas ce qui pouvait se passer. Je n'étais pas favori mais on ne sait jamais. J'avais tellement travaillé le chrono cette saison que ça pouvait être une erreur de ne pas faire le Mondial chrono. J'ai failli ne pas y aller pour la simple et bonne raison que j'ai failli ne pas être sélectionné (Julien Thollet, le sélectionneur national, comptait initialement aligner Louis Chaleil et Eliott Boulet, NDLR). Mais c'est aussi moi qui ai fait l'effort d'insister. Avec mon entraineur on a bien fait le forcing pour expliquer pourquoi je le faisais, et ça se concrétise maintenant. C'est une belle manière de montrer que j'avais ma place dans l'équipe. 

Tu réalises une énorme saison de J2, tu vas rejoindre le WorldTour dès l'an prochain, certains parlent de toi comme d'un potentiel futur vainqueur du Tour... Comment arrives-tu à gérer toute cette pression ?
Je laisse les gens parler. Je ne me laisse pas influencer. Je reste sur mes objectifs, les gens disent ce qu'ils veulent. Ça arrive que je lise, mais j'en ai des échos aussi. Je fais attention, je dois suivre ma propre progression. Je suis bien entouré donc je suis les conseils des gens autour de moi. Je progresse au rythme d'un Junior, pas d'un Espoir ou d'un Elite. Il y aura un gros cap à passer l'année prochaine, on va le faire tous ensemble avec l'équipe. Je vais continuer à mon rythme.

Et tu es le premier Junior français sacré en chrono !
C'est super mais je ne suis pas encore là pour faire des records. Je veux profiter du maillot et juste essayer de comprendre ce qui m'arrive. Mais je ne devrais pas le porter car je vais me faire opérer vendredi prochain pour mon poignet. J'ai eu une double fracture en début de saison, donc j'ai une plaque que je vais me faire enlever. On verra après ce qu'il se passe, mais je ne pense pas que je vais continuer.

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