Emilien Jeannière : « Une saison réussie de bout en bout »

Crédit photo Zoé Soullard / DirectVelo

Crédit photo Zoé Soullard / DirectVelo

Emilien Jeannière a mis un terme à sa saison de la plus belle des façons. L’athlète de 26 ans s’est imposé, au Japon, lors du Tour de Kyushu (2.1), avec à la clef deux victoires d’étapes en plus du général (voir classements). Le coureur du Team TotalEnergies est d’ailleurs passé tout près du carton plein mais a été battu d’un souffle le dernier jour. Lauréat à cinq reprises cette saison, en plus du classement général de la Coupe de Belgique, l’ancien lauréat du Challenge DirectVelo (2022) a clairement franchi un nouveau cap cette année. Et il compte bien en passer un autre en 2025, avec en ligne de mire une première participation au Tour de France, et le rêve de décrocher le maillot tricolore au Championnat de France. Entretien.

DirectVelo : Tu as fini la saison en boulet de canon au Japon !
Emilien Jeannière : L’équipe avait évoqué cette possibilité de finir la saison au Japon au milieu de l’été. C’était l’occasion d’essayer de scorer pour finir l’année en beauté tout en voyant du pays. C’était une superbe expérience. La course s’est super bien passée. Grâce à ces trois victoires, avec les deux étapes et le général, ça me fait une saison réussie de bout en bout. J’ai connu très peu de creux, c’est vraiment à noter.

« GAGNER CINQ FOIS, CE N’EST PAS RIEN »

Il t’a manqué un boyau le dernier jour pour faire carton plein…
Je ne suis vraiment pas passé loin. J’étais très déçu à l’arrivée. Pas tant pour moi que pour l’équipe, après tout le boulot qu’ils avaient accompli encore une fois. En plus, c’était la dernière de Julien (Simon) et il s’est mis à la planche pour moi. Ce jour-là, je suis sorti dans le final avec trois autres coureurs, dont Jordan (Jégat) et deux autres gars très bien placés au général. On a été repris à quatre bornes de l’arrivée et il a fallu vite se remobiliser pour le sprint. J’ai commis une petite erreur, je me suis fait mettre dans la boîte. Le temps de repasser, il m’en a manqué un tout petit peu mais deux mètres après la ligne, j’étais devant. On n’a pas pu cocher toutes les cases jusqu’au bout mais ça restera de superbes souvenirs. J’ai rarement vu une aussi belle organisation. Les Japonais ne font pas semblant. On aurait dit le Tour de France au niveau de l’organisation. Tout était carré, c’était impressionnant. J’ai vraiment beaucoup aimé. En plus, on a prolongé le plaisir en passant quelques jours supplémentaires au Japon avec Matteo (Vercher), Thomas (Bonnet) et Jordan (Jegat). On a loué un van et on a visité Osaka, Hiroshima… Avant quatre dernières journées à Tokyo.

Pour la petite anecdote, tu auras couru avec Francisco Mancebo lors de ce Tour de Kyushu, un coureur qui est passé pro en 1998, ton année de… naissance !
Je n’ai pas connu ses “grandes années” car je n’ai pas suivi les années Armstrong. J’ai commencé à suivre le vélo devant ma télé dans les années 2006-2010. C’était une drôle d’époque, je ne suis pas mécontent de ne pas avoir eu à courir avec lui à l’époque (sourire).

On imagine en revanche que tu aurais signé, l’hiver dernier, pour une saison à cinq victoires !
Bien sûr que j’aurais signé. Gagner cinq fois, ce n’est pas rien. Et puis, mine de rien, j’ai fait énormément de places aussi (douze podiums, 25 Top 5, 34 Top 10, NDLR). J’ai déjà eu un premier déclic l’an dernier, je me suis rendu compte que je pouvais vraiment jouer chez les pros. Ce qui m’avait manqué en 2023, c’était d’avoir une place de coureur protégé, de leader, pour être dans les meilleures conditions. J’ai réussi à obtenir cette confiance-là assez vite dans la saison, j’ai prouvé que j’avais ma place et l’équipe a fait de plus en plus souvent le boulot pour moi. Il fallait répondre présent, je l’ai fait. C’est rare de faire une saison pleine comme ça, je suis super content.

« ARTICULER MA SAISON AUTOUR DE PLUS GROS OBJECTIFS »

Tu vas forcément viser encore plus haut l’an prochain…
C’est sûr qu’il y a toujours mieux à faire. Il faut viser plus haut, même si j’ai déjà gagné au niveau ProSeries aux Boucles de la Mayenne. J’aimerais avoir encore un peu plus de victoires pour moins de places d’honneur.

En deux ans chez les pros, tu n’as pas encore disputé la moindre course par étapes du calendrier WorldTour. Pourquoi ? 
Ça va changer en 2025. Et puis, j'ai fait des courses d'un jour en WorldTour (La Panne, Gand-Wevelgem, A travers la Flandre et Paris-Roubaix, NDLR). Ce sera l’une des priorités : aller plus régulièrement sur des courses très prestigieuses face aux meilleurs coureurs mondiaux, même si je continuerai d’essayer de scorer en Classe 1 ou en ProSeries également. J’ai envie de découvrir de nouvelles courses et d’y performer. Mon objectif prioritaire sera de découvrir le Tour de France. Il n’y a pas de raison que ça ne le fasse pas si je continue sur cette lancée. J’ai également en tête depuis un moment le prochain Championnat de France. Ce sera à la maison, j’ai envie d’y faire un gros truc. L’idée va être d’articuler ma saison autour de plus gros objectifs. Il va falloir faire les bons calculs. Par exemple, sur la route d’une éventuelle participation au Tour de France, il est prévu que je découvre Paris-Nice. On m’a toujours dit que c’était un Tour de France en miniature. Ce sera un premier test grandeur nature. J’imagine aussi faire des stages plus spécifiques, en montagne. Il faut que je me mette dans les meilleures conditions possibles si je veux espérer bien passer les trois semaines du Tour.

N’aurais-tu pas pu prétendre à une participer au Tour de France dès l’été dernier ?
On m’en a parlé. Et quand la sélection de l’équipe TotalEnergies est sortie, j’ai vu sur les réseaux pas mal de gens citer mon nom en considérant que j’étais l’un des principaux absents de la liste. Sincèrement, sur le coup, je n’ai eu aucun regret, et je n’en ai toujours pas. Un Tour de France, ça se prépare convenablement. Or, je ne m’étais pas préparé pour le Tour. Si j’ai fait une grosse saison, avec beaucoup de résultats toute l’année, c’est aussi parce que je n’étais pas dans l’optique de préparer un Tour de France. L’an prochain, les choses vont changer. Si je fais, notamment, Paris-Nice et le Tour, il sera plus compliqué d’aller gagner. Mais je suis dans la force de l’âge et je dois en profiter. Je suis ambitieux mais je ne vais pas m’enflammer non plus. J’ai bien conscience qu’en WorldTour, c’est encore une autre histoire.    

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