Peter Sagan : « C'est vraiment étrange »
Peter Sagan se marre. "Tout le monde est content, hein ?" Et le double Champion du Monde adore jouer de son charme comme lorsqu'il s'adresse à la presse qui lui demande s'il a un message à adresser au monde, façon Richmond 2015. "Bonjour à ceux qui attendent un message", s'esclaffe-t-il.
Sur ce Championnat du Monde de Doha, Sagan n'a jamais été inquiété. Dans le désert, le Slovaque a encore montré la justesse de sa tactique, capable de se glisser dans la première bordure avec son coéquipier Michael Kolar avant de se laisser oublier en queue de groupe. "C'était la première victoire de la journée. Les Belges et les Italiens ont poussé fort pour sortir. Après, je n'avais qu'à m'arroser d'eau fraîche et puis je restais bien frais. Je ne devais pas travailler, donc dans les roues j'étais relax."
UNE JOURNEE A DORMIR
Dans l'approche du sprint encore, le champion (d'Europe et du Monde) a ajusté son tir parfaitement, ne se découvrant que dans les deux derniers hectomètres. "C'était une loterie", estime le coureur de Zilina, une petite bourgade au Nord de la Slovaquie, d'où une bande d'amis avait effectué le déplacement jusqu'au désert de Doha. "Ici, il y avait beaucoup de sprinters à tenir à l’œil : Cavendish, Kristoff, Matthews, Boonen, Nizzolo, moi,... Je ne savais pas quelle roue choisir", lâche-t-il en revoyant son effort sur un écran télévisé. "Je passe à droite, mais j'ai eu de la chance car j'aurais pu me retrouver enfermé ou chuter. C'est peut-être un coup du destin car ça n'arrivera pas chaque jour de gagner un sprint comme ça. Je ne peux pas croire que c'est moi. C'est vraiment étrange."
Au contraire de la majorité de ses adversaires, Sagan a opté pour une approche relax. Pas question d'arriver dix jours à l'avance ou de s'asséner des séances d'acclimatations en laboratoire : un sourire, une arrivée jeudi et puis basta. "Ma saison a déjà été longue. Alors j'ai choisi de rouler à la maison, à Monaco. Là aussi, il fait chaud. Si tu pars t'entraîner 5 ou 6 heures dans la chaleur, t'es cuit. Alors le premier jour, j'ai passé ma journée à dormir car j'avais atterri pendant la nuit. Le vendredi, j'ai fait trois heures et je trouvais que c'était déjà de trop. Puis hier, j'ai juste fait une heure car... voilà." Mimique, grimace, il laisse, comme à son habitude, planer une zone d'ombre.
PEDALER POUR AVANCER
Ce matin encore, au pied de l'Aspire Tower, la plus haute tour de Doha (300 mètres) implantée au sein d'un gigantesque complexe sportif qui accueillera plusieurs stades de la Coupe du Monde de football 2022, les Slovaques ont laissé retentir le rythme de Star Wars. Décontraction absolue. "J'adore cette musique là avant la course. Je n'ai pas mon téléphone, mais je pourrais la faire écouter", s'amuse-t-il avant d'entonner l'air légendaire au micro. "Pourquoi je devrais me mettre la pression ? J'ai déjà fait beaucoup cette année. Je peux seulement gagner ou perdre. J'avais juste besoin de me concentrer une journée, mais pas avant ! Et pour tout vous dire, je suis bien content que ce soit la fin de saison car c'était vraiment long. J'ai besoin de repos en vue de l'an prochain."
L'année prochaine, justement, Sagan se séparera de l'imprévisible Oleg Tinkov, qui a décidé d'interrompre son investissement dans le monde du cyclisme. Direction la formation allemande Hansgrohe-Bora, entouré de ses équipiers et de ses proches, mais tout de même avec une part d'inconnu. "Ce qui est sûr, c'est que l'arc-en-ciel sera encore là et que mon maillot restera blanc", charrie le puncheur de 26 ans. "Je pars au gala de l'UCI à Abou Dabi puis j'aurai ma première réunion avec l'équipe. Je pourrai apprendre à connaître mes coéquipiers, mais au fond, ça ne change pas beaucoup. Je reste dans la même discipline. Il faudra que je continue à pédaler pour faire avancer mon vélo !"