Lilian Calmejane : « Il fallait en mettre une seule, mais une belle »
Le Français Lilian Calmejane (Direct Energie) a remporté en solitaire, ce samedi, la Classic de l’Ardèche, courue sur 200,4 kilomètres autour de Guilherand-Granges (Ardèche). Il a devancé son compatriote Valentin Madouas (Groupama-FDJ) et le Norvégien Odd Christian Eiking (Wanty-Gobert, voir classement). Le Tarnais s’était déjà illustré l’an dernier, en terminant 3e de la Classic de l’Ardèche et et en remportant le lendemain la Drôme Classic. Quelques minutes après l'épreuve, il est revenu sur ce succès auprès de DirectVelo.
DirectVelo : A quel moment as-tu attaqué ?
Lilian Calmejane : J’ai attaqué dans le Val d’Enfer. Dans cette montée, il y a tout d’abord la bosse jusqu’au GPM qui fait 1,6 km à 10 % avec le premier kilomètre très dur. Ensuite il y a un petit replat et une deuxième rampe. Après on descend et il y a un tout petit « S » dans un hameau et ça remonte encore pendant 800m. Là, j’étais dans la position idéale. Pour faire un démarrage tranchant il fallait que les pentes soient plus faibles qu’auparavant. On était huit, il y avait juste Vuillermoz devant, mais je savais qu’il venait de jeter son venin. J’ai giclé de derrière, jusqu’en haut à bloc. Je me suis retourné et j’ai vu que j’avais fait un petit trou. J’ai fait un point en bas de la descente. Et ça l’a fait.
Tu as vraiment attaqué au bon moment, sans faire preuve d’impatience comme ça a pu être le cas par le passé…
Complètement. Ca m’arrive surtout en début de saison parce que j’ai de bonnes sensations. Je me laisse griser. Je suis souvent le premier à mettre le feu au poudre, à mettre la cacahuète qui fait mal mais qui ne fait pas forcément la différence. Je commence aussi à bien connaître les moments clef de cette course. La montée du coteau de Cornas s’est faite à une allure très lente. Ca fait prétentieux de dire ça mais c’est vrai : on n’est pas monté vite. Je me suis dit que tout allait se jouer dans le Val d’Enfer. Là, on était devant entre costauds. Il fallait en mettre une seule, mais une belle, sachant qu’il resterait toujours le sprint au pire des cas. Je suis assez fier car j’ai gagné en sérénité les derniers week-end. Le Haut-Var m’a mis en confiance, même si je n’ai pas au le résultat escompté car je suis tombé le premier jour.
« LES VINS DE CETTE REGION ME RESSEMBLENT : ILS N'Y VONT PAS PAR QUATRE CHEMINS »
Ce week-end en Drôme-Ardèche te réussit particulièrement bien !
Oui, j’aime beaucoup ces deux courses. Même si je n’y ai aucune famille ni aucun lien, j’aime beaucoup cette région, sa terre, surtout en tant qu’amateur de vin. Et je crois que ce sont des vins qui me ressemblent, parce qu’ils n’y vont pas par quatre chemins, ils sont puissants et directs. Et ils se bonifient aussi en vieillissant alors j’espère que ce sera aussi le cas pour moi ! Quant aux courses, elles ont des parcours qui permettent aux costauds de s’exprimer. Il n’y a pas de longs cols donc les difficultés sont vraiment taillées pour mes caractéristiques. Maintenant, j’ai gagné les deux. Ce sera dur dans les prochaines années de vendre ces courses à mes directeurs sportifs, ils me diront : « Mais tu les as déjà gagnées toutes les deux, va faire autre chose, va au Het Volk par exemple ». D’ailleurs, je vais m’essayer aux Classiques en fin de mois.
Ce dimanche, tu auras forcément la pancarte. Vas-tu aborder la Drôme Classic avec ambition, ou tu vas profiter ce soir car le job est fait ?
(Sourires). Je vais l’aborder avec ambition. Quant à profiter… quand tu dors à l’hôtel et qu’on te sert le menu sportif à table, je ne sais pas si tu profites. Si j’avais vraiment envie de profiter, j’ouvrirais une bonne bouteille de vin avec les copains. D’ailleurs, c’est peut-être ce que je vais faire puisque j’en ai gagné, et du bon ! Pour revenir sur la course, en tant que vainqueur sortant et vainqueur aujourd’hui, je ferai partie des favoris. Mais dans la Drôme, ce n’est pas tout à fait le même scénario qu’en Ardèche : les bosses sont plus courtes, c’est quand même compliqué de mettre une attaque tranchante. La bosse du Haut-Livron, qui est le juge de paix de l’épreuve, c’est un effort 50 secondes. Ce n’est quand même pas la course qui me sied le plus sur le papier. L’année dernière, avec le froid, ça avait été une course de guerriers, et j’étais tombé avec deux Quick Step qui n’avaient pas trop calculé avec moi. Je pense avoir eu de la réussite. Demain, je vois quand même plus un groupe de vingt, vingt-cinq coureurs se départager dans le Haut-Livron. Et à ce jeu-là, chez Direct Energie, on a Jonathan Hivert comme très bonne carte… (sourire) Je ne dis pas cela pour lui mettre la pression ! Juste pour dire que si on gagne demain avec lui, je serai très heureux d’avoir contribué à ce doublé.
« SUR PARIS-NICE, JE VAIS FAIRE CE QUE JE FAIS LE MIEUX : LE SNIPER »
La course à la sélection au Tour, tu y penses ?
Je n’y pense pas trop. Personnellement, ce serait un crève coeur de ne pas faire le Tour de France. Même si j’ai aussi gagné une étape sur la Vuelta, c’est le Tour qui m’a révélé, qui fait qu’aujourd’hui je suis un peu plus reconnu. Tout le monde me parle de ça : les crampes, la station des Rousses... Il n’y a aucune course qui égale le Tour de France. Faire l’impasse dessus pour non sélection est impensable. Donc oui, c’est bien de montrer à ASO que Direct Energie est là et que ses leaders sont en forme c’est sûr.
Tu vas faire Paris-Nice. Qu’en attends-tu ?
Je ne fais pas partie des favoris. Je vais faire ce que je sais si bien faire : me focaliser sur un ou deux rendez-vous et faire le sniper. Avoir une étape ou deux dans le viseur et ne pas me louper. En général, c’est là que je suis le plus redoutable. Je ne dis pas que je vais gagner une étape, mais je vais tout faire pour. Le général, je n’y pense pas. Il peut y avoir des bordures, cette année le chrono ne me convient pas. Je risque de prendre un bon deux minutes dans les carreaux. Le général se jouera aussi dans le col de Turini, mais c’est une montée longue, j’ai déjà montré mes limites sur ce genre d’ascension.