Audrey Cordon-Ragot : « L’étape la plus dure de ma vie »

Crédit photo A.S.O / Thomas Maheux

Crédit photo A.S.O / Thomas Maheux

Les derniers moments de grande souffrance, pour la dernière sur le Tour. Ce dimanche, Audrey Cordon-Ragot a dû se faire violence pour boucler son ultime Tour de France, elle qui mettra un terme à sa carrière à la fin de la saison. Après l’arrivée finale au sommet du mythique Alpe d'Huez, la Bretonne de la formation Human Powered Health a laissé couler beaucoup de larmes sur ses joues, entre la pression qui retombait et l’émotion de refermer un chapitre important, bien que sa carrière ne soit pas tout à fait terminée. DirectVelo était présent dans la zone d'arrivée avec cette grande figure du cyclisme féminin français pour tirer le bilan de son Tour de France. Entretien.

DirectVelo : Il y a beaucoup d’émotions !
Audrey Cordon-Ragot : Beaucoup d’émotions, beaucoup de fatigue… Tout mélangé ça fait des larmes. Les gens vont encore dire que je pleure tout le temps mais ce n’est pas grave, j’assume. J’ai la satisfaction d’avoir été au bout de ce Tour. Aujourd’hui, c’était l’étape la plus dure de ma vie, je pense. J’ai rarement vécu ça. Je n’étais pas bien du tout. Ça fait quelques jours que ça dure et j’avais donc peur de ne pas pouvoir le faire aujourd’hui. Je suis heureuse de l’avoir fait.

« JE N’AI PLUS ENVIE DE SOUFFRIR »

As-tu savouré cette montée de l’Alpe d’Huez malgré la souffrance ?
Honnêtement, oui j’ai savouré car beaucoup de gens m’ont poussée et aidée à passer kilomètre après kilomètre. Mais d’un autre côté, c’était un tel calvaire que je n’ai vraiment savouré qu’après avoir passé la ligne. Je pense à tout ce que j’ai fait, le fait aussi que ce soit la dernière fois que je passe la ligne d’arrivée d’une étape du Tour de France… Mais je pense aussi à tout ce qu’il me reste à faire car la saison n’est pas finie.

Un gros chapitre de ta vie s’apprête à se tourner très prochainement : quelle est ta plus grosse fierté ?
D’être restée moi. Je n’ai jamais joué, j’ai toujours assumé celle que j’étais, j’ai toujours dit ce que je pensais, que ça plaise ou non. Dans ce milieu, il y a beaucoup de fausseté, de gens qui profitent des autres. Moi, je ne suis pas comme ça et j’espère que je n’aurai jamais à l’être dans le futur, mais que je pourrai juste rester moi-même.

Ce Tour, où il est difficile d’exister, te confortes aussi dans l’idée qu’il est temps de passer à autre chose ?
Oh oui ! Le vélo, c’est tellement dur… Je n’ai plus envie de souffrir. Une personne qui n’est jamais montée sur un vélo ne peut pas comprendre ce que c’est. J’ai eu ma dose. J’ai réussi à faire une journée à l’avant et j’en suis fière mais ce jour-là, c’était à l’expérience et pas avec les jambes car je n’en étais pas capable. La préparation n’était pas idéale, je le savais car je n’avais pas bossé en altitude, en stage, j’avais plutôt préparé le chrono des JO. 

« IL Y A ENCORE DE BELLES CHOSES À FAIRE »

Avec ton expérience, comment imagines-tu évoluer ce Tour de France ?
Ça roule de plus en plus vite, ça va encore s’améliorer. Il y aura encore plus de monde à l’avenir. Je suis sûre qu’on finira par avoir un Tour de France féminin qui sera l’égal du Tour de France masculin.

Es-tu déjà nostalgique, en quelque sorte ? 
C’est dur de ne pas être dans la nostalgie quand il y a autant de monde autour de toi, que tu es sur le Tour de France…  Aujourd’hui, on m’a dit plein de fois « c’est la der’, c’est la der’ ». Il y a encore de belles choses à faire et je le dois à l’équipe de France. Je veux aller chercher le maillot de Championne du Monde avec l’équipe de France sur le relais mixte, on en est capables.

Certaines athlètes t’ont-elles dit un mot aujourd’hui, au départ ou en début de course ?
Beaucoup de filles m’ont dit que j’allais manquer au peloton. J’ai toujours été une fille qui faisait des blagues dans le peloton mais j’ai aussi souvent imposé une certaine rigueur quand il le fallait. À chaque fois qu’une ancienne part, c’est une partie du peloton qui part. Beaucoup de filles m’ont dit : « Merci pour tout ce que t’as fait » et je suis contente qu’on me le dise.  

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