Livre sur le Giro : « D’abord une tragédie, ensuite une farce ! »
Enfin un livre qui retrace l’histoire récente ou ancienne du Tour d’Italie : c’est le premier jamais écrit en français sur une épreuve qui passionne de plus en plus de monde (pour le commander). Pierre Carrey, fondateur de DirectVelo et ancien président de l’association DirectVelo, raconte les coulisses de cet ouvrage de référence, écrit avec la participation de Dominique Turgis, autre pilier de « DV », de Luca Endrizzi et… de Thibaut Pinot, qui signe la postface.
DirectVelo : Est-ce que les chapitres de Giro donnent des clés pour « lire » l'édition 2019, qui se déroule actuellement ?
Pierre Carrey : Oui ! « L'histoire se répète toujours, d’abord comme une tragédie, ensuite comme une farce ». Ce Giro 2019 commence avec des noms d'oiseaux : Yates provoque ses adversaires, Nibali l'appelle au calme, Landa le traite de « débile mental »... Là, on repense aux duels Saronni-Moser, ou Cunego-Simoni, les duels sans doute les plus corrosifs du Giro (Bartali-Coppi, c'est très noble, très pur, très romantique par comparaison). Primoz Roglic, apparemment intouchable mais qui explose en vol à cause d'une chute, d'une contre-performance et d'une erreur de son directeur sportif, qui s'arrête pisser au mauvais moment : l'histoire rappelle non seulement les plantages des cadors (Louison Bobet, Greg LeMond n'ont jamais gagné en Italie) mais aussi les bourdes des directeurs sportifs. Par exemple les flottements de Giancarlo Ferretti, qui passe pour un grand tacticien mais qui fait systématiquement perdre la Bianchi au début des années 80.
Et Nans Peters qui gagne en solitaire ?
Encore un clin d'oeil ! Comme lui, de nombreux coureurs de l’ombre ont trouvé leur jour de gloire et le Giro leur accorde une importance symbolique plus forte que le Tour. On s’attache beaucoup à ces personnages secondaires qui finissent par devenir principaux. Quant à l'annulation du Gavia pour cause de neige, c'est un grand classique, qui donne des anecdotes assez drôles retracées dans le livre. Autre lien entre le passé et le présent : le complotisme qui revient autour du vélo à moteur qu'aurait pu utiliser Roglic. Le Giro a toujours baigné dans ces soupçons, avérés ou erronés, par exemple du temps de Coppi qui était tellement persuadé que Bartali allait tricher... qu’il a commencé à lui jouer de vilains tours (en 1947, Bartali est la cible d’une tentative de corruption visant à le déstabiliser et d’un espionnage à son hôtel pour savoir s'il était malade pendant la nuit!).
Est-ce à dire que le Giro est « mieux » que le Tour ?
Là, c'est une question de goût...
À qui s'adresse ton livre ?
À tout le monde. Il y a des niveaux de lecture différents pour que chacun y trouve son compte : le « grand public » qui aime le sport sans être expert, les passionnés pointus qui vont découvrir une foule de détails. Même ceux qui n'ont pas un « amour infini » pour le Giro (c'est le slogan de la course!) peuvent se laisser entraîner par le récit : les chapitres racontent beaucoup les lieux, l'histoire du pays, très peu connue en France. Il y a ainsi un grand développement sur la Première guerre mondiale et les batailles à plus de 3000 mètres d'altitude... dans le territoire des cols mythiques, comme le Stelvio. L'objectif est d'apprendre tout en prenant du plaisir. Ce n'est surtout pas une chronologie toute plate : on a ajouté des bosses et des surprises tout au long du parcours...
Quelle est la « révélation » contenue dans ces pages ?
Que le Giro a été détenu (indirectement) par la mafia italienne à la fin des années 70. Je crois que l'information n'avait jamais été écrite nulle part avant et c'est un peu par hasard, disons par recoupement, que je suis tombé sur cette drôle d'affaire. Mais il y a une multitude de détails inédits, y compris sur Coppi et Bartali que l'on croit bien connaître. Grâce à des découvertes récentes, ces deux monstres sacrés apparaissent sous un jour encore plus complexe. On ne casse pas la légende, on l'enrichit !
Giro, de Pierre Carrey, éditions Hugo Sport. 334 pages et un cahier photos. 19,95 €
Pour le commander, rendez-vous dans la boutique DirectVelo !