Quentin Thollet : « Maintenant, la victoire est envisageable »
Quentin Thollet prévient : “je n’ai aucun complexe”. Après une première année Juniors faite de découvertes et de prises de marques, le solide gaillard - étudiant en Terminale Physique-Chimie SVT et qui s’imagine en STAPS ou en école de journalisme à la rentrée prochaine - est en train de s’habituer à jouer les premiers rôles sur quelques-unes des plus belles courses du calendrier hexagonal. Ces deux derniers week-ends, il est plusieurs fois passé tout près de la victoire sur les routes de la Flèche Ardéchoise puis à l’occasion de la Côte d’Or Classic (voir sa fiche DirectVelo). Rencontre avec le sociétaire de l’EC Saint-Étienne Loire, qui n’est autre que le fils de Julien Thollet, le sélectionneur de l’équipe de France… Juniors.
DirectVelo : Avec six Top 10 en deux week-ends, tu sembles être en train de passer un cap important !
Quentin Thollet : C’est sûr, ça fait plaisir, le travail que j’ai fait tout l’hiver paie, notamment grâce au Pôle de Saint-Étienne. J’avais envie de bien faire, d’être devant et d’être régulier dans les classements. Il reste la déception de ne pas avoir encore gagné. Je suis toujours placé sans être encore décisif. Mais je sens que je m’en rapproche. Je m’étais mis un peu de pression pour ce début de saison mais depuis un mois, je cours plus libéré.
« JE NE ME BATS PLUS SIMPLEMENT POUR SUIVRE MAIS POUR ÊTRE ACTEUR »
Sur les routes ardéchoises, tu as été repris à quelques dizaines de mètres de la ligne lors du Prix du conseil départemental…
J’ai tenté le coup du kilomètre. Je ne l’avais pas anticipé, ça s’est fait spontanément. Achille Davoine était le sprinteur désigné de l’équipe. Je lui ai demandé s’il voulait que je le lance mais il m’a dit qu’il n’était pas forcément super bien. De mon côté, je me suis retrouvé bien placé et j’ai senti qu’il y a eu un petit moment de temporisation, où ça roulait à moitié… Alors j’y suis allé ! La dernière relance était un peu trop dure pour tenir. Je me suis fait croquer à cent mètres de la ligne. Sur le coup, c’était frustrant…
Puis tu as encore été devant, le week-end dernier, sur une autre Fédérale, lors de chacune des deux étapes de la Côte d’Or Classic !
Le premier jour, j’ai anticipé en sortant assez vite dans un groupe de dix. Puis cinq autres coureurs sont rentrés. Et le deuxième jour, ça n’a fait qu’attaquer. Il fallait avoir les jambes pour suivre ! J’ai bien encaissé les efforts de la veille pour être encore là. Ce sont des expériences intéressantes. Je sens que ce sont toujours les favoris qui sont devant, à chaque fois. En passant plusieurs journées à l’avant, j’ai repris confiance en moi. Je me sentais à ma place dans ces groupes de tête, même s’il y avait certains des meilleurs Juniors du pays. Je n’avais pas l’impression de dénoter. C’est le genre de confrontation directe qui fait du bien et qui rassure. Tout ça m’a permis de me rendre compte que maintenant, la victoire est envisageable tous les week-ends. Je ne me bats plus simplement pour suivre mais pour être acteur des courses. J’ai passé un cap. En étant J2, c’est normal. Je l’attendais.
Quelles sont tes principales qualités sur le vélo à l’instant-T ?
Honnêtement, je mentirais si je disais que je suis un coureur complet. Il me manque un petit peu de punch. Sur les efforts assez longs et très usants, je suis bien, ça me convient. J’aime aussi les efforts au lactique, avec de la force pure : les sprints assez longs ou les petits taquets. Par contre, il me manque peut-être une petite pointe de vitesse. Mais j’arrive à bien passer les bosses. J’aime bien les chronos, aussi. Dans les ascensions, ce n’est pas toujours facile car je suis assez lourd, j’ai un bon gabarit (il mesure 1m90, NDLR).
« L’ÉQUIPE DE FRANCE, JE LA TOUCHE DÉJÀ SANS LA TOUCHER »
On imagine que tu aurais eu la curiosité et l'envie de te tester sur des épreuves flandriennes en ce printemps ?
Je regrette de ne pas avoir pu disputer Paris-Roubaix. Je misais sur La Pévèle mais je l’ai courue à l’envers. C’est dommage car ça m'avait plu l’an passé. Je me suis peut-être mis un peu trop de pression. Pourtant, sur la reconnaissance, je me sentais super bien. Mais je n’étais pas bien en début de course, j’ai trop forcé et j’ai fini par le payer, puis je suis tombé… Il faudra attendre pour se tester véritablement sur les pavés.
Quels seront tes principaux objectifs dans les semaines et les mois à venir ?
Je pense notamment au Tour de Gironde, mi-mai. Pourquoi pas viser la Classique des Alpes également. Non pas avec des ambitions personnelles mais pour aider d’autres coureurs comme Léo Bisiaux. Il y aura aussi des rendez-vous sur piste. J’envisage de refaire les Championnats de France, après avoir découvert cette discipline l’an passé. Je m’y suis mis par curiosité et j’ai vite progressé sur les épreuves de poursuite.
Comme avec tous les Juniors qui performent, se pose la question d’une future sélection en équipe de France. L’histoire serait alors bien plus particulière pour toi que pour n’importe quel autre Junior puisque tu es le fils du sélectionneur national, Julien Thollet !
L’équipe de France, je la touche déjà sans la toucher, du simple fait que mon père en soit le sélectionneur. J’ai parfaitement conscience que pour intégrer la sélection nationale, il faudra que je travaille encore deux fois plus qu’un autre. Si je suis sélectionné un jour, ça va forcément parler. On dira que je suis le fils de… Il ne doit donc pas y avoir de discussion possible. Cette sélection, je vais essayer d’aller la chercher en cumulant les bons résultats. Et en gagnant des courses ! De toute façon, je ne compte pas me prendre la tête avec ça. Je sais que mon père est très réglo sur ce sujet. Si je suis pris un jour, c’est parce que je l’aurai vraiment mérité sportivement. Je vais me concentrer sur mes performances, comme tous les Juniors, et ce sera à lui de gérer les sélections.
« LE LIEN EST ENCORE PLUS FORT »
Il s’agirait, en tout cas, d’un moment spécial, pour ne pas dire magique, pour vous deux !
Bien sûr, j’en ai envie ! En Cadets, il m’est déjà arrivé une fois d’être accompagné par mon père au sein du comité régional et j’avais adoré. Ce serait génial mais c’est à moi de prouver que j’ai ma place.
En quelque sorte, tu bénéficies déjà des conseils du sélectionneur national tout au long de la saison…
On parle énormément de vélo à la maison, bien sûr. Encore plus maintenant que je suis Junior. Lorsqu’il vient me voir sur les courses, c’est à la fois en tant que papa et en tant que sélectionneur national. C’est tout bénéf’ pour moi comme pour lui. Et puis, humainement, c’est super. Le lien est encore plus fort avec le partage de cette même passion.
Était-il évident pour toi de faire du cyclisme, dans ces conditions ?
Mon père m’a toujours protégé, il m’a longtemps freiné. Avant le vélo, j’ai découvert plein d’autres sports collectifs comme le handball. Ça m’a appris plein d’autres choses. Il me disait que le cyclisme est un sport très dur et que j’avais le temps de le découvrir. Je ne m’y suis mis qu’en Minimes 2. Pour l’anecdote, j’ai accompagné plusieurs fois mon père quand il emmenait l’équipe de France sur des courses, notamment une fois sur le Tour du Pays de Vaud. Tous les ans, pendant des années, j’allais au Championnat de France de l’Avenir avec lui. Et puis, il y a trois ans, il m’a dit qu’il n’allait plus m’emmener et que la prochaine fois que je me rendrais sur un Championnat de France ou sur une course internationale, ce serait en tant que coureur, avec mon comité, ou en sélection. Je sais maintenant ce qu’il me reste à faire.