Léo Bisiaux : « J’ai progressé partout »
Lunigiana puis Rüebliland, Léo Bisiaux fait une razzia sur les courses par étapes, lui qui a déjà remporté les Trois Jours d’Axel plus tôt dans l’année. Après un été sans Valromey ni Championnat du Monde, la faute à une fracture de la clavicule lors de la Classique des Alpes, le sociétaire du VC Riomois, et coureur d’AG2R Citroën U19 n’a pas subi de coup d’arrêt, et au contraire. Lui même le pense, cette blessure était peut-être un mal pour un bien, car celui qui portera le maillot bleu au prochain Championnat d’Europe finit sa saison route, et son cursus Junior, en pleine bourre. Léo Bisiaux est revenu avec DirectVelo sur ces derniers quinze jours où il a pu faire le plein de confiance, avant de penser à ses derniers coups de pédale dans la catégorie d’âge.
DirectVelo : Tu cumules les victoires sur les courses par étapes !
Léo Bisiaux : C'est vrai que ça fait plaisir de retrouver mon niveau, voire même encore supérieur à avant de me faire la clavicule. Ça montre que le travail du début de saison, avec le kiné et mon entraineur, paie. Je suis content de montrer que je suis là pour les classements généraux et que je suis présent quand c'est dur, avec les costauds.
Au Rüebliland, tu as attendu la dernière journée, qui était la seule vraiment difficile…
C’était particulier, la première on savait que ça n’allait pas être très dur, avec un sprint. Il ne fallait pas être piégé avec un groupe qui part. Mais personne ne voulait laisser partir, les routes en Suisse vont vite, c’est dur pour les échappées. Il y a eu les deux demi-étapes un peu plus dures, mais c'était assez court donc on n’a pas fait grand chose, si ce n’est un peu sur l'après-midi, mais on n'a pas eu de réussite. Avec trois étapes au sprint, ça m'a permis de rester tranquille. On avait Marius (Innhaug Dahl) qui essayait de se débrouiller un peu avec Aubin (Sparfel) et Baptiste (Grégoire), et moi je n'avais pas forcément de consignes, je me préservais au max.
« FINALEMENT, MA FRACTURE M’A PEUT-ÊTRE FAIT DU BIEN »
Puis il y a eu ce numéro !
Le dimanche, je l'avais coché. On savait que tout allait se jouer sur cette étape, vu comme c'était dur on pouvait faire des gros écarts. Dès le départ ça ne voulait pas trop rouler, tout le monde avait peur de l'étape. Je me suis dit dès le deuxième tour que j'allais y aller, et j'y suis allé dans la première bosse. Je suis sorti seul, le peloton est revenu sur moi une première fois au bas de la deuxième bosse, et j'ai réattaqué pour sortir seul, avant de rattraper l'échappée. On a fait 10-15 kilomètres, ça ne collaborait pas bien donc je suis parti seul. J'ai fait 45 kilomètres seul, j'ai résisté aux contres et au peloton. Je ne savais pas trop qui sortait ou pas, mais j'ai bien géré. Je gagne en solitaire et le général, l’objectif est atteint.
Tu n’as jamais douté de pouvoir aller au bout ?
45 kilomètres, c'est tôt. Mais on avait quand même une petite avance d'une minute avec l'échappée. Comme ça ne collaborait pas bien, je me disais qu’il était aussi bien d’y aller seul, je n'irais pas plus lentement. J'ai géré comme je voulais, par rapport aux groupes de derrière. Ça faisait une bonne heure seul, mais ça va, j'ai géré. Il y avait pas mal de montées donc j'enchainais bien, ce n’est pas trop monotone.
Tu réalises de plus en plus souvent des grandes épopées solitaires. As-tu l’impression d’avoir franchi un nouveau cap ?
J'ai pu faire des progrès cette année, notamment sur le plat où je suis plus constant, je pousse plus fort. J'étais un peu trop léger l'année dernière et là ça va mieux. Notamment avec le travail en chrono, ça m'a fait passer un cap sur le plat. C’est aussi ma deuxième année Junior donc je suis meilleur sur les fins de course, sur les ascensions… J'ai progressé partout. Finalement ma fracture m'a peut-être fait du bien, car après le cross je n'ai pas bien géré la coupure. J'ai repris vite au stage en Espagne, je n'étais pas bien dedans. Au démarrage ce n'était pas trop ça. Ça s'est vu sur les résultats, je n'étais pas saignant. Ça a commencé à revenir puis il y a eu la clavicule, et ça m'a fait du bien de couper dix jours. Je reviens bien en forme sur la fin, j’ai bien joué les généraux, c'est ce qui m'intéresse.
« C’EST SIMPLEMENT LE TYPE DE COURSE QUI JOUE »
As-tu ressassé cette blessure, qui t’a privé de gros objectifs…
On ne pourra jamais savoir ce qu’il se serait passé, mais on va dire que je n'y ai pas trop pensé. Quand j'ai eu la fracture, je savais que c’était mort pour le Valromey, alors que c'était LE gros objectif. J'ai tout de suite su que ce n'était pas possible d'y être à 100%. Quant au Mondial, c’était compliqué au vu du parcours, même si j'aurais pu y être puisque j’ai fait le France (sourire). Mais au final ça fait une fin de saison vraiment bonne et je suis bien préparé.
Tu as l’impression d’avoir un avantage physique sur tes principaux adversaires ?
Je ne pense pas que les autres soient plus cramés ou pas, ce sont juste des courses à étapes où c'est vraiment dur, comme la Lunigiana, où ça me correspond avec des enchainements de cols, ce n’est pas juste une montée sèche. Plus ça avance dans la course, mieux je suis. Je pense que c'est simplement le type de course qui joue, tout le monde maintenant gère bien ses saisons. Et même quand on attaque l’année tôt on a des moments de récupération et d’autres avec des objectifs.
Il y a un point que tu as peu évoqué, mais on remarque cette année qu’outre ta victoire d’étape aux Trois Jours d’Axel, tu es souvent dans les dernières positions des groupes dans lesquels tu termines. As-tu une réticence envers le sprint ou est-ce un hasard ?
Ce n'est pas un hasard (sourire). C'est juste que je ne fais jamais les sprints ou très rarement. C'était souvent fait exprès. Au Rüebliland en tout cas c'était voulu. Je ne m’en mêle pas et je finis en roue libre. Dès que les 3 kilomètres sont passés je me mets derrière pour éviter les chutes ou esquiver. Mais je n'ai pas d'intérêt à me mêler pour prendre une chute. Si c’est pour faire un Top 15 ça ne m'intéresse pas, je préfère ne pas prendre de risques, et me concentrer. Il n’y a pas forcément un blocage, mais je n’y trouve pas forcément d'intérêts, simplement.
« ON VA TENTER DE CRÉER DES MOUVEMENTS »
Cap maintenant sur le Championnat d’Europe…
Après l'Europe je vais basculer au cross, ce sera ma dernière course sur route, et chez les Juniors. On a envie de terminer sur une bonne note. On a réussi à mettre un bon groupe en place, notamment au Lunigiana où on a fait une super course. On a défendu le maillot à la perfection. Tous les jours les gars étaient autour de moi pour gagner le classement général. On a construit un vrai groupe, et ce sera la même sélection à part Noé (Melot) remplacé par Eliott (Boulet). Ça ne va pas changer nos automatismes et on va pouvoir se régler ce week-end au Keizer. Sur les Europe on a une grosse carte à jouer avec Matys (Grisel) si ça sprinte, ça va être très dur avec les deux montées. Mais ça va lui correspondre. On va tenter de notre côté de créer des mouvements, notamment avec moi, car c'est sûr que je ne gagnerai pas le sprint (sourire).
Tu n’étais pas au Championnat d’Europe de cyclo-cross sur ce site, mais que t’inspire ce parcours ?
Je sais que juste c'était une déchetterie (rires). Chaque parcours est différent mais ce sont les coureurs qui feront la course. À nous de construire quelque chose autour de ça. À nous de trouver les atouts à jouer. On va enchainer le Keizer et les Europe, Julien (Thollet, sélectionneur, NDLR) nous fait faire le Keizer pour finir de mettre les automatismes en place, et comme ce n’est pas loin, on ne rentre pas et on va rester dans le coin.