Yannick Pouey : « Loudéac est un outil test »

Crédit photo DirectVelo

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Yannick Pouey était présent le week-end dernier au vélodrome couvert de Loudéac pour porter sur les fonds baptismaux la Coupe de France piste de l'Avenir qu'il a souhaité créer avec la commission piste qu'il préside (lire ici). DirectVelo a fait le point sur la situation de la piste en France avec celui qui est aussi secrétaire général de la FFC.

DirectVelo : Es-tu satisfait de la participation pour cette première ?
Yannick Pouey : Oui, on est arrivé tard dans le calendrier, c'est la première fois qu'on organise une Coupe de France réservée aux jeunes. Le projet a mis longtemps à accoucher. C'est une participation satisfaisante pour une première et je n'ai aucun doute qu'à l'avenir on aura beaucoup beaucoup plus de monde et qu'on devra prendre des décisions pour les qualification des épreuves d'endurance mais ça sera un bon problème, un problème de riche.

« UNE RÉSISTANCE À LA PRATIQUE DE L'AMÉRICAINE »

Pourtant, des Teams piste formation étaient absents...
C'est en lien avec ce que je viens de dire. Ils avaient leur programme déjà planifié avec des épreuves de routes (la Coupe de France Cadets de la zone nord par exemple, NDLR) et on n'a pas dit qu'ils devaient participer à tout. L'idée ce n'est pas qu'ils traversent la France tous les week-ends car ça a des effets sur la formation qu'on a du mal à maîtriser et je ne parle pas des coûts. L'idée c'est que l'organisateur s'y retrouve et nous, en terme de détection et de formation. On va voir comment ça bouge la formation des jeunes pistards.

L'Américaine freine certains...
J'ai discuté avec une jeune fille qui avait un peu peur de faire l'Américaine et ses coachs n'étaient pas rassurés non plus. Quand on a été coureur, on sait que pour les deux-trois premières américaines, on n'est pas sûr de soi. On est parti de trois constats majeurs pour créer cette Coupe de France. Il n'y avait pas de fil rouge de la pratique piste chez les jeunes tout au long de la saison et il fallait le créer. Il y a une résistance à la pratique de l'Américaine, donc les jeunes n'en font pas et quand ils n'en font pas assez, il n'y en a pas d'organisées en région et notre système ne s'enrichit pas. Il manque aussi de tournois de vitesse, il y en a de moins en moins. Après de très longs débats en commission nationale, on a décidé que pour participer à une manche, tout était obligatoire.
Je fais le pari que ce qui est un souci aujourd'hui ne le sera plus d'ici deux ou trois ans. Les jeunes sauront qu'ils ont de l'Américaine et ils pratiqueront un peu et en région, on remettra de l'Américaine si on veut que ces jeunes soient brillants en Coupe de France ou au Championnat de France.Et si ça ne marche vraiment pas, on en tirera les conséquences.

LE CLASSEMENT FFC TOUJOURS BLOQUÉ

Au niveau régional, entre la Coupe de France et les Championnats régionaux, il y a un manque de réunions. Comment y remédier ?
C'est notre problème récurrent. C'est le paradoxe de la piste. La voie publique est de plus en plus dangereuse, la piste est dans un stade fermé et c'est moins dangereux de chuter sur la piste que sur la route et pourtant on a du mal à recruter. C'est dû aussi à notre calendrier fédéral. Il n'y avait pas d'objectif en dehors des 3-4 meilleurs de chaque comité. Si on crée cette Coupe de France c'est aussi pour ça. Si les organisateurs ont du monde au départ, ils ne vont pas hésiter à organiser. On essaie de relancer par ce biais.

Où en est le classement piste FFC ?
Ce qui bloque ce sont deux choses. Au niveau régional, il n'y a pas de format d'épreuve, de collecte de résultat, chacun fait comme il peut et comme il veut. Si on fait ce classement, il faut que ce soit standardisé. Il faut aussi créer des outils, compréhensibles, qu'on fasse la formation pour les utiliser et applicables partout. Le classement serait aussi une façon d'inciter les jeunes à pratiquer la piste.

Quel est le coût d'une organisation sur un vélodrome plein air ?
Ça dépend des vélodromes, des conventions. Avec 1500 euros, et peut-être un peu moins, on peut monter une réunion régionale. Mais il faut déjà les trouver pour l'organisateur ce qui n'est pas si évident.

« SE SOUVENIR DE CEUX QUI NOUS ONT NOURRIS »

Qu'est-ce qui se passe quand il pleut ?
Tout le monde pleure, prend sa voiture, range les vélos et rentre chez lui. Mais notre volonté n'est pas de nous servir que des vélodromes couverts. Quand la pite française était la plus forte au monde, on n'avait quasiment que des vélodromes plein air. Il faut se souvenir de ceux qui nous ont nourris. Notre volonté n'est pas de les écarter des schémas. On peut y faire plein de choses dans les vélodromes de plein air. Quand on organise en plein air, comme la Coupe de France Juniors à Poitiers les 18 et 19 mai, les gens le savent, ils ont une culture cycliste et ils acceptent le risque.

Est-ce que la piste est un sport populaire ou un sport d'élite au sein de la FFC ?
La piste a été un sport populaire mais aujourd'hui elle est vue comme un sport d'élite. Si on compare avec d'autres disciplines, instinctivement les gens voient la piste comme un sport d'élite. Autrefois, on disait que c'était les aristocrates du vélo

À l'époque les aristocrates attiraient du monde...
Ce qui va jouer pour nous, c'est l'émergence de vélodromes. Je rappelle que pendant 25 ans, nous n'avions qu'un vélodrome couvert, on en a maintenant plusieurs. Il y a des projets qui se montent. Je sais qu'un projet met parfois 10 ans. Le vélodrome de Loudéac c'est presque 20 ans, mais on voit que c'est un succès, il y a du monde. Mais ça ne se fera pas dans la nuit du lundi au mardi.

« SAINT-QUENTIN EST SOUS-UTILISÉ AU NIVEAU DES ORGANISATIONS RÉGIONALES »

En parlant de vélodrome couvert, est-ce que l'utilisation du Vélodrome National (trois réunions cet hiver) est satisfaisante ?
La problèmatique des vélodromes d'un point de vue général, est celle d'équipements, comme les stades, avec des charges qui sont gérées différemment selon les territoires. Le vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines est géré par une convention tripartite depuis le départ, sans laquelle il n'y aurait pas de vélodrome du tout, il ne faut jamais l'oublier. Dire que je suis satisfait du nombre d'épreuves régionales à Saint-Quentin ce serait mentir. Mais il faut trouver des moyens de financer ou de faire autrement, c'est là que ça bloque. Il est sous-utilisé au niveau des organisations régionales.

La FFC peut-elle faire quelque chose ?
La FFC c'est tous les licenciés. On essaie de faire quelque chose mais le tarif est ce qu'il est par les coûts qui sont engendrés, notamment la sécurité. Il faut se mettre des deux côtés de la table pour discuter. Nous, on trouve que c'est trop cher mais la personne qui est en face de la table dit que ça lui coûte des sous. On va continuer à discuter pour améliorer les choses

Quel est l'avenir de l'utilisation de Saint-Quentin après 2024 ?
On va déjà chercher à améliorer les choses comme je viens de le dire. On continuera les organisations internationales, il sera devenu un vélodrome olympique ce qui va imposer une marque. C'est le vélodrome national, sa vocation est de recevoir de grandes épreuves internationales.

« LA PRATIQUE À L'INTERNATIONAL COÛTE UNE FORTUNE »

Combien de vélodromes régionaux peuvent présenter aux collectivités qui les financent un peloton rempli et un vélodrome plein ?
Je n'ai pas fait le compte mais je vais y répondre différemment. Le vélodrome de Loudéac c'est un outil test. C'est la première fois qu'un comité gère un vélodrome. Ça me parait logique mais ça n'existe pas ailleurs. À chaque fois qu'ils organisent il y a du monde. Il faut voir si ça continue. Il faut dupliquer ce qui marche. On aura des spectateurs si on aura des coureurs. On aura des jeunes coureurs si on a une équipe de France performante car tout se tient. Si on a des champions ça suscite des vocations et si on a des jeunes, on a des encadrants et vice-versa.

La piste est-elle un sport qui coûte cher à la FFC ?
Je serais tenté de dire, en employant une formule, que c'est la "danseuse" de la FFC car ça n'apporte pas de recette alors que la pratique à l'international coûte une fortune. C'est un sport technologique, c'est la formule 1 du vélo. Tout se joue au millième. Quand on voit où se situent les manches de la Coupe du Monde, ça coûte très très cher. Oui ça coûte mais c'est notre devoir. C'est une discipline olympique, où il y a le plus de titres à décerner, je ne vois pas comment une fédération olympique pourrait être absente de ce débat-là, c'est notre vocation.

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