Paris-Nice : Des spectateurs entre compréhension et frustration
Crédit photo Nicolas MABYLE / DirectVelo
Drôle d’ambiance sur les routes de Paris-Nice. Ce vendredi, alors que la majorité des fédérations sportives annonçaient les unes après les autres la suspension de tous leurs événements sportifs avec effet immédiat, la « Course au soleil » se poursuivait pour une sixième journée (voir classements), mais dans des conditions toujours aussi particulières. Avec un plateau de grande qualité et un beau soleil au-dessus de la ville de Sorgues (Vaucluse), le public avait une fois encore fait le déplacement en nombre dans la zone de départ. Comme depuis le début de la semaine et les règles imposées à partir de la 2e étape, il leur était pourtant impossible d’approcher les coureurs.
« ILS N’ONT PAS LE CHOIX »
La zone de départ était complètement quadrillée, des bus d’équipes jusqu’au podium protocolaire. Impossible d’ailleurs pour le public d’être à moins d’une petite centaine de mètres de ce même podium protocolaire. Face aux coureurs sur le podium, une poignée de photographes et autres journalistes accrédités. Puis, dans le fond, une place totalement vide et interdite d’accès. Les premiers spectateurs se trouvaient ainsi nettement excentrés. Parmi eux, Gérard. “C’est forcément frustrant car on n’a jamais connu une telle situation. Mais bon, on n’en veut pas à l’organisation car on sait les contraintes qui sont les leurs. Ils n’ont pas le choix. Tout le monde subit cette situation”, résumait l’habitant d’une commune voisine, venu spécialement pour l’événement, auprès de DirectVelo. Monique, venue accompagner son mari en cette fin de matinée, a trouvé les mesures adéquats. “Si ça peut permettre à la course de se tenir plus ou moins normalement, c’est un moindre mal. Personne ne peut être surpris de la situation. Nous étions prévenus avant de nous rendre sur place. Il faut faire avec”.
Situation également très particulière quelques heures plus tard, à Apt, ville d’arrivée de cette sixième étape. Comme durant les journées précédentes, le public n’avait pas accès à la zone des 300 derniers mètres de la course. Parmi les plans B possibles ; voire l’arrivée en hauteur, grâce à la présence d’un petit parking qui donnait sur la ligne d’arrivée, placée en contrebas. “C’est toujours mieux que rien mais ça fait quand même drôle de se retrouver là et de voir qu’il n’y a personne en bas”, regrette Nicolas, jeune fan qui espérait pouvoir décrocher quelques autographes et un bidon de son idole Peter Sagan. “Mais il y a beaucoup moins de coureurs qui donnent leurs bidons, j’ai l’impression. Ils ont certainement eu des consignes”, leur répond son ami Romain, venu l’accompagner ce vendredi après-midi.
« C’EST N’IMPORTE QUOI »
En contrebas, quelques 200 mètres après la ligne d’arrivée - photo ci-dessus -, on retrouve cette fois-ci une nouvelle poignée de spectateurs, coincés ici et dans l’incapacité de réellement voir le dénouement de l’étape. Julien est en colère : “C’est n’importe quoi. Pourquoi nous empêche-t-on de nous approcher ? On est 50 ici ! Et puis, l’idée c’est de ne pas contaminer les coureurs ? On ne les approchera pas plus en étant sur la ligne derrière la barrière. Là, on va les avoir tout près de nous pendant quelques instants”, précise-t-il en faisant référence à la rue - non barriérée - qui sépare la zone où se trouve cette partie du public et le parking des bus des équipes. “Heureusement, on a pu les voir passer une première fois dans Apt tout à l’heure et là, c’était comme d’habitude. On était sur le trottoir et on n’avait pas la consigne de s’éloigner”.
Philippe, déjà présent sur les pentes du Mont Ventoux au Tour de la Provence, le mois dernier, en remet une couche. “On est collés-serrés ici. On ne va pas voir l’arrivée mais ça ne va pas nous empêcher de nous filer le virus les uns les autres. Quelle serait la différence si on nous laissait nous approcher ?”, peste-t-il. Grand supporter de Julian Alaphilippe, Nathan a pour sa part passé de longues minutes à l’entrée de la zone des bus en espérant avoir un autographe de son idole. Lui aussi s’est montré particulièrement désolé et frustré de la situation, notamment lorsqu’il a aperçu, au loin, son « chouchou » répondre aux questions de la presse devant le bus de la Deceuninck-Quick Step. “Et tous ces journalistes-là, ils sont combien les uns sur les autres ? Eux aussi ils peuvent filer le virus à Julian”, râle le jeune étudiant, tout de même conscient de la difficulté de gérer une telle situation pour les organisateurs. “Chacun essaie de faire au mieux et c’est déjà bien que la course continue. Mais c’est vraiment triste de se retrouver dans une telle situation. On a l’impression d’être mis de côté. Je comprends qu’au foot, on mette en place des huis clos car ça concerne 50.000 ou 80.000 personnes parfois. Mais là, on est combien ? 300 spectateurs ? Il y a autant de membres de staff et de journalistes que de public. On aurait pu nous laisser faire notre vie comme d’habitude”.