Antoine Breton, le sprinteur est devenu l’homme à la moto

Crédit photo Elde Fotografen

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Antoine Breton a été bercé dans le vélo. Originaire de la petite couronne autour de Paris, à Villiers-sur-Marne, il a débuté à l’école de cyclisme du VC Pontcarré. Il a tout de suite gagné et a continué de collectionner les bouquets en Minimes et en Cadets, au point de devenir Champion de France de vitesse de la catégorie deux années de suite en 1992 et 1993. Il remet ça chez les Juniors en 1995 et double avec le titre du kilomètre, après avoir gagné la médaille du CIF en 1994. Il est alors rentré en sport-études à l’INSEP, la pépinière du sport français. 4e d’un Championnat du Monde Juniors en vitesse individuelle, au kilomètre et en vitesse par équipes, il ne réussit pas à faire sa place chez les Elites à une époque où il fallait battre Florian Rousseau, Laurent Gané ou Arnaud Tournant pour être Champion de France. S’il s’écarte du vélo, il va finir par remettre un pied dans les vélodromes, puis la jambe, puis le corps tout entier. Il encadre les coureurs du SCO Dijon dans les compétitions sur piste comme la semaine dernière au Championnat de France à Roubaix.
Antoine Breton est même remonté sur la piste en tant qu’entraîneur de demi-fond. Depuis la saison dernière, le licencié du SCO Dijon est le pilote d’Emilien Clère et il a déjà rajouté un titre de Champion de France à son palmarès, au mois de juillet 2022 à Commercy. Avec DirectVelo, il revient sur son parcours qui ne tourne pas en rond.

DirectVelo : Qu’est-ce qui t’a amené au vélo ?
Antoine Breton : La famille, le grand frère, la grande sœur, le papa, j’ai baigné dans le vélo. Mon frère avait commencé au club de Bry-sur-Marne et en 1983, il a pris une licence au VC Pontcarré et c’est là où j’ai pris ma première licence en 1985, à 7 ans. J’ai tout de suite gagné en pré-licencié, Minimes, Cadets, Juniors. Après ça s’est compliqué en Séniors (sourire).

TOUS LES MERCREDIS À LA CIPALE

Quel a été ton premier contact avec la piste ?
Les Mercredis populaires à la Cipale dans le Bois de Vincennes, où tous les pré-licenciés jusqu’aux Minimes couraient tous les mercredis. Les sensations de vitesse m’ont tout de suite plu, l’adrénaline qu’on peut avoir sur un vélodrome. Et physiquement, j’étais plus taillé pour la piste que la route. Je me suis vraiment spécialisé dans la piste quand je suis devenu Champion de France Cadets. Je bats Jimmy Casper et Bruno Bohigues avec qui je suis rentré à l’INSEP et là, il n’était plus question de faire de la route.

Le vélo est devenu plus sérieux à ce moment-là ?
Ça devient un objectif de faire partie de l'élite. C’était l’époque de Florian Rousseau, Laurent Gané, Arnaud Tournant. On ne visait que le haut-niveau, c’était 100% vélo avec des horaires aménagés entre l’école et le vélo, avec deux entraînements et deux cycles scolaires par jour. Dès ma première année à l’INSEP, j’ai fait le Championnat du Monde à Quito où je termine 4e de la vitesse et du kilomètre. J’y suis resté pendant sept ans et j’ai arrêté fin 1999, dans ma troisième année de Séniors.

« IL FAUT SE BATTRE CHAQUE JOUR »

Qu’est-ce qui t’a poussé à raccrocher ?
Le niveau était tellement élevé en France que ça devenait très compliqué d’aller faire des compétitions à l’international. On se battait pour le Championnat de France qui était déjà d’un niveau plus qu’international. C’était toujours du plaisir mais ça devenait vraiment compliqué. Financièrement, on ne pouvait pas en vivre. Il fallait faire un choix. J’ai été pré-olympique pour Atlanta mais il n’y avait qu’une place. Pour Sydney, c’était trop compliqué et j’ai décidé de mettre un terme à ma carrrière.

Qu’est-ce que tu retiens de ta carrière ?
Je garde d’excellents souvenirs. Si c’était à refaire, je le referais. Ça m’a permis de voyager, de me forger un caractère aussi. Même si on était en équipe, ça reste un sport individuel et il faut se battre chaque jour.

« J'AI REMIS UN PIED DEDANS »

Quand tu arrêtes le vélo, tu arrêtes tout ?
Oui j’arrête tout ! J’avais fait le tour, je voulais passer à autre chose. Je suis revenu sur la région de Dijon pour commencer une vie professionnelle classique comme Monsieur Tout le Monde.

Qu’est-ce qui t’a fait revenir dans le vélo ?
Mes enfants. Mon fils en Cadets a voulu faire du vélo mais je lui ai demandé de faire de la piste. Je suis retourné dans un vélodrome et sur le bord des routes. Les têtes n’avaient pas changé, ce sont toujours les mêmes contacts. J’ai remis un pied dedans, et la passion est toujours là, alors c’est vite revenu !

SUR LA MOTO, DES DÉCISIONS AU DIXIÈME DE SECONDE

Et maintenant tu es devenu entraîneur de demi-fond. Comment ça s’est passé ?
J’étais allé en tant que spectateur d’une course de demi-fond à Dijon. Les têtes du demi-fond n’ont pas changé et ils m’ont proposé de monter sur la moto et ça m’a tout de suite plu. Je suis entraîneur de demi-fond depuis quatre ans et l’année dernière, avec Emilien Clère pour notre première saison ensemble, on a gagné le titre de Champion de France.

Quelles difficultés techniques rencontre un entraîneur de demi-fond ?
Déjà, la prise en main de la moto, ce n’est pas une position classique (debout sur la moto, les pieds calés dans des sabots, NDLR). Il faut gérer la vitesse de son coureur et surtout gérer les autres coureurs et les autres motos. Il faut tout le temps anticiper, ce sont des prises de décisions au dixième de seconde et il faut une réelle confiance avec le coureur. On peut gagner avec un coureur qui marche très, très bien mais le pilote est très important dans la stratégie. L'entraîneur peut aussi faire perdre un coureur même s’il est très, très fort.

« UNE GRANDE TRISTESSE »

Chaque vélodrome a son parc de motos, tu dois t’adapter à chaque fois…
Avec Emilien, on a la chance de courir de nombreuses fois dans l’année. Chaque moto est différente mais ça se fait relativement bien. Le plus compliqué pour moi cette année, c’était à Zurich. Ce sont de très grosses motos qui demandent d’écarter beaucoup les jambes, ça roule très, très vite. Ce sont de bonnes sensations mais aussi de grosses prises de risque, il faut faire attention.

La particularité du demi-fond, c’est que l’entraîneur est aussi titré comme son stayer, ça te fait donc un titre de Champion de France en plus …
C’est mon sixième titre. J’en ai trois en Cadets et deux en Juniors. Si on ne fait pas de bêtise sur la moto, si ça se passe bien avec les autres entraîneurs au niveau national ou européen, il y a une confiance qui se crée. Il m’arrive sur certaines courses d’entrainer des coureurs étrangers quand il manque un pilote. À Berlin, j’ai fait sept manches avec sept coureurs différents, c’est très formateur.

Cette année, votre sélection pour le Championnat d’Europe vous a été retirée au dernier moment à cause d’une blessure d’Emilien. Comment l’as-tu vécu ?
Comme une grande tristesse. On avait préparé ce Championnat d’Europe avec Emilien de la plus belle des manières au niveau de l’entraînement et du matériel. On avait fait refaire un vélo, commandé du matériel spécifique en vue de ce Championnat d’Europe et ça a été une décision dure à accepter. Maintenant, on se prépare pour la nouvelle année.

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