John Gadret : « Comme une victoire »

John Gadret (Cross Team by G4), qui hésite à poursuivre sa carrière de cyclo-crossman, est allé chercher, ce dimanche, la 3e place du Championnat de France de cyclo-cross. Le Nordiste, âgé de 36 ans, s'est dit très satisfait de ce nouveau podium.

DirectVelo : Commences-tu une deuxième carrière ?
John Gadret : Je pense plutôt que je termine ma carrière. Ce sont Steve (Chainel) et mon épouse qui m’ont convaincu de continuer sinon j’arrêtais en septembre. Ils ont réussi à me motiver pour ce Championnat. Je me suis préparé pour ça. Je me connais par cœur. Je visais une médaille et même si je n’ai que le bronze, pour moi c’est comme une victoire. Tout ce que je fais maintenant c’est du plaisir, cycliste, ce n’est plus mon métier. Je ne sais pas si je continuerai l’an prochain, ce qui est certain c’est que je ne courrai pas sur la route. Quand on a couru les trois grands tours, on ne va pas courir avec des amateurs, sans vouloir leur manquer de respect. Je pense plus m’orienter sur le VTT, notamment les Coupes de France, mais juste pour le plaisir et m’entretenir. Je pense aussi faire des trails car j’aime beaucoup la course à pieds. En août prochain, je ferai un bilan pour savoir si je repars pour une saison de cyclo-cross ou si j’arrête définitivement ma carrière.

Aviez-vous mis une tactique en place avec Steve Chainel ?
A un moment, Steve a vu que j’étais un petit peu en retrait, il a levé le pied. Puis il était moins bien et je lui ai proposé de le ramener sur Clément sur la partie asphaltée car  je sentais que j’avais de la force. Mais il m’a dit qu’il était mort et d’y aller. J’ai joué ma carte et ça m’a souri.

Tu ne finis pas très loin, y as-tu cru à un moment ?
Je savais très bien que Francis allait contrer quand il allait me reprendre et qu’à deux devant ils n’allaient pas se regarder. Mais j’y ai cru car sur un tel circuit, personne n’est à l’abri d’un souci mécanique. C’est d’ailleurs ce qui est arrivé à Francis dans le premier tour.

« SATISFAIT DE MA CARRIERE »

Es-tu déçu de ne plus être professionnel ?
J’ai fait un trait là-dessus. Quand je vois les équipes qui sont en stage, ça ne me donne même pas envie. Je me dis qu’il fallait mieux arrêter ma carrière quand je vois l’ambiance qui règne dans le milieu du vélo. Ce sont tous des requins. Quand j’ai commencé on m’avait prévenu qu’il y avait beaucoup de pourris dans ce milieu mais je n’y croyais pas. Je me suis rendu compte que c’était bien le cas. Mais ce n’est pas grave.
Je n’ai pas à rougir de ce que j’ai fait sur la route. Je suis satisfait de ma carrière. J’aurais peut-être juste aimé que ça se termine différemment. Pour mes deux dernières années chez Movistar, j’ai pris énormément de plaisir même si j’ai moins couru la dernière année à cause de pépins de santé. J’ai beaucoup appris dans une équipe espagnole. C’est très différent de la France. Ils comprennent vraiment les coureurs. Je ne les remercierai jamais assez pour ça. J’aurais peut-être pu continuer avec eux, mais c’est moi qui ai préféré arrêter. Je ne me sentais pas capable de leur rendre ce qu’ils me donnaient. Quand on roule pour Quitana, c’est important, il faut être solide. Je pensais plus retrouver une équipe à ma dimension pour terminer ma carrière à un échelon inférieur, même si je pense encore avoir un bon niveau. J’aurais aimé retrouver une équipe comme Francis l’a fait, en Continental Pro.

As-tu fait des démarches ?
J’avais un agent mais je pense qu’il n’a pas fait son travail comme il aurait dû. Cela fait partie des choses du milieu. Quand il faut placer quelqu’un, le manager est là pour toucher son pourcentage, mais ce n'est pas grave.

Comment envisages-tu ta reconversion ?
Je souhaite rester dans le vélo, mais pas chez les professionnels. Pourquoi pas m’occuper de jeunes, leur apporter mon expérience sur la route ou en cyclo-cross ? Mais ça sera peut-être complètement autre chose. J’ai plusieurs pistes, mais pour le moment rien de concret.

Quelle sera la suite de ta saison ?
Le sélectionneur (Julien Thollet) m’a dit que c’était à moi de décider pour le Championnat du Monde et la Coupe du Monde de Lignières. J’ai pris une grosse claque à Namur. J’ai la tête sur les épaules. J’ai le niveau national, mais l’international c’est maintenant très haut pour moi. Je vais y réfléchir. Je pense me rendre à Lignières, car c’est une Coupe du Monde en France. Aller au Championnat du Monde pour gagner un survêtement, ça ne m’intéresse pas. Si j’y vais c’est pour faire une performance. Je ferai le point après Lignières.

« EMU DE LA VICTOIRE DE FRANCIS »

Que t’inspire la victoire de Francis Mourey ?
Francis représente l’image du cylo-cross en France. Je suis très content de sa victoire. A l’arrivée, il m’a pris dans ses bras et je pense que ça a fait une belle photo. Je suis ému car avec lui, on a fait des guerres ensemble pendant des années. Les anciens sont là et ça me fait plaisir.

On sent une certaine tension avec les jeunes...
Les jeunes ont du mal à respecter les anciens et c’est un problème. Quand j’étais en Equipe de France de jeunes j’étais avec Chiotti et Magnien et on les respectait. Maintenant ce sont les jeunes qui veulent nous apprendre quelque chose. J’ai eu un accrochage avec Clément. Quand il m’a doublé, j'estime qu'il l’a fait vraiment salement. Je lui ai dit de se calmer s’il voulait finir la course. Il voulait m'en reparler, mais je lui ai dit qu’il fallait d’abord qu’il respecte les anciens. S’il était plus fort, il pouvait nous doubler facilement. Là, il doublait dans les virages, je n’avais jamais vu cela.

En France, il y a beaucoup de jeunes qui marchent bien chez les jeunes en cyclo-cross mais qui s’arrêtent rapidement…
Le problème de la France, c’est qu’on a de très bons coureurs. On avait Matthieu Boulo ou Romain Villa par exemple. Ils vont dans des équipes françaises, mais à part la FDJ qui a mis le paquet avec Francis, il n’y a pas de structure de cyclo-cross et c’est dommage. Des talents, la France pourrait en sortir autant que la Belgique. J’ai eu un accrochage avec Clément, mais je pense que si on lui laisse sa chance dans le cyclo-cross et ne pas lui faire faire que de la route il peut réussir. En Belgique, les cyclo-crossmen sont en vacances pendant quatre mois à partir de février, on ne leur demande pas de tirer dessus. Steve a monté un beau projet avec son équipe de cyclo-cross. C’est quelque chose qu’on n’a pas en France. Mais pour le moment c’est un peu difficile Ma médaille va peut-être apporter quelque chose pour trouver des sponsors. Monsieur Chazal était là aujourd’hui, ce n’était pas pour rien je pense. Steve a aussi un rendez-vous en mars avec la fédération pour voir comment développer son idée, on en saura plus à ce moment.

Crédit photo : Elen Rius - Elen Rius Photos
 

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