Un Tour de Bretagne pas assez dur ?
La grande sélection tant attendue n’a jamais eu lieu. Cette année, le Tour de Bretagne s’est résumé à une longue partie d’échecs entre les différents protagonistes en quête de bonifications. Une frustration pour de nombreux suiveurs. "De mémoire, je n’avais jamais vécu de Tour de Bretagne où ça se jouait aux bonifications comme ça a été le cas. Les écarts ont été infimes. Je n’ai pas vu grand-chose sur ce Tour de Bretagne, ce n'était pas une course qui était très intéressante cette année. Je n’ai pas pris mon pied", regrettait Stéphane Heulot auprès de DirectVelo. Du côté de Thibault Ferasse, même son de cloche. "J’ai patienté, et encore patienté, mais il n’y avait rien à se mettre sous la dent pour des mecs comme moi. J’en attendais plus. Devant la famille et les amis, j’avais envie de faire quelque chose. C’est la première année que je vois ça. C’était une semaine atypique. Mais il en faut pour tout le monde".
« ÇA RESSEMBLAIT AU TOUR DE NORMANDIE »
Avec cinq sprints massifs en sept jours de course, et deux échappées victorieuses avec seulement une poignée de secondes sur le peloton, les écarts n’ont jamais été creusés sur ce Tour de Bretagne. La principale raison ? "Ce qui aurait pu faire la différence, c’est le vent et la pluie qui ont été absents. On l’a vu à Châteaubriant où les échappés ont pu aller au bout’’, analyse Anthony Ravard, directeur sportif de l'UC Nantes Atlantique. "Le parcours ne comportait pas d’intérêt stratégique puisque l’orientation du vent a toujours rendu la course plus facile. La météo a été clémente. D’habitude, le vent, le froid et la pluie créent des différences et des journées compliquées’’, reprend Stéphane Heulot, directeur sportif de la formation Sojasun espoir-ACNC. Christophe Fossani, organisateur de l'épreuve, regrette cette météo trop clémente. "Si on avait eu des conditions météorologiques comme ils ont eu dans le nord de la Bretagne il y a quelques jours, ça aurait été différent. On a roulé toujours avec un vent arrière. Si le vent avait été de côté, ça aurait tout changé. On aurait aimé en avoir".
Sur un parcours dénué de difficultés majeures, contrairement aux précédentes éditions, beaucoup de coureurs ont longuement attendu leur heure. En vain. La route n’a jamais vraiment été propice au déclenchement de la grande explication entre les costauds. "Je trouve que le tracé n’a pas été bien dessiné pour les attaquants. Il n’était pas assez dur. On n’a pas vu les hommes forts se détacher. Il y avait des coureurs comme Julien Antomarchi qui marchaient fort, mais qui n’ont pas pu s’exprimer’’, regrette Maxime Renault. Impatient d’en découdre, Thibault Ferasse est également resté sur sa faim. "J’avais bien préparé mon affaire parce que je pensais que ça allait être plus dur que ça. Je n’ai pas voulu aller dans les échappées au début parce que je pensais que quelques secondes ne changeraient rien. En fait, ça a tout changé". Engagé sur les deux épreuves cette année, Simon Guglielmi s’est cru revenir quelques semaines en arrière tout au long des sept jours de course. "Malheureusement, ce Tour de Bretagne ressemblait au Tour de Normandie. C’est dommage. On aurait pu mettre une ou deux étapes difficiles. On est passé près de Jugon-les-Lacs. Si on était passé là-bas, il n’y avait plus que dix mecs dans le peloton’’, affirme-t-il.
« IL FALLAIT ÊTRE DANS LES ÉCHAPPÉES »
La course a donc été cadenassée -à double tour- par les équipes de sprinteurs. Avides d’engranger des secondes de bonifications et de s’expliquer dans la dernière ligne-droite des étapes, ils ont étouffé les velléités des attaquants. "Quand Alexys Brunel est sorti, c’est le seul moment où l’on a vraiment vu qui était fort. Le reste du temps, c’était de l’opportunisme’’, souffle Stéphane Heulot. Les sprints bonifications disputés au cours de chaque journée ont permis de faire la part belle aux échappés. Dans ces conditions le classement général final est-il réellement représentatif du niveau de chacun ? "J’aurais préféré que ça soit plus casse-pattes, mais j’ai su en profiter. On peut se dire que j’ai pris deux échappées et que je n’ai rien fait à la pédale alors que s’il y avait eu des étapes chantiers, on se serait dit que j’étais à ma place’’, reconnaît Léo Danès, 4e de l’épreuve.
Avec des départs d’étapes disputés presque tous les jours sur les chapeaux de roues, où la moyenne a parfois dépassé les 50km/h pendant plus d’une heure, il fallait être avant tout très fort dans l'optique de se montrer opportuniste. La bataille des bonifications a été rude et disputée. Sa 4e place au classement général, Léo Danès estime qu'il a su aller la chercher. "D’autres auraient pu être à ma place, mais il fallait être dans les échappées. Ça partait à la pédale". Les sociétaires de l’UC Nantes Atlantique avaient été prévenus. "C’était clair que le général allait se jouer à la bonification, donc j’ai demandé à mes coureurs d’aller dans les coups en début de Tour de Bretagne. On s'est adapté par rapport à la course, même si on aurait préféré que ça soit plus dur. S’il n’y avait pas eu de bonifications, on aurait fait différemment’’, admet Anthony Ravard. Quoiqu’il en soit, Christophe Fossani, l'organisateur du Tour de Bretagne promet d’imaginer une édition 2020 de son épreuve beaucoup plus difficile. "Il y aura une arrivée d’étape inédite. Je peux assurer qu’elle sera extrêmement dure…", promet-il. Avant une dernière explication à Dinan.