Février corsé : Cinq échappées victorieuses, mais pourquoi ?
Depuis le début de la saison, les attaquants sont à l’honneur sur les courses françaises. Alors que DirectVelo évoquait en début d’année un calendrier particulièrement corsé et favorable aux puncheurs-grimpeurs pour les premières épreuves professionnelles du territoire hexagonal (lire ici), les coureurs au tempérament offensif en ont profité pour s'accaparer un belle part du gâteau après des heures passées en tête de course. Si les cas de Benoît Cosnefroy au Grand Prix La Marseillaise ou d’Alexys Brunel à Bellegarde restent particuliers, puisqu'ils ont jailli du peloton dans la dernière heure de course, on dénombre tout de même cinq autres cas d’échappées capables de résister au peloton après une journée quasi entière passée à ouvrir la route. Le Belge Dries De Bondt (Alpecin-Fenix) et l’Australien Ben O’Connor (NTT Pro Cycling) sur l’Etoile de Bessèges, le Gallois Owain Doull (Team Ineos) au Tour de la Provence, les Français Anthony Perez (Cofidis) et Julien Bernard (Trek-Segafredo) au Tour des Alpes-Maritimes et du Var, ont tous décroché des succès inattendus en résistant - parfois de justesse - au retour du peloton.
Mais alors, comment expliquer que tant d’attaquants aient été récompensés en moins d’un mois de compétition ? “Maintenant, tout le monde s’entraîne pareil. C’est de plus en plus homogène et ça se joue à des détails dès le début d’année. Quand on laisse pas mal de champ aux échappées, ça va au bout”, répond Romain Combaud. Le coureur de Nippo Delko One Provence était présent dans l’échappée qui est allée au bout à Aix-en-Provence, lors de la dernière étape du Tour de la Provence. “En tant que puncheur-baroudeur, je suis content pour les opportunistes. C’est bien que les échappées aillent au bout car on est une équipe offensive”. Victorieux au Mont Bouquet, Ben O’Connor a également son explication, et il la trouve en regardant la liste des partants de ces épreuves. “Ce sont des courses plus ouvertes qu’en WorldTour. On sait qu’il y a des possibilités. Si tu mets des mecs forts devant, le peloton n’est pas forcément capable de rentrer. Les coureurs qui sont devant ne sont pas là juste pour montrer le maillot mais pour jouer la gagne”. Et ils ne se posent pas de questions. "On a bien joué, jusqu’à réussir à reprendre une minute à un moment important et là, ça devenait vraiment intéressant. Je savais qu’Anthony (Perez) allait jouer le jeu pour collaborer jusqu’à la fin", se félicitait Anthony Turgis (Total Direct Energie) - notre photo - après son beau numéro sur les routes de Grasse.
DES RÉACTIONS TROP TARDIVES, OU DES ÉQUIPES TROP ESSEULÉES
Directeur sportif d’EF Pro Cycling, Ken Vanmarcke se souvient bien du scénario de l’étape de Bessèges, où le peloton est venu mourir à une poignée de secondes des derniers rescapés de l’échappée. “Certaines équipes ont attendu trop tard pour rouler. La NTT est venue rouler à bloc d’un coup avec toute l’équipe mais il ne restait qu’une dizaine de kilomètres…”. Lors de la première étape du Tour des Alpes-Maritimes et du Var, Benoît Cosnefroy concédait la même erreur de sa formation. “Forcément, en analysant une fois la course finie, on aurait dû rouler plus tôt. On s’est mis à rouler lorsque les équipes qui roulaient depuis le début de la course se sont arrêtées de le faire. On est peut-être venu trop tard, mais on a au moins eu le mérite de venir, contrairement à d’autres équipes”, regrettait le lauréat du Grand Prix La Marseillaise et de l’Etoile de Bessèges.
Vainqueur dimanche dernier au sommet du Mont Faron, Julien Bernard trouve lui une réponse via ce qu’il s’était passé la veille, sur les pentes du Col d’Eze. “L’explication, c’est Quintana, je pense. Il a montré qu’il était très fort. Aujourd’hui (dimanche), personne n’a donc voulu rouler pour eux (Arkéa-Samsic, NDLR) derrière, dans le peloton. C’est pour ça que l’on est allé au bout. C’est aussi pour ça que l’on a envoyé un coureur devant. Quintana a tellement montré à quel point il était fort hier (samedi)… On n’avait pas spécialement envie de contrôler aujourd’hui pour, au final, rouler pour lui. On a donc préféré jouer une autre carte et ça a marché”. Il est rejoint dans ses propos par Adrien Garel, coureur à l’initiative de cette échappée victorieuse. “Ce n’est pas un hasard. Beaucoup ont vu sur le Haut-Var que Quintana était très fort. Par contre, Pinot et Bardet étaient plus en reprise et sans pression. Je pense qu’ils n’avaient pas forcément l’envie de faire rouler leurs équipes. Le premier jour, Arkéa est aussi tombé sur un grand Turgis et un grand Perez. Il n’y avait pas n’importe qui devant et le peloton leur a laissé trop de temps”, analyse le coureur de B&B Hôtels-Vital Concept. “Idem sur cette troisième étape. Je suis sûr que Quintana était gourmand et qu’il voulait encore l’étape. Sinon, Arkéa aurait pu laisser dix minutes à l’échappée en début d’étape. Mais ils sont encore tombés sur un bon groupe et sur des costauds comme Julien Bernard devant. Des équipes comme AG2R ou Groupama-FDJ avaient décidé d’envoyer des coureurs devant et des bons éléments, avec Nans Peters ou le jeune coureur de la Conti (Lars van den Berg, NDLR). Ce n’était pas pour rien. Ils voulaient jouer l’étape comme ça et Arkéa-Samsic a dû se débrouiller. Sauf que ça ne l’a pas fait”.
Notre dossier "Février corsé" :
- Du pour... et du contre chez les pros
- Les organisateurs cherchent la bonne formule
- Les Conti doivent faire avec
- Cinq échappées victorieuses, mais pourquoi ?