Ardèche puis Giro : l’enchaînement digne d’un Grand Tour

Crédit photo Flaviano Ossola

Crédit photo Flaviano Ossola

Une dizaine de filles actuellement présentes sur les routes du Tour d’Italie, la plus grande course par étapes du calendrier féminin, était déjà dans le peloton du Tour de l’Ardèche juste avant le départ du « Giro Rosa ». L’épreuve ardéchoise, remportée par l’Américaine Lauren Stephens, s’est disputée du 3 au 9 septembre tandis que le Giro s’élançait dès le 11 pour se terminer ce samedi 19 septembre. Pour celles qui termineront les deux courses, voilà donc un menu de seize étapes en… dix-sept jours. Avec une seule journée de repos entre les deux événements. Alors, comment les filles qui enchaînent les deux compétitions vivent-elles cette situation ? “J’avais beaucoup d’énergie à revendre après cette longue période sans courses”, sourit la Néerlandaise Maaike Boogaard auprès de DirectVelo. La sociétaire de la formation Alé BTC Ljubljana promet d'être très vigilante pour tenir la distance, elle qui a fini le Tour de l’Ardèche (57e) et qui compte bien en faire de même sur le Tour d’Italie. “J’essaie de manger le plus possible, de bien m’hydrater. Je fais attention à moi sur les avant et après-course. Ce n’est pas facile mais c’est jouable”.

UN ABANDON ANTICIPÉ EN ARDÈCHE

Sa coéquipière Urska Zigart - 10e du Tour de l’Ardèche - est dans la même situation, et pourtant : “je n’étais pas prévue dans l’équipe pour le Giro, initialement. Je devais simplement disputer le Tour de l’Ardèche et je l’ai donc fait à bloc pour aider Mavi (Garcia). Puis au milieu du Tour de l’Ardèche, le plan a changé”. Contrairement à sa collègue néerlandaise, la Slovène n’a pas franchement le temps de se vider la tête les soirs d'étape. Petite-amie de Tadej Pogacar, elle explique en effet être régulièrement sollicitée par de nombreux médias, notamment de son pays, en marge de son Tour d’Italie, pour évoquer le parcours de l’actuel 2e du Tour de France. “Sur seize jours de course, le plus dur, c’est peut-être dans la tête, plus encore que physiquement. Il faut s’accrocher”.

Membre de l’équipe Movistar, Paula Andrea Patiño avait anticipé cet enchaînement si particulier. Contrairement aux deux athlètes d'Alé BTC Ljubljana, elle n’a pas disputé l’ensemble du Tour de l’Ardèche. “C’est clairement quelque chose de difficile à réaliser. C’est pourquoi avant même le début de la course en Ardèche, on avait décidé avec l’équipe que je ferais quatre jours là-bas, histoire de prendre encore un peu de rythme avant le Giro, mais sans me cramer non plus. C’est une course très difficile en matière de dénivelé et il n’y a qu’un jour de repos entre les deux courses”. La Colombienne comprend tout de même que d’autres filles, et d’autres équipes, aient fait un choix différent. “C’est une décision qui revient à chacune et chacun. Peut-être que certaines équipes n’ont pas trop le choix non plus car il n’y a pas un grand nombre de filles capables de performer sur des courses comme celles-là. Mais je ne sais pas s’il est possible d’enchaîner les deux en ayant encore du gaz jusqu’à la fin du Giro”, s’interroge la compétitrice de 23 ans, qui avait tout de même eu le temps de terminer dans le Top 10 de chacune des trois premières étapes ardéchoises. La Championne de France Audrey Cordon-Ragot (Trek-Segafredo) a dû quitter l'Ardèche sur chute mais avait aussi prévu de se retirer volontairement de la course pour arriver dans de meilleures conditions au Tour d'Italie (lire ici). 

DE QUOI DONNER DES IDÉES POUR L’AVENIR ?

Simona Frapporti, de la même façon que Paula Andrea Patiño, souhaitait se rendre en Ardèche pour peaufiner sa condition physique avant le grand rendez-vous du Giro. Une course qu’elle ne manquerait pour rien au monde, en tant qu’Italienne. “Participer aux deux est intense mais le Tour de l’Ardèche était l’occasion pour moi de courir avant le Giro, j’en avais besoin car après le déconfinement, je n’avais pas pu reprendre tout de suite, la faute à des problèmes physiques. Mais c’était déjà une course dure. Enchaîner 17 jours comme ça est une expérience unique mais je pense que beaucoup de filles sont capables de le faire”, analyse l’expérimentée - 32 ans - sociétaire de la BePink. “On peut faire seize jours de course de suite ou presque, c’est jouable. Par contre, jouer le général sur les deux courses semble compliqué, d’autant qu’il n’y avait qu’une journée de repos entre les deux et encore… Ce n’était pas vraiment une journée de repos puisque c’était une journée passée sur la route pour aller de l’Ardèche au départ du Giro. Ce n’était pas de la pure récupération”

Toutes sont unanimes : enchaîner les deux courses n’est pas un gros problème, à condition de ne pas y espérer un bon classement général. Et pourtant : l’Espagnole Mavi Garcia, 36 ans, a terminé 2e du Tour de l’Ardèche après en avoir remporté les deux premières étapes et donc logiquement porté le maillot de leader. Ce vendredi soir, la voilà toujours 8e du classement général du Tour d’Italie. Une sacrée performance qui impressionne ses coéquipières, à commencer par Maaike Boogaard. “C’est quand même dur de briller au Giro en ayant fait l’Ardèche à bloc car au Giro, tu retombes sur des filles qui ont plus de fraîcheur comme Annemiek Van Vleuten ou Elisa Longo Borghini. Mais ça reste une superbe expérience qui permet de voir de nouvelles limites et de découvrir comment le corps répond”. Urska Zigart, pour sa part, se contente de rappeler que sa leader a “un gros moteur”. Paula Andrea Patiño l’assure de son côté : “il est possible d’organiser un Grand Tour sur quinze ou seize jours” pour les féminines. Pourquoi pas lors d’un futur Tour de France, qui devrait revoir le jour dans deux ans.  

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