Opinion : « Les grandes épreuves boostent nos régionaux »

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Comment apporter un coup de fouet au plus « petit » comité FFC de la métropole ? Avec du travail de formation, impliquant les clubs de la Région et prévoyant un calendrier d’épreuves Elites nationales et internationales, comme l'explique François Trarieux, Conseiller Technique Régional du Limousin.

« Le Club Limousin n’est pas nouveau ; déjà dans les années 70-80 le Comité regroupait les meilleurs éléments afin de participer à des épreuves de renom telles que le Tour d’Empurdan, qui avait notamment fini de révéler Luc Leblanc, ou encore le Tour Alsace, le Tour des Provinces de Liège… Plus tard, Pierre-Yves Chatelon (CTR de 2001 à 2004) et l’équipe dirigeante avaient lancé la DN1 Espoirs du Limousin après l’arrêt de la DN1 Panorimo 23  au même moment que la création du Pôle espoirs de Guéret. Ceci avait notamment porté ses fruits avec l’apparition de Sylvain Georges, Yann Moritz ou Théo Vimpère au plus haut-niveau.

Aujourd’hui, nous essayons de faire perdurer cette culture en participant à de beaux rendez-vous du calendrier national ou international : Ronde de l'Isard la semaine passée (pour la troisième fois), Paris-Roubaix Espoirs ce dimanche (pour la première fois)... en essayant de partir des Cadets jusqu’aux Espoirs et en intégrant les meilleurs Elites comme capitaine de route à l’image de Marc Staelen, Alexandre Caudoux, Julien Lamy ou encore Maxime Médérel. Certains se demandent parfois pourquoi nous sommes présents au départ. Nous avons la chance d’avoir un club en DN2, Creuse Oxygène Guéret, et deux clubs en DN3 avec l’UV Limousine et le Team Elancia VC Tulliste. Toutefois, nos clubs n’ont pas tous la renommée ou l’effectif pour participer à certaines épreuves  : nous avons donc à mon sens un rôle à jouer. Il est vrai que nous n'avons pas eu de résultat visible sur la Ronde de l'Isard. Mais nous travaillons... comme beaucoup. Avec seulement 1700 licenciés dans le Comité, nous avons pu avoir un petit complexe d'infériorité par le passé, mais au travers de cette politique, notre volonté est d’aller de l'avant dans le travail de formation des jeunes et l'affirmation de notre identité régionale.

PRENDRE DU VOLUME

En parallèle du Pôle espoirs de Guéret, notre programme intègre les meilleurs coureurs du Limousin dès l'âge de 15 ans. Nous faisons participer nos Cadets aux manches du Trophée Madiot pour apprendre à évoluer dans des pelotons importants en équipe, chose impossible dans notre Région. Nos Juniors disputent de belles épreuves internationales et Fédérales sur lesquelles nous sommes souvent obligés de sortir de notre territoire fautes d’organisations de ce niveau. Idem pour nos Espoirs. C'est grâce à cet investissement qu'ils peuvent prendre du volume physiquement, acquérir de l'expérience, jauger leur niveau, affiner leur plan de carrière. Le volume physique, tout d'abord : une compétition 2.2 au calendrier UCI comme la Ronde de l'Isard permet à nos coureurs de se confronter aux meilleurs de leur génération, sur des parcours de montagne, à des vitesses élevées. Nous savons très bien qu'ils ne sont pas en mesure de jouer les premiers rôles pour la victoire. Mais ils en ressortent plus forts.

Même s’il faut rester prudent dans l’interprétation des résultats, en 2014, la participation à cette épreuve avait aidé Mickaël Guichard à devenir Champion Régional puis à s’illustrer dans la foulée sur le Tour du Beaujolais. En 2015, elle propulse Mathieu Morichon vers une 2e place au Souvenir Jean Graczyk ou encore Thomas Chassagne, vice-champion du Limousin. Une épreuve UCI renforce un organisme en vue d'épreuves d'un niveau moins relevé. Ainsi, l'expérience se révèle concluante sur le moyen et le long terme, notamment en vue de nos participations à la Coupe de France Espoirs et aux Championnats de France.

DECOUVRIR LE VELO SOUS TOUS LES ANGLES

Un bon coureur doit s’adapter à toutes les situations, toutes les conditions, tous les scénarios, tous les terrains. Chaque épreuve que nous avons disputée avec le Club Limousin essaye d’aborder une thématique forte. Le Tour de Basse-Saxe en Allemagne : les courses de rouleurs sprinteurs. La Piccola SanRemo : le format typique d’une classique italienne ou encore le Tour de Haute-Autriche avec l’approche de la haute montagne (Bjorg Lambrecht, vainqueur de la Ronde de l’Isard 2016,  y avait pris la 2e place au général en 2015). Chaque expérience procure des « ressources » qui seront mises à profit sur d'autres objectifs.

Nos coureurs apprennent sur le vélo proprement dit et en-dehors. En Italie, ils s'inquiétaient que le peloton laisse quatre minutes aux échappés, mais l'écart a été comblé en vingt kilomètres. A cette occasion, nos Juniors ont pris conscience de la nécessité de rouler de façon organisée, autour d'un leader désigné, aidé par des équipiers. En Suisse, sur le Tour du Pays de Vaud [devenu une épreuve de la Coupe des Nations Juniors en 2015 et désormais disputé par sélections nationales, NDLR], les équipes étaient logées dans un bunker. Ce qui prouve qu'un hébergement dans un hôtel quatre étoiles n'est pas indispensable à la performance ! Nous sommes conscients que tous nos coureurs ne rejoindront par les rangs Elites ou professionnels, mais si certains se tournent vers l’encadrement ou deviennent capitaine de route dans leurs clubs respectifs, ils pourront mettre à profit leur vécu.

DEVELOPPER L'ATTAQUE

Nous ne sommes pas les favoris de Paris-Roubaix Espoirs - car nos coureurs ne sont pas disponibles pour une préparation optimale, s’il en existe une, qui passerait par exemple par Paris-Arras Tour ou le Tryptique des Monts et Châteaux. Cependant, comme beaucoup d’équipes, nous assumons toujours notre statut d'outsider du mieux possible. Ceci par respect envers l'organisateur et par attachement à notre vision du cyclisme. Il n'est pas question de rester dans les roues, de courir au marquage comme on peut hélas le voir parfois sur certaines courses du calendrier amateur français. Les grandes épreuves nous contraignent à être imaginatifs. Parce que nous risquons de ne plus être aux côtés des plus forts dans le final, à la pédale, nous devons prendre des échappées.

Ainsi, les coureurs doivent se placer en position d'acteur et croire en leurs chances pour profiter des ouvertures. Parfois, il faut un petit coup de pouce : à la Ronde de l'Isard 2016, nous ne sommes pas parvenus à prendre d'échappées, contrairement aux années précédentes.

FORMER DANS LA REGION

Bien sûr, nous sommes heureux quand nos meilleurs éléments rejoignent de grandes équipes formatrices. Mais nous devons aussi proposer une formation de base solide à nos jeunes en étant complémentaires de nos clubs et essayer de renouveler nos effectifs même quand les générations ne sont pas pléthoriques. Ce projet peut apporter une dynamique ou tout du moins permettre à certaines structures de continuer à travailler avec leurs meilleurs éléments, qui sont souvent aussi la clef pour maintenir des bénévoles ou des partenaires voir pour attirer de nouveaux licenciés.

Les coureurs sont gagnants : ils restent attachés à leur bassin géographique, peuvent effectuer leurs études ou travailler dans la région. Le Pays de La Loire au travers du Pôle de la Roche sur Yon et ses clubs de DN fonctionne quelque part sur ce modèle depuis longtemps, avec une densité plus importante.

MISER SUR LA QUALITE

Dans la région, nous sommes obligés de travailler sur un effectif limité ce qui permet de proposer un programme conséquent. En France, chacun a ses traditions et ses méthodes, notre chance est de de disposer de moyens pour y parvenir et d’avoir des bénévoles qui adhèrent au projet. Si nous devions défrayer tous nos intervenants, il nous serait impossible de mettre en place un tel calendrier : c’est une chance. C'est un projet essentiel pour permettre au cyclisme du Limousin de continuer à évoluer et à nos jeunes coureurs de progresser vers le plus haut niveau. »

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