Jean-Pierre Dubois : « Vise-t-on la formation ou les résultats ? »

Crédit photo Zoé Soullard - DirectVelo.com

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A l'instar de toute la sélection belge, les Espoirs sont repartis sans médaille de Bergen. Bjorg Lambrecht a dû se contenter d'une quinzième place. Difficile alors, de trouver des motifs de satisfaction pour le sélectionneur belge Jean-Pierre Dubois. "Le résultat n'est pas au rendez-vous mais Bjorg Lambrecht a montré qu'il était costaud et la prestation de Senne Leysen (6e du contre-la-montre) était une bonne surprise pour beaucoup de monde", souligne-t-il avant de compléter, "sauf pour moi. Je l'avais déclaré avant la course qu'il en était capable. Lors de cette saison 2017, il a prouvé qu'il pouvait lutter avec les meilleurs mondiaux. Avec un peu de chance, il est sur le podium. Il a passé un cap dans cette discipline."

Pour le reste, Nathan Van Hooydonck sur le chrono et Jasper Philipsen sur la course en ligne étaient malades. Piet Allegaert n'était pas dans un bon jour. Mais Jean-Pierre Dubois est surtout contrarié par le non-respect de la tactique de base. "La consigne était d'ouvrir les gaz à trois tours de l'arrivée pour faire exploser le peloton afin d'arriver en petit comité sur la bosse finale où Bjorg Lambrecht devait sortir à ce moment-là. Cependant, il a attaqué avant, après avoir vu Kristoffer Halvorsen en difficulté. Il était fort mais il s'est précipité", déplore-t-il.

DEPUIS DÉCEMBRE, LAMBRECHT CONNAISSAIT SON PROGRAMME

Pour expliquer cet échec, la presse flamande avançait le manque de coordination entre le sélectionneur et les directeurs sportifs des équipes. Jean-Pierre Dubois ne partage pas cette analyse. "Dès l'hiver, je prends rendez-vous avec les équipes pour parler du programme des courses et des objectifs à long terme. Bjorg Lambrecht, Steff Cras et Harm Vanhoucke savaient depuis décembre qu'ils iraient au Tour de l'Avenir. Van Hooydonck et Lambrecht, savaient déjà qu'ils seraient sélectionnés pour Bergen. Le planning a été composé en fonction de cette course. Prenons le cas de Bjorg Lambrecht. Il avait cinq objectifs cette saison, Liège-Bastogne-Liège Espoirs, la Course de la Paix, le Tour de l'Avenir, le Tour du Val d'Aoste et le Championnat du Monde. Il remporte Liège et La Paix, fait deuxième au Val d’Aoste et du Tour de l'Avenir et était l'un des plus forts à Bergen. Sur le Tour de Savoie Mont-Blanc, il termine encore deuxième du général. Le bilan est très bon. On peut encore améliorer certaines choses au niveau de la coordination car il arrive parfois que les directeurs sportifs procèdent à quelques changements sans m'en faire part, en les alignant sur des courses d'un jour. J'aimerais être au courant de tout à l'avenir", précise-t-il.

Autre reproche apparu dans la presse, la préparation des coureurs : les coureurs sont arrivés fatigués à Bergen en citant l'exemple du Tour de Moselle auquel Bjorg Lambrecht a participé avant Bergen. Le sélectionneur rappelle qu'"il y a exactement 19 jours entre la dernière étape du Tour de l'Avenir et le début des Championnats du Monde. Bjorg a roulé seulement quatre jours entre deux, le Grand Prix de Wallonie où il a montré sa classe sur une course de plus de 200 kilomètres et le Tour de Moselle en guise de préparation pour Bergen. Un coureur doit-il rester plusieurs semaines à la maison avant une grosse course ?"

DEUX MÉDAILLES ET BEAUCOUP D'ACCESSITS

Avec deux médailles en douze Championnats du Monde (l'or pour Dominique Cornu en 2006 sur le contre-la-montre et le bronze de Van Asbroeck en 2012) à la tête de l'équipe nationale Espoirs, Jean-Pierre Dubois sait qu'il n'a pas le bilan chiffré le plus imposant. Toutefois, "les prestations réalisées lors de ces rendez-vous étaient bonnesCe n'est pas comme si nous ne pesions pas sur la course. Nous avons quand même six Top 10. Nous avons souvent manqué de réussite. Une excuse facile pour certains mais avec un brin de réussite, la Belgique serait repartie avec plusieurs médailles supplémentaires. Sur un Championnat du Monde, nous sommes jugés sur le résultat, ce que je peux comprendre, mais les félicitations de la Fédération et de journalistes étaient très souvent au rendez-vous pour la prise en charge du poids de la course et les places d'honneur trop souvent au pied d’un podium amplement mérité, comme à Salzburg (5e), Mendrisio (5e), Geelong (7e), Copenhague (9e), Valkenburg (3e et 8e), Ponferrada (4e) et plus récemment à Richmond où une double chute de Van Hooydonck et De Plus a anéanti toutes nos chances de médailles"

LA COUPE DES NATIONS SOUS-MEDIATISÉE

Cependant, "le jugement sur les Espoirs doit s'effectuer sur les autres grands moments de la saison : la Coupe des Nations Espoirs et le Championnat d'Europe, où la Belgique a terminé six fois dans le Top 5 dont un succès en 2014 et deux secondes places en 2012 et 2016 sur les sept dernières éditions. Cela fait des années que la Belgique termine dans les premières places dans ce classement complètement sous-médiatisé. Les Espoirs brillent sur des courses comme le Tour des Flandres, la récente Course de la Paix et le Tour de l'Avenir. Greg Van Avermaet, Jelle Vanendert, Jasper Stuyven, Tim Wellens, Sep Vanmarcke, Jan Bakelants, Jens Keukeleire, Kris Boekmans, Sean De Bie, Laurens De Plus, Louis Vervaeke, Dylan Teuns, Tiejs Benoot, etc... ont tous brillé sur ces courses, mais cela passe totalement inaperçu aux yeux du grand public. Et au classement international par points Espoirs, notre nation est sur le podium depuis plusieurs années…"

Enfin, le sélectionneur Jean-Pierre Dubois rappelle que l'objectif principal demeure la formation de futurs champions. "Que vise-t-on ? La formation ou les résultats ? Combien de grands Espoirs se sont cassés la figure chez les pros ? Il y a beaucoup d'exemples. Quand tu es bon chez les Espoirs, cela veut dire que tu possèdes quelque chose dans les jambes, c'est indéniable mais cela ne signifie pas que tu deviennes un grand Champion. Regardez Peter Sagan qui ne termine pas le seul Championnat du Monde Espoirs auquel il participe à Mendrisio en 2009 et maintenant, il est triple Champion du Monde, par contre je me souviens de Sagan comme costaud dans un final de Championnat d’Europe à Hooglede ou à une Coupe des Nations en France la même année", conclut-il.

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