On a retrouvé : Gaël Malacarne
Coureur, Gaël Malacarne était généreux dans l'effort, toujours prêt à plier les coudes, serrer les dents et bouffer du vent. Il a cueilli chacune de ses victoires UCI avec force et panache, en solitaire. Au Tour du Haut-Anjou 2008 chez les Espoirs, à Segré (lire ici), au Circuito Montañés ou, à Dinan, sur la dernière étape du Tour de Bretagne 2010, "Malac" a gagné avec la manière.
La carrière de l'ancien coureur de Côtes d'Armor-Maitre Jacques et Bretagne-Séché Environnement s'est arrêtée fin 2013 et pas "dans les meilleures conditions", se souvient-il. A 31 ans, toujours vif et volubile, il conjugue sa passion pour la course à pieds avec sa reconversion en ouvrant un magasin de sport à Morlaix, à côté d'un autre ancien de Côtes d'Armor, Régis Geffroy.
DirectVelo : Te voici donc commerçant. Pourquoi avoir choisi d'ouvrir un magasin Endurance Shop à Morlaix et pas un magasin de cycles ?
Gaël Malacarne : A la fin de ma carrière, je ne voulais pas arrêter le sport car depuis tout petit, j'ai cette envie de me défoncer. Je me suis mis au trail et à la course à pied. Aujourd'hui, ces secteurs sont en plein essor. Je viens d'un endroit sur la côte où il y a plein de magasins de cycles, ça ne m'a pas trotté dans la tête d'en ouvrir un ailleurs. Mais Régis Geffroy, qui court toujours un peu et qui connaissait très bien la zone, a eu l'idée d'ouvrir un magasin de cycles Giant à Morlaix. Je me suis greffé au projet. Désormais, on est sous le même toit, lui avec son magasin de vélo et moi, juste à côté avec ma boutique Endurance Shop. J'ai ouvert le magasin, il y a peu, le 7 octobre.
DES CLIENTS DES L'OUVERTURE
Et ça marche ?
Oui, le retour des clients est très bon, je suis même un petit peu surpris. Quand on ouvre un nouveau magasin, on se dit que ça va mettre du temps pour que ça fonctionne mais là, dès le début, les chiffres sont satisfaisants donc c'est de bon augure pour la suite. Ça fait presque un an que l'on est sur le projet. Tout ce qui est création d'entreprise amène beaucoup de travail, de paperasse et de rendez-vous. C'est énorme. On ne se rend compte de cela qu'une fois que l'on est dedans.
Avoir été coureur professionnel, est-ce un avantage dans ton métier ?
Oui, ça m’apporte quelque chose au niveau de la relation avec le client, je suis à l'aise avec lui. Ça m'aide beaucoup pour savoir comment être avec les gens. Mais en réalité, c'est surtout le fait d'être pratiquant qui m'aide. Pour le client, la course à pied est sa passion donc cela permet des échanges. On parle de la même chose. Le client est content d'avoir quelqu'un qui comprend ce qu'il dit. Dans certains magasins, ce n'est pas forcément le cas.
« 90% DES CLIENTS NE SAVENT PAS QUI JE SUIS »
De plus, tu as une aura grâce à ta carrière ?
Avoir été sportif de haut niveau m'apporte une crédibilité mais la plupart de mes clients ne me connaissent pas et 90% des gens qui viennent au magasin ne savent pas qui je suis. Je ne leur dis pas. Tout se joue sur les compétences et la connaissance des produits.
Aujourd'hui, te prends-tu au jeu des compétitions en course à pied ?
Je fais des courses, moins avec le magasin mais quand je serai bien implanté je pourrai en faire plus. C'est juste pour le plaisir. Mes objectifs étaient avant sur le vélo donc je vois les choses différemment même si l'esprit de compétition reste présent chez moi. À terme, pourquoi ne pas faire l'Ultra Trail du Mont-Blanc ou une Diagonale des Fous. Ça peut être une belle expérience pour découvrir un autre cadre. Ce genre d'épreuves fait plus appel à la gestion de soi, c'est une course contre soi-même. Aujourd'hui, je trouve que le vélo perd un peu cet esprit.
C'est à dire ?
En trail, il n'y aucune catégorie, contrairement au vélo. C'est sur ce point que l'image du vélo en pâtit. Les catégories sont trop nombreuses. Le cyclisme n'évolue pas beaucoup et son image non plus. Dans le même temps, la course à pied prend de plus en plus d'ampleur, elle est en plein essor et évolue. Le vélo compte de moins en moins de licenciés, des organisations s'arrêtent, il a besoin d'une cure de jouvence. Enfin, ce n'est que mon avis.
« JE NE VOULAIS PAS REPARTIR CHEZ LES AMATEURS »
Aujourd'hui, quel rapport entretiens-tu avec le vélo ?
Je regarde toujours les résultats, je suis quelque peu l'actualité. C'est naturel, je regarde sans regarder : je sais automatiquement les courses qui arrivent en fonction de la période. Je fais quelques sorties à vélo de temps en temps mais je n'ai jamais voulu reprendre de licence. Je ne voulais pas repartir chez les amateurs. J'aurais pu le faire mais j'ai préféré tourner la page au niveau professionnel. Le vélo maintenant, c'est simplement pour le plaisir, j'aime bien partir rouler avec les copains.
Comment s'est passée ta fin de carrière ?
Elle ne s'est pas déroulée dans les meilleurs conditions. Il n'y a pas beaucoup de coureurs qui peuvent décider d'arrêter par eux-mêmes. Moi, ça s'est terminé le 30 novembre 2013, où nous avons été trois coureurs de l'équipe contraints d'arrêter en même temps. Le changement de Président à la tête de la formation a précipité les choses. C'est difficile d'arrêter, surtout quand ce n'est pas pour une raison physique. Si j'avais été nul et que je ne marchais pas, ça aurait pu être compréhensible mais c'était ma meilleure saison, peut-être pas en terme de résultats, mais du point de vue de mon travail pour l'équipe.
Comment as-tu vécu cette période ?
Il faut être fort psychologiquement pour passer professionnel et durer mais l'arrêt est encore plus difficile. En plus, j'ai appris vachement tard que je n'étais pas conservé par l'équipe. Ils nous faisaient poireauter, nous n'avions pas de réponse. Cette année là, cinq équipes en Europe venaient de mettre la clef sous la porte alors c'était compliqué de retrouver une place, surtout lorsqu'on apprend le 30 novembre qu'il faut chercher autre chose. Une fois qu'on tourne une page, chacun fait son truc, chacun a sa vie et tout continue.
PARIS-ROUBAIX 2013...
Quel regard portes-tu sur ta carrière ?
Je garde les bons souvenirs. Quand j'étais jeune, je voulais aller le plus haut possible. Vivre de sa passion pendant cinq ans, c'est super. Je retiens également aussi les belles courses auxquelles j'ai participé comme Paris-Roubaix et Paris-Nice. Paris-Roubaix 2013 reste mon meilleur et mon pire souvenir. Je casse ma roue arrière à 25 kilomètres de l'arrivée, là où tout est déjà figé. J'étais dans le groupe pour la 11e place. J'aurais au moins fait un Top 15 (Il se classe 40e à Roubaix NDLR).C'est un tournant dans ma carrière car j'aurais peut-être pu décrocher un contrat derrière.
Repenses-tu parfois à ta vie de coureur ?
Ça m'arrive surtout quand vient Paris-Roubaix... Ça me rappelle les souvenirs des avant-courses, je me dit toujours que j'étais là. Je suis content de l'avoir fait. Il n'y a pas de la nostalgie.