Clément Lecerf : « Cette vie-là ne m’intéresse pas »
C’était il y a un an et demi à peine : fin 2019, Clément Lecerf remportait le Challenge Morphologics DirectVelo des Juniors 1ère année. Depuis, l’Aquitain est passé par une période plus compliquée à gérer en 2020 mais il imaginait se relancer cette année, pour ses débuts chez les Espoirs, du côté du Vendée U. Il n’en a rien été, bien au contraire. Après quelques courses seulement sous la tunique de la réserve de l’équipe TotalEnergies, Clément Lecerf a décidé de quitter la Vendée et ne souhaite pas reprendre la compétition. Entretien pour DirectVelo.
DirectVelo : On ne t’a pas vu dans un classement depuis une longue période ! Que se passe-t-il ?
Clément Lecerf : J’ai d’abord passé la trêve hivernale normalement, sans aucun problème. J’étais à la Roche-sur-Yon, tranquillement. J’ai changé de cursus scolaire car mon DUT ne me plaisait pas, alors je me suis lancé dans un BTS de vente, MCO (Management Commercial Opérationnel). Côté vélo, j’ai repris ma saison à l’Essor basque puis j’ai enchaîné quelques courses en février/mars. Mais j’ai vite senti que je ne prenais pas vraiment de plaisir sur le vélo. C’était la galère. Avec mon entraîneur et le staff du Vendée U, on a pris la décision de faire une coupure d’une semaine. Pour commencer. Entre temps, j’ai passé une semaine en entreprise, dans le cadre d’un stage, et ça m’a permis de bien me vider la tête et de ne pas du tout penser au vélo. Puis je suis retourné au Manoir mais mes impressions n’avaient pas changé : je n’avais pas vraiment envie de reprendre le vélo à fond. Alors je n’ai plus été aligné sur les courses pendant un moment. On m’a laissé faire ce que je voulais à l’entraînement pendant un mois…
Et tu as fait ta ré-apparition en compétition lors de la Ronde du Lionnais, au mois de mai…
C’est la seule course que j’ai disputée depuis le mois de mars, mais j’ai arrêté au bout de deux heures. Je n’avais plus l’envie, je n’étais plus motivé. J’en avais marre, je ressentais le besoin de souffler. Je prenais beaucoup plus de plaisir en entreprise que sur le vélo. Alors j’ai pris le temps de réfléchir à la suite, en sachant que le Vendée U, c’est une équipe qui doit t’emmener vers le niveau encore au-dessus. Et j’en suis venu à la conclusion que ce n’était de toute façon pas ce dont j’avais envie, d’autant que j’étais aussi embêté par un problème physique, une endofibrose de l’artère iliaque. J’ai donc pris la décision de quitter le Vendée U et de rentrer chez moi, dans mon sud-ouest, et de bosser dans un magasin de vélo près de Toulouse.
« MA VISION DU VÉLO A UN PEU CHANGÉ »
Sur le papier, cette saison 2021 s’annonçait pourtant excitante pour toi, avec cette arrivée dans les rangs Espoirs au sein d’une réserve d’équipe professionnelle !
Oui, mais j’avais déjà eu beaucoup de mal à m’entraîner l’année passée, en J2. J’essayais de garder la motivation et je me disais justement que cette aventure au Vendée U allait me relancer. Mais pas du tout. Après ma belle saison 2019, j’attendais beaucoup de ma seconde année chez les Juniors. De nombreuses personnes m’attendaient, aussi. J’avais des exigences personnelles et celles de mon entraîneur. Je crois que ça aurait dû être une belle année pour moi, déjà, mais ça a été une année blanche ou presque, malgré un bon Championnat de France du contre-la-montre (5e, NDLR). Quelque chose s’était déjà cassé.
Parce que tu as réalisé que ce milieu ne te convenait pas ?
Oui, il y a pas mal de ça, en fait. Au début, je prenais beaucoup de plaisir sur le vélo, à l’entraînement comme en compétition. Sans jamais penser à devenir pro, j’étais loin de ça. Je ne me prenais pas la tête. Mais entre la lassitude de l’an passé et mon arrivée au Vendée U, ma vision du vélo a un peu changé.
« J’AVAIS TROP PEUR DE M’INSTALLER DANS UNE SORTE DE ROUTINE ET QUE TOUTE MA VIE NE TOURNE QU’AUTOUR DU VÉLO »
C’est-à-dire ?
Je me suis rendu compte que ce n’est pas ce que je voulais faire. Ce n’est pas une vie faite pour moi. Et je n’ai rien à reprocher au Vendée U, qui est un grand centre de formation et qui ne m’a jamais mis la moindre pression, bien au contraire. Mais on a fait des stages, beaucoup de stages… C’est une ambiance spéciale, je ne sais pas comment l’expliquer. Tout tourne autour du vélo. Alors ça peut sembler drôle à dire, mais pour moi c’était trop, en quelque sorte.
Parce que ta vie ne s’arrête pas qu’au cyclisme ?
Ce doit être ça… Quand j’étais dans le feu de l’action, lors des différents stages avec l’équipe, ça allait encore… Mais dès que je rentrais chez moi, je me rendais compte que je n’avais pris aucun plaisir pendant ce stage. En fait, je me suis projeté, et je me suis dit que si je continuais et que j’arrivais à percer, ma vie allait ressembler à ça pendant dix ou quinze ans. Sauf que cette vie-là ne m’intéresse pas. J’avais trop peur de m’installer dans une forme de routine et que toute ma vie ne tourne qu’autour du vélo. Il y a plein d’autres choses intéressantes à côté. Mais je ne suis pas du tout dégoûté du monde du vélo. D’ailleurs, je vais sûrement aller donner un coup de main au Team 31 Jolly Cycles Juniors de temps en temps sur la fin d’année, ils m’ont proposé ça… Je ferai peut-être quelques déplacements pour aider. Et je continue de suivre, au moins un peu, les résultats des copains. Je n’avais simplement pas envie de m’imposer trop de contraintes sur une longue durée. Cette vie de cycliste de haut-niveau ne m’intéresse pas.