Munich 2022 : « Un sacré puzzle » pour les sélectionneurs
Ce mercredi, au départ du chrono du Championnat d'Europe à Munich, il y avait 35 concurrents masculins et 29 chez les femmes. Un total dans la lignée du taux de participation depuis le lancement du rendez-vous continental pour les Élites en 2016. "Et parmi les coureurs au départ, ce n'était pas la crème de la crème. Heureusement que le podium reste énorme avec Stefan Bissegger, Stefan Kûng et Filippo Ganna", estime le sélectionneur néerlandais Koos Moerenhout au micro de DirectVelo.
CALENDRIER SURCHARGÉ ET LUTTE POUR LE MAINTIEN EN WORLDTOUR
L'absence de pointures s'explique assez facilement. La surcharge du calendrier complique tout. "Regardez cette semaine, il y a le Tour du Danemark et le Tour du Limousin. La Vuelta commence vendredi. La semaine dernière, les coureurs étaient encore à l'Arctic Race of Norway. Et vous avez un Championnat d'Europe en plein milieu, sans oublier les gars qui sortent du Tour de France. C'est logique que ça se ressente au niveau du plateau. Lors du Championnat du Monde, il y a peu d'épreuves en même temps", souligne Koos Moerenhout. Le sélectionneur belge Sven Vanthourentout abonde dans son sens. "Comment peux-tu demander à une équipe de libérer un coureur quatre jours avant le Tour d'Espagne ? C'est juste impensable."
Sans oublier la lutte pour le maintien en WorldTour. "Arnaud De Lie aurait fait partie de l'équipe, mais Lotto-Soudal a trop besoin de lui", explique le directeur technique de Belgian Cycling Frederik Broché. Koos Moerenhout remarque une différence de comportement des équipes en ce qui concerne le rendez-vous continental et international. "Pour le Mondial, sauf blessure ou maladie, tout le monde veut et peut y aller. Pour le Championnat d'Europe, tu commences par demander : peux-tu venir ? Et ensuite, tu fais ta sélection." Malgré cette configuration, le Néerlandais voit également du positif. "C'est l'occasion de donner une chance à d'autres coureurs, à des jeunes pour l'avenir."
Les compositions des équipes lors de la course en ligne dimanche dernier s'en sont donc ressenties. "La Grande-Bretagne n'était même pas au départ, c'est incroyable (c'était déjà le cas l'an dernier, NDLR). Il y avait de très bons sprinteurs au départ, mais les équipiers autour d'eux, c'était un peu triste à voir", déplore Sven Vanthourenhout. La Belgique n'échappe pas à la règle. "Mon équipe n'a rien à voir avec celle du Mondial et les coureurs en ont bien conscience. Il n'y en a aucun qui espère être du voyage en Australie en septembre, mais je trouve que notre équipe avait quand même une belle tronche. Nous avons de la chance d'avoir beaucoup de coureurs de qualité." Côte belge, les hommes ont pris le départ dimanche à sept au lieu de huit, victime aussi du règlement. "Trois semaines avant le Championnat, tu dois donner tes noms et trois réserves. Si un de tes gars est forfait (Yves Lampaert) et que dans les trois réserves, l'un n'est pas en forme et qu'une équipe ne met plus le coureur (Jens Keukeleire) à disposition, tu fais quoi ?".
LE CHAMPIONNAT D'EUROPE A RATÉ LE COCHE EN 2016
Le Championnat d'Europe peine donc à attirer les meilleurs coureurs. Plutôt que de "se prendre la tête", le sélectionneur français Thomas Voeckler accepte la situation. "Il y a ces paramètres à prendre en compte, tu agis en fonction et c'est comme ça." Mais il admet volontiers que l'événement a raté le coche en 2016. "Si Peter Sagan ne devient pas Champion du Monde la même année et qu'il peut rouler toute l'année avec un maillot étoilé avec un statut de super-star, ça aurait changé la perception mondiale du Championnat d'Europe. Maintenant, il est un peu noyé."
Et pourtant, le titre européen compte dans la tête des coureurs. "Arnaud Démare ne venait pas effectuer une séance de rattrapage. Il avait vraiment envie de décrocher la tunique étoilée." Hors de question de lui parler d'une sélection au rabais. Intégrer Thomas Boudat dans l'équipe qui évolue en Continental chez Go Sport-Roubaix Lille Métropole était son idée de base. "J'avais un autre coureur de WorldTeam disponible, mais j'ai pris Thomas (Boudat) car je sais ce qu'il peut apporter. Le fait qu'il roule en Conti ne change rien. Je savais qu'il était au niveau. À Plouay, en 2020, s'il n'est pas là, Arnaud Démare ne ramène jamais la médaille d'argent."
Le sélectionneur néerlandais Koos Moerenhout ne voit pas de changement à court terme. "Le calendrier est complet au niveau WorldTour. Il y a parfois plusieurs épreuves en même temps. Les filles commencent aussi à avoir un programme dense. Je crains que ça reste un sacré puzzle chaque année. Changer de date pourrait être une solution, mais où le mettre ? Il n'y a pas de place."