Paul Brousse : « Plutôt fier de ce que j'ai accompli »
Du 25 au 27 novembre, l'équipe féminine Vienne - Futuroscope effectuait son stage de rentrée. www.directvelo.com a rencontré son nouveau directeur sportif, l'ancien professionnel Paul Brousse, qui évoluait depuis deux ans et demi à l'Océane Cycle Poitevin. Il dit tout, de sa prise de fonction à un retour sur sa carrière de coureur, en passant par la préparation des athlètes. Entretien.
DirectVélo Comment s'est passé ce premier stage avec les filles ?
Paul Brousse : Il s'est très bien passé. Il y avait une bonne ambiance. Tout le monde a bien rigolé. Les filles sont arrivées le vendredi soir. Le samedi matin, staff et athlètes avons fait une petite réunion, pour se présenter aux nouveaux, pour connaître les objectifs et attentes de chacun au sein de l'équipe. L'après-midi, nous avons fait une course à pied. Je pensais qu'on allait la faire tous ensemble, en rigolant. Mais en fait, tout le monde s'est pris au jeu, et s'est fait un petit challenge en la faisant à fond. C'était plutôt sympa ! Le dimanche matin, on s'est levés aux aurores pour aller à la randonnée de Sylvain Chavanel. On a fait celle pour les marcheurs (12 km, NDLR). Et l'après-midi, on en a profité pour faire quelques-unes des attractions du Parc du Futuroscope.
Quelles sont tes premières impressions après ce stage, en tant que directeur sportif ?
Elles sont très bonnes. Tout le monde était détendu, à l'écoute. Ça s'est vraiment bien déroulé. On n'a pas eu de temps mort. Le programme était millimétré. On n'avait pas un quart d'heure de libre pour se reposer. C'était intense. On a été ensemble pendant 48h. Et ça, c'était important pour commencer à échanger, à se connaître, et souder les liens. Car ça ne se fait pas tout seul... J'étais très content, et très satisfait de ce premier week-end.
« Une reconversion qui m'a toujours fait envie »
Ça faisait longtemps que tu ambitionnais de devenir DS ?
C'est une reconversion qui m'a toujours fait envie. Surtout à partir du moment où, en 2010, j'ai choisi de commencer à y penser, et de mettre ma carrière entre parenthèses. J'avais fait le tour en tant qu'athlète. Je suis passé pro, et je n'avais plus de contrat. Donc il fallait penser à la suite. J'avais deux projets, deux objectifs. Le premier a été de créer ma propre société www.veloperformance.fr il y a presqu'un an maintenant. Et le deuxième était de devenir ensuite directeur sportif. J'ai déposé ma candidature cet été. J'ai été retenu. Et j'en suis très content !
Justement, comment se sont passés les contacts pour intégrer l'équipe ?
Les contacts on été très simples. Je connaissais très bien une partie du staff de l'équipe. Je savais que l'aventure avec Damien Pommereau se terminait. Il y a eu des candidatures spontanées comme tous les ans. J'ai déposé la mienne à la fin de l'été. Et on connaît la suite... C'est un super challenge !
« Une déception de ne pas faire le Tour du Qatar »
Quel a été le programme depuis le stage ?
Au début du mois, l'équipe a lancé son nouveau site internet www.cyclisme-vienne-futuroscope.fr Il a beaucoup de succès. On a eu de très bons retours. Le sponsor en est ravi ! Je pense même que des équipes professionnelles masculines n'ont pas la même chose, et qu'elles risquent de nous envier un peu. En plus des infos régulières sur l'équipe que l'on peut y trouver, il y a une fiche de présentation pour chacune des filles. Avec des anecdotes, ce qu'elles aiment, ce qu'elles n'aiment pas, comment elles sont venues à faire du vélo, leurs phrases préférées, leurs meilleurs et leurs moins bons moments, etc... On lit une fiche et on a l'impression de connaître la fille depuis des années ! Ensuite, ça a été relativement calme. Les filles ont recommencé à rouler tout doucement. Certaines ont préféré reprendre une activité avec d'autres disciplines, comme la course à pieds ou le VTT. Le plus gros de leur préparation est à venir...
Comment est-il planifié d'ailleurs ?
Le prochain stage se tiendra du 13 au 15 janvier, à proximité de Bordeaux. Nous irons chez un ergonome-posturologue, pour prendre les cotes de chaque fille. On ne le faisait pas les années précédentes. C'est une petite touche supplémentaire dans le professionnalisme de l'équipe. On affinera les réglages au maximum. Puis, il y aura le gros stage d'avant-saison du 4 au 11 février, au Parc du Futuroscope. Là, on travaillera plus le physique. Le point d'orgue en sera la présentation de l'équipe le samedi 11. Notre rentrée se fera fin février, au Het Nieuwsblad. Sauf pour Audrey Cordon, et Pascale Jeuland. Elles ont été sélectionnées en équipe de France pour disputer le Tour du Qatar. Tout comme notre recrue australienne Carlee Taylor, qui fera la course avec son équipe nationale. Notre but, en Belgique, sera de bien figurer d'entrée. C'est une course particulière. Certaines filles de l'équipe ont l'habitude de la faire. Mais elle ne leur a jamais vraiment réussi...
Le Tour du Qatar, vous espériez le disputer... N'est-ce pas une petite déception de ne pas avoir été retenus ?
Oui, c'est une déception. J'ai eu Thierry Gouvenou (l'organisateur de la course, NDLR) au téléphone. Il m'a dit que cette année, c'était plus restreint au niveau des équipes. En plus, le Qatar impose des équipes asiatiques. C'est donc très, très difficile d'y participer. Mais on va essayer de le faire un jour ! La déception a vite été oubliée... Pour nous, le gros objectif de la saison sera le Tour d'Italie... Depuis la disparition de la Grande boucle féminine, c'est la plus grande course cycliste pour les femmes. Et on espère être au départ cette année !
« Faire du vélo en amateur, ça devenait aléatoire et compliqué »
À titre personnel, penses-tu avoir déjà tourné la page de ta carrière de coureur ?
Oui, elle est tournée. Parfois on me dit que je suis jeune (il a 28 ans depuis ce mercredi, NDLR), que j'aurais pu continuer... Mais faire du vélo en amateur, ça devenait aléatoire, et compliqué. Il fallait que j'assure mes arrières. J'avais créer mon entreprise. Elle commence à bien marcher, donc je suis content de ça aussi. Je suis aussi père de famille depuis bientôt deux ans. Maintenant, je ne veux plus de l' "égoïsme pur", à penser qu'à soi-même. Et dans l'organisation de ces projets, il y a ceux de la famille : une maison, ma fille... On va dire que ça tombait à point nommé d'avoir cette assurance d'un travail à plein temps. Et en plus, sur plusieurs années... C'est sûr que j'ai encore envie de pédaler, de me faire un peu mal. Mais je le vois différemment maintenant. Je me suis mis à faire de la course à pied. Où j'ai encore le goût de l'effort puisque je le fais à fond. Et pédaler, je le fais comme avant, comme j'aimais. J'y vais deux-trois fois par semaine avec les copains. C'est moins long. Une heure, une heure et demie. Mais ça suffit à mon bonheur !
Dans quel état d'esprit étais-tu après ton ultime course, la dernière étape du Tour de la Réunion ?
C'était un peu bizarre. Parce que c'est une course dans les îles. On n'a pas les mêmes repères qu'en temps normal. Mais j'avais quand même un sentiment de fierté d'avoir réalisé mon rêve de gamin sur un vélo, de passer pro. J'en avais un autre qui était de faire un grand Tour. Mais je n'en avais pas les qualités, et les capacités. J'ai fait mon petit bout de chemin. Et je pense que je suis allé au bout de la chose.
« En 2004 et 2005, c'était vraiment un plaisir »
Que retiens-tu de ta carrière de coureur ?
Je me rappellerai toujours de ma première sélection en équipe de France chez les Juniors. C'était en juin 2001, sur le Trofeo Karlsberg, en Allemagne. Ce maillot me faisait rêver. Pour moi, l'équipe de France, ça voulait dire beaucoup. C'est un fait marquant dans ma carrière. Ça m'a donné de la confiance pour la suite. De 1999 à 2002, j'étais au Pôle Espoirs de Poitiers, avec Thierry Gault, le responsable de la structure, et qui est Conseiller Technique Régional du Poitou-Charentes depuis presque quinze ans. C'est là que j'ai vraiment compris les premières bases au niveau entraînement et diététique. C'étaient les prémices du cyclisme sérieux. C'est là que j'ai commencé à faire ça à fond. En plus, le CREPS de Poitiers est un cadre très sympa, où il fait bon vivre. Après, il y a eu de très belles années à l'UC Châteauroux. Dont cette superbe année 2005, avec Benoît Sinner, Jean-Marc Marino, Julien Schick, et Sébastien Portal. En 2004 et 2005, c'était vraiment un plaisir. C'était que de la rigolade, et en plus, on marchait tous très bien. Tout allait dans le bon sens. Notre directeur sportif, Nicolas Dubois, dirigeait superbement l'équipe. Il nous laissait rigoler, et on était sérieux à la fois. Et les résultats payaient !
Tu es passé professionnel en 2007 à Roubaix-Lille Métropole...
Là, je suis entré dans un monde un peu plus carré, plus professionnel. Avec des personnes comme Cyrille Guimard, pour qui j'ai beaucoup de respect, et avec qui j'ai encore des contacts. Un autre fait marquant dans ma carrière, c'est quand je passe pro, le 1er janvier 2007. C'était mon rêve de gamin qui se réalisait. Ça n'a pas duré très longtemps, deux ans et demi...
« Pas vraiment de regrets »
Il y a eu un passage chez A-Style...
Oui ensuite, je suis allé en Italie pendant dix-huit mois (chez A-Style - Somn, puis CarmioOro - A-Style, NDLR). Comme à Roubaix, j'ai eu de très bonnes relations. J'ai appris une culture, et une langue étrangère. J'ai fait des courses à l'étranger, avec Jean-Philippe Duracka comme directeur sportif. C'est quelqu'un qui a aussi beaucoup compté pour moi.
En cours de saison 2009, tu es revenu au Cycle Poitevin...
Oui, je suis revenu au Cycle Poitevin, mon club d'enfance. J'y ai pris le vélo différemment, plus pour le plaisir.
As-tu des regrets ? Comme ne pas avoir fait de grand Tour, comme tu le disais tout à l'heure...
Ne pas avoir fait de grand Tour n'en est pas vraiment un. Je n'ai pas été dans une équipe qui pouvait y participer. Ça veut dire que je n'en avais pas les qualités. Je ne peux pas forcément parler de regret. C'est un truc que j’aurais aimé faire, qui faisait parti de mes objectifs. Je n'ai pas pu. C'est comme ça... Sinon, je n'en ai pas vraiment. Je suis plutôt fier de ce que j'ai accompli durant toutes ces années.
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Crédit Photo : Florian Delage - www.cyclisme-vienne-futuroscope.fr