Evita Muzic : « Je devais surprendre »
On l’attendait dans la dernière ascension de la journée, et c’est finalement lors du sprint final qu’elle a fait la différence. Maligne et opportuniste, Évita Muzic a décroché le titre de Championne de France Élites, à 22 ans (voir classement). DirectVelo était présent à la conférence de presse de la Franc-Comtoise, qui ramène le maillot tricolore au sein de la maison FDJ-Nouvelle Aquitaine-Futuroscope.
DirectVelo : Tu es Championne de France Élite ! Que ressens-tu ?
Evita Muzic : C’est quelque chose d’exceptionnel, ça s’est sûr ! On ne sait même pas si ça va arriver plusieurs fois dans une vie. Je m’étais mis un petit peu de pression car je savais que le circuit était plus à ma convenance que d’habitude. Par le passé, il m’est arrivé d’avoir du mal à gérer cette pression-là sur des courses d’un jour mais cette fois-ci, je pense avoir fait une bonne course tactiquement. On a fait une belle course d’équipe, c’était parfait pour moi. Mais sur la fin de course, j’ai commencé à avoir un petit coup de moins bien physiquement. J’ai pris un coup derrière la tête dans la dernière montée car j’espérais y attaquer et finalement, j’ai lâché… Je me suis dit que c’était fini. Puis c’est rentré. Je me suis dit que c’était encore possible, que c’est un Championnat… Le dernier kilomètre ressemblait à celui de l’étape que j’ai gagnée sur le Tour d’Italie l’an passé.
Tactiquement, tu as parfaitement joué le coup en lançant le sprint de derrière et en piégeant tes adversaires…
J’ai joué sur le fait que l’on soit plusieurs de l’équipe devant pour rester à l’arrière du groupe. Je savais que je n’étais pas la plus rapide au sprint, en vitesse pure, alors il fallait que je parte de derrière et que je surprenne tout le monde. J’ai vu une ouverture sur la gauche, j’y suis allée en me disant qu’il fallait que je donne tout jusqu’à la ligne. J'ai commencé à mettre les mains en bas puis je me suis dit : « Non, tu n'as jamais mis les mains en bas », même si on me fait parfois la remarque. Mais je préfère être à l'aise. Je devais surprendre.
Et tu l’as fait en prenant rapidement plusieurs longueurs d’avance !
J'étais dans la roue d'Audrey (Cordon-Ragot) et je savais que c'était une des deux plus rapides. Mais un sprint en faux-plat montant allait aussi se jouer dans la tête. C'est passé de peu mais c'est passé. J'ai commencé à lever les bras et je me suis dit : « oh non ce n'est pas possible ! ». J'ai vu les autres filles au moment où ma roue a passé la ligne, je me suis dit que c'était la malédiction, en ce moment, avec toutes les photos finish. Dans ma tête, comme je suis quelqu’un d’assez pessimiste, je pensais avoir fait 2e. J'étais déçue en passant la ligne de passer potentiellement si près. J'ai voulu attendre la vraie officialisation.
« J’AI ESSAYÉ DE ME REMOBILISER »
L’équipe a toujours été en surnombre ce samedi après-midi…
Initialement, je comptais prendre un coup d’avance, c’est ce que j’avais dit au briefing. Mais on m’a demandé d’attendre un petit peu plus. Pauline (Ferrand-Prévot) a vite durci la course, ce qui m’a avantagée. Puis j’ai essayé de contrer pour voir qui était bien ou non. Sans surprise, Juliette (Labous), Audrey (Cordon-Ragot) et Gladys (Verhulst) étaient là. C’était bien pour Gladys et moi car dans le contre, nous n’avions pas à rouler comme on avait des filles devant.
Mais tu t’es donc fait peur dans le final…
Je n’étais pas super bien alors j’ai dit à Victorie (Guilman) d’essayer quelque chose et finalement, c’est quand elle a attaqué que je me suis retrouvée lâchée (sourire). Il valait mieux tenter quand même car on n’était pas forcément les meilleures au sprint. Puis j’ai pu rentrer et j’ai essayé de me remobiliser. J’ai eu le temps d’imaginer que Marie (Le Net) allait faire le sprint puis quand je l’ai vue tenter le coup du kilomètre, je me suis dit qu’il n’allait rester plus que moi (rires). J’avais tout le poids de l’équipe sur les épaules alors j’ai tout donné pour ne pas avoir de regrets, il fallait que j’essaie de faire de mon mieux.
Il y a eu beaucoup de marquage dans le dernier tour de circuit, notamment avec Audrey Cordon-Ragot !
Je savais que c'était la fille à battre et qu’elle était attendue. Qui court parfaitement. Je craignais surtout l’aspect stratégique. Là, j’étais un peu moins bien en fin de course contrairement à d'habitude. Il y a aussi d'autres filles fortes, il n'y a pas qu'Audrey dans le peloton. Beaucoup de filles ont du niveau.
« JE CROIS QUE JE NE RÉALISE PAS ENCORE »
Cette victoire, ajoutée à celle sur le Tour d’Italie acquise l’an passé, peut-elle te permettre de prendre davantage confiance en toi ?
C’est vrai que ça me confirme le fait qu’il faut que j’ai confiance en moi. J’ai toujours tendance à penser que les autres sont un peu meilleures que moi et je perds mon sang-froid. Mais depuis quelques années, je sais que je suis capable de faire de belles performances à l’international.
Tu vas maintenant porter le maillot tricolore pendant un an !
Je crois que je ne réalise pas encore ! Je vais directement le porter, pour la première fois, sur la Course by le Tour, puis lors du Giro. Ça va être quelque chose d’énorme. Je vais en profiter chaque jour et essayer de faire honneur à ce beau maillot.
Comme ta coéquipière Jade Wiel il y a deux ans, te voilà Championne de France très jeune !
C’est vrai qu’il y a pas mal de jeunes dans l’équipe, avec des étrangères de haut niveau. On a vite été mises sur de grandes courses internationales. Au début, on a pris quelques claques mais c’est comme ça que l’on progresse. Ça nous a tirées vers le haut.