Pierre Barbier : « Il ne manquait personne, c’était émouvant »
Après ses deux victoires d’étapes au Tour de Sharjah en janvier, Pierre Barbier a ouvert son compteur en Europe le week-end dernier en remportant le classement général de la Ronde de l’Oise ainsi que les deux dernières étapes (voir classements). Le Picard de 26 ans a ainsi obtenu ses premiers succès sur des épreuves UCI françaises, lui qui évoluait à domicile sur les routes de l’Oise et devant tous ses proches le dimanche à Beauvais. Le sociétaire de Philippe Wagner-Bazin revient pour DirectVelo sur ces moments forts ainsi que sur sa première partie de saison.
DirectVelo : Tu t'es imposé chez toi sur la Ronde de l’Oise !
Pierre Barbier : C’est vraiment un des meilleurs moments de ma carrière. Dans la famille, on est tous originaires de l’Oise, c’est un truc de fou. Je n’étais venu qu’une fois sur cette course, en 2018. Je n’y étais jamais retourné car les équipes où j’étais n’y participaient pas. Cette année, l’occasion s’est présentée. Je m’étais mis en tête de pourquoi pas essayer de viser le général. J’avais repéré les étapes, mais sur les Classe 2 on peut vite se faire avoir. Lors des deux premières étapes, on a mis du temps à se mettre en place pour le sprint. On voulait trop bien faire, je lançais de trop loin. Durant la troisième étape, j’ai pris une bonification, ça m’a permis de devenir leader virtuel. Pour le sprint, on est arrivé de derrière avec Rudy. Je lui ai dit de faire son sprint comme ça on était sûr de partir beaucoup plus proche de la ligne. Je me suis mis dans sa roue, il a lancé aux 300 mètres j’ai lancé aux 150, c’était plus compliqué de nous dépasser. C’était parfait et j’ai récupéré le maillot de leader. Le dernier jour, on l’a abordé le couteau entre les dents.
Comment s’est déroulée cette dernière journée ?
Avant le départ, les commissaires étaient venus nous dire que le final était un peu dangereux et que les temps étaient gelés aux 3 kilomètres. On s’est fait attaquer durant toute la première partie de course, puis on a repris l’échappée de quatre éléments à 15 kilomètres de l’arrivée. Jusqu’aux 3 bornes, tout le monde jouait son va-tout vu que les temps étaient gelés. Aux 3 kilomètres, je n’avais plus d’équipiers. Juste après, il y avait une petite bosse, ça a attaqué, j’ai suivi, je me suis mis à fond. Puis, j’ai essayé de faire le sprint tout seul, je ne m’attendais pas du tout à encore lever les bras.
« UNE LIBÉRATION »
Tu avais quand même l’avantage du terrain…
Je connaissais par cœur cette dernière étape et notamment le final, je savais qu’il était très technique. Je pouvais surprendre tout le monde et avoir un coup d’avance d’autant plus que c’était une arrivée sèche, sans circuit. J’étais 3e et j’ai passé les deux premiers juste avant la courbe aux 300 mètres. Je l’ai prise à pleine vitesse et je n’ai plus été rejoint. Comme c’était à 20 minutes de la maison et vu que j’avais pris le maillot la veille, tous mes proches s’étaient passés le mot pour venir me voir à l’arrivée et à la cérémonie protocolaire. Il y avait vraiment tout le monde, il ne manquait personne, c’était émouvant. Ça a été une libération après cette journée difficile.
Tu n’avais plus gagné depuis le Tour de Sharjah en janvier. Comment as-tu vécu cette première partie de saison ?
J’ai obtenu des places d’honneur en Belgique notamment (voir sa fiche DirectVelo). Ce sont des courses qui me correspondent, j’aime bien la mentalité là-bas. J’aurais aimé effectuer de beaux Circuit des Ardennes et Tour de Bretagne. Mais je me suis cassé le sternum sur la première étape des Ardennes. Je n’ai pas couru pendant un mois. J’ai eu une semaine complète sans vélo, ça m’a fait perdre du temps et du niveau. Il a fallu que je me réentraine et que j’aille réaliser un stage perso.
Est-ce pour cette raison que tu n’as pas trop pu te distinguer aux 4 Jours de Dunkerque ?
Non, physiquement, je n’étais pas trop mal, je me sentais plutôt bien. Le premier jour, j’ai chuté avec Arnaud Démare aux 3 kilomètres et je n’ai pas pu disputer le sprint. Lors de la deuxième étape, j’ai crevé aux 10 bornes. J’avais reconnu ces deux premières étapes, sur le papier, ce sont celles qui me correspondaient le plus, ça m’a mis un coup. Sur deux autres sprints, j’ai pu terminer 6e et 7e, mais ce n’est pas du tout ce que j’attendais car j’y allais pour gagner. Mais je n’étais pas trop abattu car physiquement, ça allait.
« MA DERNIÈRE DE CHANCE DE PERFORMER LORS DE CETTE PREMIÈRE PARTIE DE SAISON »
Ta prochaine épreuve sera justement une autre ProSeries, le Tour de Belgique, où tu vas pouvoir arriver avec le moral gonflé à bloc après tes succès à la Ronde de l’Oise !
C’est un grand rendez-vous, c’est en quelque sorte les 4 Jours de Dunkerque de la Belgique. Je ne m’y suis pas rendu depuis un bail (2019 où il avait fini 2e de la dernière étape, NDLR). Je l’aborde hyper motivé et serein. J’y vais sans complexes, je sors d’une belle semaine. Il y aura du beau monde, ce serait bien de refaire de bons résultats.
Comment vas-tu te préparer d’ici le début de l’épreuve, le 12 juin ?
Déjà, je ne serai pas entre-temps à Dwaars door het Hageland. Comme c’est un peu le Tro Bro Leon en Belgique, la direction m’a demandé il y a deux jours de faire l’impasse pour ne pas prendre de risques comme le Tour de Belgique est un gros objectif. Je vais essayer de garder au moins la même condition. Je vais rouler sur le vélo de chrono comme il y a un contre-la-montre de 12 kilomètres le premier jour afin d’être bien posé et ne pas avoir les jambes broyées le lendemain. Je vais aussi refaire une longue sortie en prévision du Championnat de France où je n’aurai pas d’attentes spécifiques. Le Tour de Belgique est vraiment ma dernière chance de performer lors de cette première partie de saison.
Et tu pourras encore compter sur ton frère Rudy comme c’est le cas sur toutes les courses depuis le début de l’année !
Ça s’est fait naturellement (lire ici). On effectue tous les déplacements ensemble et on s’entraîne tous les jours tous les deux. Il habite à 5 bornes de chez moi. Mon père a un scooter. Sur toutes nos séances de sprints, mon père simule un train de peloton. Puis, Rudy accélère avec moi dans la roue et je refais mon sprint derrière. Il a toujours été mon poisson-pilote sauf sur une étape du Tour de la Provence où j’ai été gêné par une chute. En course, l’alchimie s’améliore au fur et à mesure. Je sais qui j’ai à suivre, je lui fais confiance. C’est un gain d’énergie au niveau de la concentration, de l’appréhension et tout simplement de l’effort. Je n’ai pas à pointer un autre train ou un autre sprinteur.