Xavier Jan : « Cela équivaut à signer un chèque en blanc »

Crédit photo Michaël Gilson - DirectVelo

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La Ligue Nationale du Cyclisme n'a pas vraiment apprécié l'annonce de la création des nouvelles Continentales Fédérales par la FFC et l'a fait savoir dans un communiqué publié samedi (lire ici). La raison de ce courroux est la répartition des compétences entre les deux organes. Par la convention signée entre les deux parties, le cyclisme pro, c'est la Ligue, le cyclisme amateur, c'est la FFC. La Ligue redoute les conséquences de voir ses "Continentales professionnelles" réunies dans le même panier que les Conti Fédérales avec des coureurs de DN1 aux yeux de l'UCI. La fédération internationale ne demande pas dans son règlement que les coureurs des groupes sportifs de troisième division soient tous salariés. Si la FFC a fait une concession à la Ligue en interdisant les Classe 1 du calendrier français à ces nouvelles équipes, la LNC redoute que cet engagement ne dure pas dans le temps et soit à la merci d'un vote ultérieur, comme l'explique Xavier Jan, Président de la LNC, à DirectVelo.

DirectVelo : Depuis quand la Ligue était-elle au courant de ce projet ?
Xavier Jan : Le premier contact s'est effectué en janvier. Le Président de la fédération m'a fait part de ses intentions. J'ai d'emblée affiché une position qui n'était pas favorable. Pour autant, je l'ai invité à venir exprimer la problématique en Conseil d'administration de la Ligue au mois de février. Puis nous avons eu deux réunions, une avec les managers des équipes Continentales professionnelles françaises et une autre réunion avec les DN1. On a pu exprimer aux uns et aux autres notre désaccord, notre vision. Pour nous, cela équivaut à signer un chèque en blanc à la fédération, vis-à-vis du futur. Sans pour autant, de l'aveu même de son président, nous garantir à moyen ou long terme, un certain nombre de choses. C'est pour cela que nous avons exprimé notre désaccord tout en affirmant notre volonté de poursuivre le dialogue et d'essayer de trouver d'autres solutions pour prendre en considération une problématique des équipes DN1 qu'on ne nie pas. Ce choix porte atteinte au cyclisme professionnel français, le menace même, vis-à-vis de son calendrier des équipes existantes pour des motifs qu'on a exprimé dans le communiqué. Pour autant, il n'apporte pas de solution. C'est clair et net qu'on va s'opposer à la mise en place de ce dispositif qui vient empiéter sur nos prérogatives car la gestion des équipes continentales, telle qu'elle est prévue par la convention entre la FFC et la LNC, revient à la Ligue.  

« C’EST D’AUTANT PLUS SURPRENANT »

La Ligue reste-t-elle sur son projet de limiter à dix le nombre d'équipes pros françaises (lire ici) ?
Oui, ce dossier est toujours d'actualité. Il y a eu des modifications réglementaires. C'est d'autant plus surprenant cette initiative de la fédération puisque ces modifications réglementaires ont fait l'objet d'un travail de concertation de 18 mois. Au cours d'une dizaine de réunions, la DTN et des élus de la fédération étaient présents à chaque fois. L'objet de ce travail était la construction d'une solution pour l'accès au statut professionnel des Continentales et à aucun moment cette problématique (des Conti fédérales, NDLR) n'a été abordée par la fédération. Venir quelques mois après mettre sur la table cette problématique est surprenant et la méthode est surprenante puisque d'entrée de jeu, on nous dit : "voilà la problématique, voilà la solution". On aurait préféré trouver une solution co-construite, sous l'égide de la fédération puisqu'on est dans le monde amateur. Nous revendiquons des prérogatives (du cyclisme pro, NDLR), ne nions pas celles de la fédération. 

Que redoutez-vous ?
Créer ces équipes Continentales fédérales revient à inscrire dans la même catégorie auprès de l'UCI les équipes Continentales professionnelles et les équipes Continentales fédérales, donc avec les mêmes droits. La fédération ne peut pas nous apporter des garanties à long terme. Elle s'engage à très court terme par rapport à la participation au calendrier professionnel (pas de Classe 1, NDLR). Mais elle n'est pas capable de nous garantir à long terme le maintien de ce règlement. D'autre part, ça crée une iniquité vis à vis de nos équipes Continentales professionnelles (celles de troisième division mondiale, NDLR) qui sont soumises à un cahier des charges très strict et qui se retrouvent dans la même catégorie que des équipes amateurs. Pour nous, ce n'est pas conforme à la convention. 

« LES DN N’ONT PAS TOUTES LA MÊME VISION »

Cette iniquité, les équipes Continentales françaises la rencontrent déjà quand elles courent face à des Conti étrangères qui n'ont pas le même cahier des charges...
Pour autant, elles ont la garantie d'une participation au calendrier français. Aujourd'hui, la fédération n'est pas capable de garantir à très long terme l'interdiction des Classe 1 en France aux Conti fédérales. C'est un règlement fédéral et si demain, la fédération change d'avis avec un autre Président, un autre Bureau exécutif, nous serons dans une situation où nous ne pourrons plus revenir en arrière. On préfère évoluer pas à pas. Mais puisque ça touche au cyclisme professionnel et que nous avons cette subdélégation, nous entendons la faire respecter. 

Comprends-tu malgré tout que les clubs amateurs veulent trouver un solution assez vite quand ils entendent les Juniors dire qu'ils préfèrent passer tout de suite en Conti ?
Il faut aller voir tous les clubs. Pour avoir aussi eu des échanges avec des DN, elles n'ont apparemment pas toutes la même vision des choses et pour elles, ce n'est pas la solution. Nous avons discuté avec elles de façon très cordiale, on a entendu des choses, on a exprimé d'autres choses.  

« UNE LIGNE ROUGE QU’ON N’EST PAS PRÊT À ACCEPTER »

Quelles sont ces autres propositions ?
Nous avons proposé d'avoir un classement des DN qui garantisse aux meilleures d'entres elles d'avoir un accès au calendrier de Classe 2 puisque c'est d'abord leur demande. Ce sont des choses envisageables et adaptables mais il faut réfléchir. Mais nous ne voulons pas du projet d'aujourd'hui tel qu'il est présenté. 

Dans l'autre sens, cette année Van Rysel-Roubaix a préparé le Championnat de France en Elite Nationale, au Tour du Beaujolais et au Tour Nivernais Morvan. L'an dernier, pendant les problèmes financiers de l'équipe, les coureurs ont disputé plusieurs Elite Nationale...
Si demain, on considère que leur place n'est pas dans ces compétitions, on est prêt à l'entendre aussi. Mais de l'autre côté, il y a une ligne rouge qu'on n'est pas prêt à accepter.

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