La Grande Interview : Les meilleurs moments
Depuis le début de l'année, chaque jeudi vous avez rendez-vous avec la Grande Interview consacrée à un coureur ou à un directeur sportif du peloton amateur.
Alors que la saison routière tire à sa fin, c'est le bon moment pour donner un coup d’œil dans le rétro et retrouver sept extraits des Grandes Interviews de cette année. Retrouvez donc des extraits des interviews de Jimmy Casper (DS du CC Nogent-sur-Oise), Kévin Ledanois (CC Nogent-sur-Oise), Julien Bernard (SCO Dijon), Jérémy Leveau (VC Rouen 76), Julien Tomasi (VC Unité Schwenheim), Julien Liponne (Bourg-en-Bresse Ain Cyclisme) et Régis Auclair (DS du Team Vulco Vaulx-en-Velin)
Jimmy Casper -17 avril 2014- (Lire ici)
DirectVelo : Tu continues d'encadrer les plus jeunes à l'Avenir Cycliste de Montdidier. D'où te vient cet intérêt pour les débutants ?
Je suis licencié au CC Nogent, mais Montdidier reste mon club de cœur. C'est lui qui m'a permis de faire du vélo, et donc de devenir quelqu'un. Aujourd'hui, je veux lui rendre ce qu'il m'a donné. Depuis un an et demi, je me rends disponible le mercredi après-midi. Preuve que les choses ne vont pas trop mal, l'école de cyclisme est passée de sept à dix-huit gamins en l'espace d'un an. J'essaie de leur inculquer des valeurs de cohésion, de partage et d'effort. J'aimerais que l'un d'eux me dise un jour qu'il a réussi sa vie professionnelle et personnelle grâce aux valeurs que je lui ai transmises.
Tes deux enfants ont d'ailleurs rejoint l'école de cyclisme...
Oui, tous les deux ! Mon fils est inscrit en Minime 1, ma fille en Poussin première année. C'est drôle, parce que je ne les ai pas poussés vers le vélo. Ils font ce qu'ils veulent et quel que soit le sport qu'ils auraient choisi, je les aurais encouragés. Sauf pour le foot... Je suis la volonté de mes enfants. S'ils ne veulent pas aller sur les courses, c'est leur choix. Par contre, j'insiste pour qu'ils s'impliquent quand ils y vont. Pas question de fumer la pipe dans le peloton ! Je ne suis pas tout à fait d'accord avec Coubertin (le créateur des Jeux olympiques modernes en 1896, resté célèbre pour la formule « L'essentiel, c'est de participer », NDLR). Pour moi, l'essentiel est de gagner. Ou plutôt, la priorité est de se faire plaisir. Mais quand on gagne, on se fait plaisir !
Tu avais cet état d'esprit comme coureur également ?
Oui ! Un jour, j'ai dit que je n'aimais pas l'entraînement. On a mal interprété mon propos, en déduisant que j'étais un feignant. Mais je voulais dire que la compétition comptait avant tout ! C'est là que je trouvais du plaisir. Je ne m'entraînais que pour courir, je ne courais que pour gagner. Et pour gagner au niveau des pros, il faut s'entraîner dur...
Kévin Ledanois -10 juillet 2014- (Lire ici)
Tu as baigné dans le cyclisme depuis tout petit.
C’est sûr qu’avec mon papa qui était coureur cycliste [professionnel de 1989 à 2001], je ne pouvais pas échapper au virus du vélo ! Ce n’est pourtant pas le premier sport que j’ai pratiqué, puisque j’ai commencé par le football. Mais c’était plus parce que mon père ne voulait pas que je commence le vélo trop tôt.
Tu as été interdit de vélo plus jeune ?
Oui et non ! (rires) Disons que mon père a fait en sorte de retarder l’échéance. Je n’ai commencé le cyclisme qu’à 13 ou 14 ans, dans un petit club à côté de chez moi, à Saint-Jean de Monts, en Vendée, là où avait lieu la dernière manche du Challenge National de cyclo-cross en 2011. Mon père voulait m’éviter de saturer trop tôt, c'était une façon de me « protéger ». Aujourd’hui, quand je vois le nombre de coureurs qui ont commencé le vélo jeunes et qui ont obtenu des résultats jeunes, je me rends compte que très peu d'entre eux sont encore dans le peloton aujourd’hui... Soit ils ont baissé de régime et ne font plus du vélo une priorité, soit ils ont tout simplement arrêté et sont passés à autre chose. Avec du recul, je suis content que mon papa m’ait freiné.
Julien Bernard -11 septembre 2014- (Lire ici)
Ton père, il te conseille aussi sur ta pratique du vélo ?
Oui, toujours ! Pas plus tard qu’aux 4 Jours des As, je l’ai appelé pour parler de la course. Lui, il sait ce que c’est que de porter un maillot de leader [Julien Bernard avait pris la tête du classement général après la deuxième journée de course pour la conserver jusqu'au bout, NDLR]. Il connaît la pression qui pèse sur les épaules du leader.
Sur cette course, tu as témoigné beaucoup de sang froid. Ton tempérament très calme, c'est une force ?
J’essaie d’analyser les choses, de prendre du recul. Ce n’est pas moi qui fais le plus de bruit dans un groupe. J’aime bien rester discret, mais sans être à l’écart non plus. Il m’arrive même de canaliser le trop plein d’énergie de certains copains (sourires). Je ne suis pas le plus grand déconneur de la bande, mais je prends beaucoup de plaisir au SCO Dijon. Les gars sont, non pas des coéquipiers, mais des copains. Quand je les ai vus se sacrifier à 200% pour moi aux 4 jours des As, ça m’a fait tellement plaisir !
Jérémy Leveau -28 août 2014- (Lire ici)
Comment se traduit ce manque de confiance ?
Je doute très souvent de mes capacités. Quand je vois certains parcours de courses, je me fixe très rapidement des barrières, en me persuadant que c’est trop dur pour moi, que je n’arriverai jamais à suivre les meilleurs. Je n’ose pas trop attaquer de loin ou partir seul non plus, car je me dis que je ne vais jamais arriver à aller au bout.
Avec ta pointe de vitesse, tu n’as pas forcément besoin d’attaquer...
Ce n’est pas faux, mais je préfère quand même une arrivée à 20-30 coureurs plutôt qu’un véritable sprint massif. Je ne sais pas à quoi cela est dû, je pense que je serai capable d’être le plus rapide même lorsqu’il reste 100 coureurs dans le peloton, ce n’est pas la vitesse qui me manque... (Il s’interrompt). Enfin, je ne sais pas ! Encore une fois, je doute ! (rires) Quoi qu’il en soit, depuis ma chute au Tour de Normandie, en plein sprint massif, j’ai plus de réticence a aller me frotter aux autres sprinters. Au fond, comme je suis un coureur qui passe plutôt bien les bosses, je suis plus dans le registre du puncheur-sprinter que sprinter-puncheur !
Ce manque de confiance en toi, il remonte à quand ?
Depuis tout petit, depuis le début en fait ! Lors de mes premières courses, j’étais nul et je n’arrivais jamais à terminer dans le peloton. J’ai eu une croissance tardive, ce qui a un rôle important dans les catégories d’âge. Je n’ai jamais fait partie des meilleurs de ma génération. Je terminais souvent au fond des classements ! J’arrive certainement un peu plus tard que d’autres à un niveau intéressant. Du coup, je me considère encore aujourd'hui en dessous de ceux qui m’étaient supérieur depuis tout petit.
Julien Tomasi -24 juillet 2014- (Lire ici)
Le niveau sportif se développe dans ta région !
Jusqu'à présent, nous étions les derniers de la classe ! Que cela soit chez les plus jeunes, les Juniors ou les Elites. Mais nous sommes sur la voie du progrès avec la création cet hiver de trois clubs de DN3 [VC Eckwersheim, VC Unité Schwenheim et VC Sainte-Croix-en-Plaine, NDLR]. Il y a ainsi plus de coureurs de première catégorie, donc plus de courses. Les années précédentes, il pouvait se passer quatre ou cinq week-ends d'affilée sans la moindre compétition dans le coin. C’était décourageant et la plupart du peloton arrêtait sa saison aux beaux jours, préférant passer le week end autour d’un bon barbecue avec les amis, moi le premier ! Cette année, j’ai la chance de pouvoir courir toute les semaines proche de la maison. En Alsace, il existe désormais une vraie émulation !
Julien Liponne -14 août 2014- (Lire ici)
Est-ce que, à l'image d'un coureur de 20 ans qui consacre son temps au cyclisme, tu cherches à passer professionnel ?
Oui, ce serait super. Mes résultats sur les courses 2.2 cette année montrent que j'ai le niveau pour être dans le peloton pro. J'ai donc écrit à quelques équipes, mais sans retour pour le moment. J'y crois encore pour 2015. Sinon, je resterai une saison de plus avec Bourg-en-Bresse Ain Cyclisme.
Si cet objectif ne se concrétise pas, alors tu retourneras à ton métier d'ingénieur ?
Oui, sauf si je gagne au loto (rires) ! Plus sérieusement, je ne sais pas comment je concilierais le cyclisme et mon emploi car, après avoir goûté aux possibilités de faire du sport à haut niveau, il sera certainement difficile de s'entraîner de nouveau le soir... Quoi qu'il en soit, je prends mes deux années de cyclisme comme un immense plaisir. Je fais les plus belles épreuves du calendrier amateur dans de belles conditions, je roule avec une équipe qui tient la route et qui a un très bon état d'esprit, et enfin je peux glaner ci et là des résultats. Quelle expérience ! Si je peux me permettre de vivre de ma passion, je le fais à fond. Aujourd'hui, je profite... Après tout, on n'a qu'une vie !
Régis Auclair -30 janvier 2014- (Lire ici)
Ce feu sacré du vélo qui brûle en toi, qu'est-ce qui l'a allumé ?
J'allais sur des critériums professionnels avec mon père, mes oncles et cousins. Nous vivions dans une terre imprégnée de cyclisme, on sentait un engouement populaire qui venait des profondeurs. Il y avait beaucoup de "masses" dans ce sport. Un jour, Roger Pingeon m'a signé un autographe à La Clayette, en Saône-et-Loire. C'était en 1969, après sa victoire dans le Tour d'Espagne. J'avais dix ans. La flamme s'est allumée ainsi.
Tu parles de cette passion des gens de ta région pour les critériums dans les années 60. Le cyclisme te semble-t-il être encore un sport populaire ?
Non. (Il marque une pause.) Pendant les quelques décennies qui ont suivi la guerre, l'abstinence avait crée des rêves d'abondance mais le cyclisme était associé à une certaine idée du bien être. Aujourd'hui, il reste enraciné dans le populaire, mais de façon plus matérialiste. Les « masses » préfèrent aller sur le Tour de France, principalement pour la caravane publicitaire. Pourtant, je crois encore à ce sport aujourd'hui et à son avenir. Il peut t'apporter une valeur de vie incalculable. C'est une telle passion...
Crédit photo : Jean-Baptiste Enès