Jumeaux Vinokourov : panache, gènes et ambition débordante

Crédit photo William Cannarella - DirectVelo

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Juillet 2003. Lors d’une étape du Tour de France qui a marqué tous les esprits, avec notamment la terrible chute de Joseba Beloki et la traversée d’une prairie de Lance Armstrong façon cyclo-crossman, Alexandre Vinokourov est le premier à couper la ligne d’arrivée dans les rues de Gap, peintes de bleu-blanc-rouge en ce 14 juillet synonyme de fête nationale. En guise de célébration, pour son premier succès d’étape sur les routes de la Grande Boucle, le Kazakh mime de bercer ses enfants, au passage sur la ligne. Ses petits jumeaux, Alex et Nicolas, viennent de fêter leurs 1 an une semaine plus tôt. Le père lui, est en train de signer la plus grande saison de sa carrière, puisqu’avant ce succès d’étape qui le mènera jusqu’à la 3e place finale du Tour de France, il avait déjà enlevé un second Paris-Nice, l’Amstel Gold Race et le Tour de Suisse. Ce palmarès, ses deux garçons le découvrent aujourd’hui, petit à petit. “Au plus je grandis, et au plus je prends conscience de son palmarès. Avant, je savais qu’il avait gagné les J.O, c’est tout”, explique Nicolas. Alex détaille un peu plus. “Ce qui m’a marqué, en plus des J.O, c’est ce podium sur le Tour de France. Je pense à la victoire sur la Vuelta également (2006). A la maison, il ne nous montre pas tout ça, mais c’est plutôt quand on va au Kazakhstan, que l’on a droit aux cassettes des grand-parents”, plaisante-t-il. Le Kazakhstan, les deux garçons n’y vont que rarement ; environ deux semaines par an. Le reste du temps, ils vivent à Monaco, où ils viennent de terminer leur 1ère ES et passeront le BAC l’an prochain. C’est également ici qu’ils roulent, occasionnellement, avec leur père.

UN DOUBLÉ SUR LE CHAMPIONNAT PACA LE JOUR DE LEUR ANNIVERSAIRE

Si Alex et Nicolas n’ont que de vagues souvenirs de la carrière de « Vino », les jumeaux viennent eux aussi, à leur échelle, de s’offrir leur premier succès marquant sur le territoire français. Le 7 juillet, jour de leurs 17 ans, ils se sont en effet offert le doublé à l’occasion du Championnat PACA sur route Juniors (voir classement). Pour du beurre, certes, mais tout de même. “Nous ne sommes pas français, donc c’est Pablo (Sanchez) qui a le titre. Nous sommes classés juste comme ça… Mais bon, symboliquement, je trouve que c’est bien d’avoir pu gagner. Et puis, le titre est quand même dans l’équipe”, détaille Alexandre. De son côté, Nicolas était aussi heureux pour son frère que s’il l’avait lui-même emporté. “On a dominé la course. Lorsque mon frère est parti, on a tout contrôlé, et on a fait craquer tous les Niçois et les Marseillais. C’était notre anniversaire, alors si l’un de nous partait, les autres allaient contrôler derrière”.

Juniors 1ère année, les deux sociétaires de l’UC Monaco se sentent progresser semaine après semaine. “Je n’étais pas content de mon début de saison. Je n’avais pas trop confiance en moi. Mais je me sens de mieux en mieux. C’est de bon augure pour les objectifs qui arrivent”, promet Alexandre. Même son de cloche pour Nicolas. “En début de saison, je n’étais pas très fort. Mais depuis, je suis monté en puissance. Lors de la Coupe du Monde en Allemagne (LVM Saarland Trofeo, NDLR), j’étais parmi les vingt meilleurs, ce qui m’a donné le moral et de la confiance. Maintenant, il faut essayer de gagner des courses”. Complices, les jumeaux ne restent pas collés l’un à l’autre pour autant. “On a les mêmes plans d’entraînements, la même vision du vélo, les mêmes idées. Mais après, chacun fait son truc… On essaie de rouler ensemble mais si on n’a pas le même emploi du temps à l’école, alors on roule chacun de notre côté”.

« IL Y A PEUT-ÊTRE UN OU DEUX GÈNES IDENTIQUES, MAIS SANS TRAVAIL... »

Si les deux hommes ont encore l’avenir devant eux et le temps de se découvrir, Alex se décrit actuellement comme grimpeur, tandis que Nicolas se pense rouleur-grimpeur. A distance, ils se taquinent lorsqu’on leur demande qui est le plus fort des deux. “En début d’année, c’était lui. Maintenant, je dirais qu’on a le même niveau. Et j’espère passer devant d’ici la fin de l’année”, résume Alex en se marrant. S’ils se tirent la bourre de façon on ne peut plus saine, les deux frères ont surtout en commun le modèle de leur père. “Je pense que j’ai son mental, lâche Nicolas. Pour que je lâche sur une course, il en faut beaucoup, et que j’ai passé le cap des 400%. Je suis toujours au maximum”, insiste-t-il auprès de DirectVelo. Les deux fils admirent le panache qu’a eu leur père durant toute sa carrière. “Il faut toujours prendre sa chance pour, au final, ne rien regretter”.

Voient-ils le fait d’être les fils Vinokourov comme un avantage ? “Il y a peut-être un ou deux gènes identiques… Mais sans travail, on n’obtiendra rien. Ce n’est pas comme ça que ça marche ! Mais sait-on jamais : peut-être que l’on sera encore plus forts que lui”, poursuit Nicolas, lequel ne manque pas d’ambition. “Je suis le meilleur Junior kazakh actuel, je pense. A moi de le prouver maintenant. Si je fais une carrière cycliste, ce ne sera pas pour faire équipier, mais pour être le meilleur. On verra déjà en fin de J2 comment je me débrouille. J’en saurai plus à ce moment-là, et surtout en Espoirs”. Alexandre est un petit peu plus prudent. “Faire carrière n’est pas une évidence. On ne sait jamais ce qui peut arriver. On a un double projet : scolaire et sportif. On va tout faire pour marcher sur le vélo, mais il faudra faire le point après les années Juniors et Espoirs. Si ça ne marche pas ? Pourquoi pas bosser dans le commerce”. Une chose est sûre : Dans un scénario idéal, Alex et Nico espèrent, eux aussi, titiller les sommets, comme leur père. “Sa carrière, c’est une pression supplémentaire. Mais mentalement, on en fait une force car on s’oblige à tenir, par respect pour lui, et pour ce nom”.

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