Yoann Paillot : « Une motivation supplémentaire de permettre à Alex de faire les Jeux »

Crédit photo Jean-Baptiste Bénavent - Fédération Française Handisport

Crédit photo Jean-Baptiste Bénavent - Fédération Française Handisport

Yoann Paillot participera aux Jeux Paralympiques de Paris 2024, du 28 août au 8 septembre prochains, en tandem avec Alexandre Lloveras lors de la course en ligne et du contre-la-montre sur route, mais aussi de la poursuite individuelle sur piste. L’ancien professionnel de 33 ans, qui participe encore à quelques courses en individuel avec le club d’Angoulême où il réside, explique à DirectVelo la genèse de ce projet, revient sur sa prise de marques ces derniers mois et évoque son envie ainsi que ses ambitions dans la perspective de cet évènement paralympique.

DirectVelo : Comment t’es-tu retrouvé associé au projet des Jeux Paralympiques 2024 avec Alexandre Lloveras ?
Yoann Paillot : Ça s’est fait par hasard. Je devais arrêter ma carrière après une dernière année chez les Amateurs avec Morbihan Adris Gwendal Oliveux. Je passais une formation de vendeur-technicien cycles et je devais travailler comme mécano dans mon ancienne équipe St-Michel-Mavic-Auber 93. Vers octobre-novembre, Laurent Thirionet, l’entraîneur national de paracyclisme, m’a appelé et m’a proposé ce projet avec Alexandre. Dans un premier temps, j’ai hésité, puis deux jours après, j’ai dit que ça m’intéressait. Il fallait que je réponde rapidement pour que l’équipe de France ait nos cotes pour les tandems qui ont été fabriqués en partenariat avec Airbus. En outre, le fait de participer aux Jeux à Paris dans mon pays était un objectif supplémentaire qui m’a poussé à prendre cette décision.

« IL NE ME RESTAIT PLUS QUE LES JEUX OLYMPIQUES »

Qu’est-ce que ça représente pour toi de participer aux Jeux Paralympiques ?
C’est toujours une fierté de faire les Jeux même si c’est en Para. Ce n’est pas qu’une fierté pour moi. Comme on est en binôme, c’est complètement différent, ça donne une motivation supplémentaire de permettre à Alex de faire les Jeux. C’est un bonus. J’ai participé à tous les Championnats, je suis monté sur les podiums. Il ne me restait plus que les Jeux olympiques. Chez les valides, je n’en ai jamais eu l’occasion, il fallait être en WorldTour et il y a tellement de places… Je n’aurais jamais pensé les faire une fois dans ma vie.

Comment s’est passée ton adaptation au tandem ?
J’ai commencé les premiers stages en janvier. Le tandem m’a vite plu. C’est complètement différent de ce que j’ai pu faire par le passé. Mon point faible est la piste. Au fur et à mesure des stages, je progresse, c’est en bonne voie. Je sors surtout du lot sur les épreuves sur route.

« IL FAUT ÊTRE COORDONNÉS »

Quelles sont les spécificités ?
Sur la piste, c’est complètement différent avec un départ arrêté et 16 tours. Alex sait la puissance qu’il doit exercer. On ne peut pas accélérer comme en solo. Il faut directement être dans l’allure, après ce n’est que de la résistance. On ne peut pas se permettre de mettre plus de puissance à un tour et moins à un autre pour compenser l’écart à deux. Sur la route, il y a plusieurs langages et codes pour indiquer quand on se met en danseuse ou lorsqu’on attaque. La veille, je lui décris le circuit, je le guide pour qu’il arrive à le visualiser. En course, je lui dis la tactique et plein de trucs pour communiquer sans que les autres équipes ne s’en aperçoivent. Pour le contre-la-montre, on communique de temps en temps mais moins. Je lui dis par exemple combien il reste de kilomètres et si on est dans les bons temps. Malgré tout, j’arrive à sortir plus de puissance en solo. Il faut être coordonnés pour qu’il ait la bonne cadence et ne pas que ça toxine.

Sur la piste, tu as participé au Championnat de France à Roubaix et au Championnat du Monde au Brésil fin mars….
Au France, c’était un premier test. On a gagné mais le niveau n’a rien à voir avec l'international qui est beaucoup plus élevé surtout l’année des Jeux. Au Mondial, on a fini 5e de la poursuite sur 4 km, on n’a pas été loin de la petite finale. On a aussi participé au 1 km départ arrêté et au 200 m lancé car il restait une place pour se débloquer, mais c’est complètement différent de l’effort en endurance. Par ailleurs, j’ai chuté deux fois à l’entraînement sur la piste. À Roubaix, on n’est pas tombé bien vite. Mais au Brésil, on s’en est pris une belle, la piste était un peu sale. On était à plus 60 km/h, c’était impossible de contrôler le tandem. Ce n’était pas idéal avant les épreuves, on était bien brûlés de partout. En tant que pilote, il y a un peu d’appréhension, il faut reprendre les automatismes, mais on progresse.

« ON POURRA PLUS FACILEMENT FAIRE LA SÉLECTION AUX JEUX »

Sur la route, tu as participé à deux épreuves de la Coupe du Monde à Ostende (Belgique) et Maniago (Italie) ainsi qu’au Championnat de France à Pontarlier…
À Ostende et Maniago, lors du contre-la-montre, ils ont enlevé un tour de circuit en raison de la pluie. C’était 20 km au lieu de 30. J’aurais préféré un effort plus long sachant que certains de nos adversaires sont des pistards, ça aurait permis de creuser plus d’écarts et ça aurait été un test grandeur nature pour les Jeux qui feront 28 km. On a terminé 3e et 5e. Pour ma première sur la course en ligne à Ostende, c’était compliqué au niveau du pilotage en peloton. À Maniago, ça allait mieux, on est arrivés pour la gagne, c’était encourageant. On a attaqué dans les derniers kilomètres, on a effectué un bon petit raid, on a été repris à la fin. Il y avait 105 km et ça roulait à 48-49 km/h de moyenne. Au France, la course en ligne était un genre de critérium et on a gagné le chrono qui ressemblait à celui des Jeux avec du dénivelé.

À quoi ressemble le parcours des Jeux Paralympiques ?
Ce sera le même circuit de 14 km aussi bien pour le contre-la-montre que pour la course en ligne. Le chrono est long de 28 km et l’épreuve en ligne de 125-130 km environ. Lors des deux manches de Coupe du Monde, c’était rectiligne et plat avec un peu de technique en ville. Aux Jeux, ce sera complètement différent avec du dénivelé et plus de technique. C’est pas mal pour moi et Alex. Plusieurs de nos adversaires ont de gros gabarits, on pourra plus facilement faire la sélection et une course d’usure. On reconnaîtra le parcours courant août.

« LA MÉDAILLE D’OR EN LIGNE DE MIRE »

Quel est ton programme d’ici le début des Jeux Paralympiques ?
Je sors d’un stage à Roubaix. Je pars refaire du foncier et enchaîner quelques courses Élites Nationales. Je pense en disputer entre 8 et 10. J’aurai encore trois stages avant les Jeux. C’est dommage qu’il n’y ait pas une autre course en tandem avant les Jeux, je trouve que ça manque. Concernant la piste, on s’entraîne à Roubaix. À Saint-Quentin-en-Yvelines, on aura un créneau d’entraînement la veille des Jeux. Mais il paraît que c’est beaucoup plus facile à piloter à Saint-Quentin qu’à Roubaix, donc ça devrait aller.

Quels seront vos objectifs pour ces Jeux à Paris ?
On a la médaille d’or en ligne de mire. On ne sait jamais ce qu’il peut se passer lors d’une épreuve d’un jour. Ça a déjà réussi par le passé à Alex. On y va pour ramener le maximum de victoires. On pense surtout à la route. La piste arrive en deuxième lieu, mais qui sait sur un bon jour….

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