Philippe Raimbaud : « Il faut de la décence »

Crédit photo Zoé Soullard - DirectVelo

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Philippe Raimbaud est un homme occupé. “Je m’étais fait une liste de dossiers à boucler en profitant du fait que j’allais avoir un peu de temps pendant le confinement. Je n’ai pas eu le temps de commencer. J’avais même prévu de ranger mon bureau, et pour le moment c’est un échec total”, sourit celui qui accompagne Bryan Coquard, Elie Gesbert, Guillaume Martin, Anthony Perez, Pierre Rolland, Audrey Cordon-Ragot ou encore Marie Le Net. Il explique à DirectVelo son travail d’agent de coureurs en cette période où le cyclisme, comme la société, est à l'arrêt.

DirectVelo : Quelle relation entretiens-tu actuellement avec les coureurs que tu accompagnes ?
Philippe Raimbaud : Il faut maintenir le lien, à la fois avec les coureurs mais également avec les équipes. Il y a du boulot. Le travail évolue avec la situation. J’essaie d’avoir des contacts réguliers avec les coureurs mais ce n’est pas propre à la situation actuelle, la seule différence est que nous nous voyons beaucoup moins (sourires). Mais on se parle tout autant qu’en temps normal. Il n’y a pas forcément besoin d’un sujet, on peut s’appeler simplement pour savoir si tout va bien, connaître dans quelles conditions le coureur passe ces journées et essaie de faire contre mauvaise fortune bon coeur.

« ILS NE SONT PAS LES PLUS À PLAINDRE »

Essaies-tu de les rassurer ?
Les coureurs ont une intelligence. Ils ont des yeux pour voir et des oreilles pour entendre. Ils ne vivent pas en apesanteur au-dessus de la société. Ils ont une famille, des amis… Ils savent très bien où ils se situent par rapport au reste de la société. Je n’ai pas grand-chose à faire si ce n’est de les accompagner, de les écouter et dialoguer avec eux pour connaître leur perception de la situation.

Quelle est-elle justement ?
Globalement, la gêne est vraiment sportive. Ce sont des champions. Leur terrain d’expression est la compétition et ils en sont privé. Ils tournent forcément en rond. C’est ça qui les préoccupe. Mais il n’y a aucune panique et ils ont la sagesse de mettre les choses en perspective. Dans le contexte actuel, ils savent pertinemment qu’ils ne sont pas les plus à plaindre. Nous sommes tous à observer une situation pleine d’inconnues. On ne sait pas de quoi demain sera fait. On imagine qu’on sortira un jour de cette période et que la situation actuelle aura laissé des traces. Et avant tout, au-delà des gens frappés dans leur famille, il y a aura une économie globale à genoux. La vraie source d'inquiétude est là. 

Un coureur, en fin de contrat, peut être plus inquiet que d’autres...
Oui, c’est évident. Il y a deux catégories de coureurs qui sont forcément plus inquiets que les autres, à savoir les coureurs en fin de contrat et les jeunes qui espèrent passer professionnels et qui ont bien sûr du mal à montrer leurs qualités actuellement… Par ailleurs, si les choses se passaient mal, avoir un contrat pour 2021 n’est pas une garantie. Si l’équipe disparaît… Aujourd’hui, les équipes regardent l’actualité avec prudence en se demandant l’impact qu’il y aura. 

« PAS LÀ POUR VENIR LEUR PARLER DE BUSINESS »

Quel type de contacts as-tu actuellement avec les équipes ?
Ils sont plus amicaux qu’autre chose. Elles doivent faire face à un certain nombre de problèmes et de questions à résoudre. Je ne suis pas là pour venir leur parler de business. Il faut de la décence. Il y a un problème sanitaire qui va au-delà du cyclisme. Le vélo n’est pas prioritaire. Il ne faut pas oublier qu’il y a des gens qui meurent et des entreprises qui souffrent. Ça me paraîtrait totalement incongru de parler transferts avec les équipes.

Ça le sera à quel moment ?
Par décence, comme je l’ai dit, ce n’est pas à l’ordre du jour. Les responsables des équipes ont d’autres soucis et préoccupations. On peut difficilement parler de ça. On avance dans l’inconnu. Ça tombe bien, on n’est pas encore dans la période des transferts (sourires). Dans les semaines à venir, je pense qu’on va plus parler du niveau de rémunération ou de conditions d’application de chômage partiel que de contrats pour les années suivantes. Pour ce qui concerne le monde du cyclisme, l’inconnu est la tenue ou non du Tour de France. Pour l’avenir d’une équipe par exemple, ça peut bien sûr être différent qu’il soit maintenu ou annulé. 

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