L’année 2020 restera dans tous les esprits. Un mot à lui seul pourrait résumer cette saison pas comme les autres : coronavirus. Organisateurs, staff, coureurs, bénévoles ou simples passionnés : toutes et tous ont été grandement impactés par ce violent tremblement de terre dont les premières grosses secousses ont été ressenties début mars, et qui n’a depuis guère laissé de répit. À l’occasion de ces derniers jours de l’année, DirectVelo vous propose de revenir sur quelques-uns des événements marquants de cette année pas comme les autres, afin de comprendre comment les acteurs du monde du cyclisme ont vécu cette période si particulière.
Ce lundi 28 décembre, coup de projecteur sur les coureurs qui ont peiné à trouver la bonne carburation à la reprise.

Officiellement, la saison amateur a recommencé le 30 juillet, à Monpazier (Dordogne), mais les coureurs n’ont pas attendu la reprise pour se mesurer entre eux. Dès le déconfinement, le 11 mai, l’application Strava a permis à chacun d’observer ce que faisait le voisin pour son retour sur la route. “Forcément avec Strava, il y a eu un peu le concours de celui qui avait la plus grosse, mais personnellement, je n’ai pas vraiment fait attention à ça”, sourit Jocelyn Guillot interrogé par DirectVelo. Pour Romain Campistrous, les coureurs n’ont pas attendu cette année pour « espionner » ce que font leurs coéquipiers ou adversaires. “Pour ma part, je regarde juste ce que font les autres mais sans en tenir compte pour mon entraînement”, promet le Tarnais. Mais forcément l’instrument a été très scruté pour savoir où chacun en était.

EN PLEINE FORME EN JUILLET

Cette saison, les coureurs ont plongé bien malgré eux dans l’inconnu. Si l’entraînement a beaucoup évolué ces dernières années, personne n’imaginait devoir innover avec une période de quatre mois sans course, qui plus est au moment des beaux jours. Avec seulement trois mois de compétitions derrière, la marge de manœuvre était courte pour se faire remarquer. Mieux valait donc arriver au top de sa forme dès le mois d'août, pour ne pas courir après la condition. Alors comment faire ? “On ne savait pas la durée du confinement quand ça a commencé en mars, rappelle Axel Laurance, qui débutait cette année chez les Espoirs. J’ai fait le choix de couper au début pour récupérer. Puis j’ai fait beaucoup de Zwift, beaucoup de courses… J’ai été entraîné là-dedans. C’était cool, ça permettait de rester motivé. À la fin du confinement, ça allait bien de suite. Je n’avais pas la condition d’un mec qui reprenait le vélo après une coupure. Avant juillet, j’ai fait beaucoup d’endurance à la maison. J’étais en grande forme en juillet”. Au point qu’il a fait forte impression auprès de ses coéquipiers du VC Pays de Loudéac pendant le stage pyrénéen des Bretons. “Je me suis découvert grimpeur, j’étais fort dans ces efforts”.

En juillet, Jocelyn Guillot était également très à l’aise dans les cols savoyards, notamment lors des sorties de sélection du comité Auvergne-Rhône-Alpes pour le Tour de l’Avenir. “J’ai fait un gros bloc en juillet avec beaucoup de dénivelé et d’heures de vélo, et des sorties très dures, rapporte le coureur de Bourg-en-Bresse Ain Cyclisme. J’avais mon plan en tête, et avec Simon (Gosselin, son entraîneur), nous nous y sommes tenus. On faisait le point régulièrement pour essayer de ne pas trop en faire et bien gérer. Ça pouvait être la période pour tester de nouvelles choses. Le temps est bon en été, et il y avait du temps avant les courses”.

« PERSONNE N’A GÉRÉ SON CONFINEMENT DE LA MÊME MANIÈRE »

Romain Campistrous a roulé 80 heures en juillet, “un gros mois” pour lui. Avant cela, il s'entraînait au feeling, et souhaitait surtout garder la partie de plaisir tout en observant des pauses. "Personne n'a géré son confinement de la même manière. Pour ma part, je n’ai pas fait une grosse coupure pendant cette période. J’ai fait pas mal d’home-trainer, environ une centaine d’heures, mais toutes les trois semaines j’observais des micro-coupures de trois jours… Cela m’a permis de pouvoir m‘amuser sur l’home-trainer et d’être opérationnel dès la sortie du confinement”. Fixé sur le nouveau calendrier “assez tard”, il a préféré ne pas couper pendant une longue période afin de “ne pas repartir de zéro”. A bon escient, pense-t-il alors, car en juillet, il a amélioré ses records de puissance de 5’ à 1h de 15 à 20 watts. De quoi arriver en confiance à la reprise. Même sentiment pour Léo Danès. “Je pense que j'ai fait ce qu'il fallait avant la reprise. Je me suis entraîné comme si c'était une nouvelle saison. J'étais frais et motivé. Le problème est arrivé un peu plus tard”, grimace le Finistérien du Team U Nantes Atlantique.

Si Thomas Champion a réussi son pari d'arriver en pleine forme dès début août pour taper dans l'œil d’une équipe pro (voir ici), tous n’ont pas eu la même « réussite ». “J’en ai un peu trop fait et je n’ai pas assez récupéré pour début août. Au Tour de Savoie Mont-Blanc, j’ai souffert de la chaleur et je n’étais pas assez frais, et sur cette course ça ne pardonne pas”, reconnaît Romain Campistrous. Léo Danès a lui eu une drôle d’impression. “J’ai eu le sentiment qu'on attendait de moi que je rattrape le temps perdu. Je n'ai peut-être pas eu assez de recul pour limiter le nombre de courses. Je courais pour courir. Après le Championnat de France, j'ai senti que j'étais moins bien”. A l’inverse, Jocelyn Guillot a lui (re)commencé fort. “Au Grand Prix du Cru Fleurie, la forme était top”, dit le coureur classé 3e de la course Toutes Catégories, qui marquait, le 1er août, la reprise des courses en Auvergne-Rhône-Alpes.

DES CHANGEMENTS... QUI CHANGENT TOUT

Sa très bonne forme du moment pousse alors son directeur sportif Christian Milesi à changer ses plans pour le Tour de Savoie Mont-Blanc qui débute le 5 août. Jocelyn Guillot n’est en effet pas prévu pour ce rendez-vous, mais le 31 juillet, il apprend l’annulation du Tour de l’Avenir (14 au 19 août), qu’il doit disputer avec son comité régional. Si les sensations sont là sur la première étape du « Savoie », la suite est compliquée. “Initialement, cette semaine-là, je devais faire une semaine ultra light en amont de l’Avenir... Il y a sûrement eu un manque de temps pour récupérer, et sur une course par étapes, ça ne pouvait pas passer. Parfois, ça ne se joue pas à grand-chose, peut-être que si l’Avenir avait été maintenu j’aurais eu des très bons résultats et j’aurais enchaîné sur une très bonne fin de saison. C’est hyper frustrant pour ma dernière année Espoirs”. Sa saison s’arrêtera sur un abandon à la Ronde de l’Isard. “J’étais cramé”, reconnaît-il. Comme lui, Léo Danès n’a pas su relancer la machine. “J'ai fait sauter une ou deux courses mais ça commençait à faire tard dans la saison”.

Mais d’autres ont su repartir du bon pied après avoir peiné en août. C’est le cas de Romain Campistrous - 5e du Tour du Pays de Montbéliard, en Coupe de France N1 - et d’Axel Laurance. “En fait, très vite à la reprise, j’ai commencé à avoir des douleurs aux ischios-jambiers qui étaient raides, fait savoir le coureur de 19 ans. Je pouvais « cramper » à tout moment dès qu’il y avait 140 kilomètres. Je coinçais en fin de course. J’ai abandonné à Montpinchon, au Roumois… Je n’arrivais pas à finir les courses. J’étais à fond…”. Ce changement de position  lui permet de se mettre en évidence lors de la Ronde de l’Isard. “J’étais bien ensuite à Paris-Chalette-Vierzon où il y avait 180 kilomètres. J’ai repris confiance”, assure le Breton, la tête tournée vers 2021. Pour l’heure, la préparation hivernale des coureurs de N1 n’est guère bouleversée. Et personne n’a envie d'être contraint d'innover une nouvelle fois la saison prochaine.

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