Mathilde Gros : « Je vais en rêver toute la nuit »

Crédit photo Thomas Maheux - DirectVelo

Crédit photo Thomas Maheux - DirectVelo

Cette fois, Mathilde Gros n’a pas trébuché face aux Allemandes ! Sautée sur la ligne par Emma Hinze dans la finale à Munich, la Française jouait cette fois-ci à domicile et avait l’occasion de prendre une revanche à Saint-Quentin-en-Yvelines, pour le Championnat du Monde. Après avoir éliminé son bourreau du Championnat d’Europe, la Provençale a dominé Lea Sophie Friedrich dans la grande finale. Un titre qui a une saveur très particulière pour celle qui était sortie des Jeux Olympiques perdue. Du creux de la vague au sommet, Mathilde Gros est revenue avec DirectVelo sur la fin d’une période difficile, avec pour cap Paris 2024. 

DirectVelo : Tu es la nouvelle Championne du Monde de vitesse !
Mathilde Gros : C’est une incroyable soirée. C’est vraiment un rêve de chanter la Marseillaise devant mon public, sur ma piste, dans notre vélodrome. Avec l’équipe de France, on s’entraîne ici. C’est pour tous les autres athlètes, le staff, la Fédé… C’est pour eux. On ne peut pas rêver mieux ce soir. C'est incroyable, je pense que je vais en rêver toute la nuit. Je pense à mes proches, mon coach. Ce n'est pas mon rêve ultime, parce que c'est Paris 2024, mais je pense que ça va être l'un des plus beaux souvenirs de toute ma vie.

Arriver sans trop de pression t'a-t-il fait du bien ?
Oui, ça fait du bien ! Ce n'est que du plaisir, c'est ce que Greg (Baugé) me disait à chaque fois. Kiffer le moment présent, tout donner, ne pas avoir de regrets et c'est ce que j'ai essayé de faire. C'est juste trop bien.

« TÊTE CONTRE TÊTE »

Tu perds pourtant la première manche de la demie...
Sur la première, je n'ai pas assez lancé mon braquet. Elle est venue m'empaqueter et je n'ai pas pu m'imposer. Je me suis dit que j'étais au pied du mur, je n'avais pas le choix que de gagner la prochaine. À Munich, ça s'était joué à un boyau pour le titre de Championne d'Europe, et là je me suis dit que chez moi ce n'était pas possible. Greg m'a dit que c'était ma journée, mon moment. Je devais tout donner ça allait aussi se faire à l'intelligence. Être à domicile aide énormément, ça m'a beaucoup aidée sur la deuxième manche et la belle. 

Il y a toujours cette grosse bataille dans les regards avec Emma Hinze...
Comme d'hab (rires) ! À Munich il y a eu ce jeu de regard, je voulais lui montrer que j'étais là. Et là encore plus, à la maison, elle gagne la première manche... On était à ça, tête contre tête. Je ne fais pas ça avec les autres parce que chacune est différente. Ça ne sert à rien de fixer quelqu'un qui ne vous regarde pas, là c'est vraiment avec elle. Ce sera ça à chaque fois. On en rigole, on est tellement à fond que c'est drôle. 

« LA TERRE ENTIÈRE L’A ENTENDU »

Mais pas en finale !
Non, on est toutes différentes, Emma le fait à chaque fois avec toutes les concurrentes. J'avais couru contre elle une fois et je n'avais pas regardé parce que je m'en foutais. Mais en fait, je me suis dit « tu me regardes, je vais te regarder et tout faire pour passer la ligne la première ». En plus avec Greg comme coach, on dirait qu'il est avec moi sur le vélo. Je montre que j'ai changé. 

Comment as-tu vécu ces instants après la ligne ?
J'ai juste crié de toutes mes forces, la Terre entière l'a entendu. C'était un soulagement, une joie immense devant la famille, les amis, le public français. C'est chez nous, c'est notre piste où on s'entraine tous les jours. C'est une émotion que je n'avais jamais ressentie de toute ma vie. Quand Greg, Michaël (D'Almeida) ou Florian Rousseau nous en parlait, ils évoquaient les Mondiaux de 2015. On ne l'a pas vécu, on ne se rend pas compte comme c'est puissant. Ça va être tellement bien Paris. On ne sera pas tous Champions olympiques, mais ça va être un truc de malade et on fera tout pour aller le plus loin possible. 

« LA BALANCE PENCHE ENFIN DU BON SENS »

Qu'est-ce qui a changé depuis les Jeux ?
Beaucoup de choses ! Ça s'est énormément enchainé. Roubaix ce n'était pas comme ici, c'était en plus après des moments compliqués. On a tout changé, Greg est arrivé en janvier, on a tout repris du début, pourquoi j'avais choisi le vélo plutôt que le basket... Juste le plaisir que je prenais avant sans la pression. J'ai compris que je devais travailler techniquement, on était toutes fortes, c'est dans un mouchoir de poche, c'est du jamais vu. C'était à celle qui allait courir le plus intelligemment. Même si aujourd'hui ça ne passait pas, je voulais qu'on en tire des leçons, positives ou négatives, pour Paris. Même si j'ai gagné, il va falloir revoir des choses pour peaufiner tout ça. L'objectif, c'est les Jeux.

Est-ce un déclic ?
Je ne sais pas si c'est un déclic, mais on travaille tout pour dans deux ans. C'est du positif, ça fait du bien, mais il y aura des Championnats du Monde à Glasgow qui compteront pour la qualif, il y a plein de trucs, il y a encore dimanche. Mais je sais que ce soir je vais profiter à fond avec les proches et le staff.

Tu te sens soulagée ?
Je ne sais pas si c'est un soulagement. Greg le sait mieux que quiconque. Il était là avant en tant qu'athlète. Quand c'est dur à l'entrainement, que ça ne marche pas forcément en compétition, qu'il y a de la pression... C'est dur. Je me rends compte que j'ai ce maillot, que j'ai gagné. La balance sacrifices/bienfaits penche enfin dans le bon sens. Ça fait du bien au moral.

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